Dans les ateliers centraux de la SNCC de Lubumbashi, 1 400 cheminots s'emploient quotidiennement à maintenir des locomotives hors d'âge sur les rails. Les pièces de rechange sont généralement tirées des nombreuses machines ayant subi des avaries. "On déshabille saint Pierre pour habiller saint Paul", résume un chef d'atelier.

Le dernier train du Katanga (en images)

En janvier dernier, la Société nationale des chemins de fer du Congo inaugurait en grande pompe le New Express Diamant Béton, un train passagers de luxe reliant Lubumbashi à Mwene-Ditu, petite bourgade du Kasaï. Ce convoi sifflera-t-il le renouveau du rail katangais?

Ce jour-là, sur un quai de gare remis à neuf, 143 passagers embarquent à bord des voitures chinoises du Diamant Béton pour un périple de quelque 780 kilomètres. Il leur faudra deux jours de voyage à une vitesse moyenne de 20 km/h pour atteindre leur destination. Le chemin de fer katangais, avec ses 3 640 kilomètres de rails, est l’un des plus vétustes du continent. Fondé en 1906, il était alors la clé de voûte du système colonial. La citation de Stanley – « Sans chemin de fer, le Congo ne vaut pas un penny » – résume l’équation: pour exploiter les minerais de cette région enclavée, le train constituait la seule option.

A l’agonie depuis les années 1990, la Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC) tente aujourd’hui d’apparaître comme un interlocuteur de premier ordre auprès des institutions et des compagnies minières. Les moyens de déplacement constituent en effet un enjeu majeur pour désenclaver les villes et villages de « l’hinterland » congolais. La vétusté des routes et leur insécurité confèrent à la SNCC une position stratégique mais, malgré les tentatives de réhabilitation, elle ne s’est jamais relevée. Face à l’incurie du rail, les groupes miniers privilégient toujours le réseau routier pour l’exportation des matières premières.

D’autres défis entravent le renouveau de la SNCC: vols de matériel, locomotives vieillissantes, arriérés de salaires et nombre pléthorique d’employés. D’une moyenne d’ âge de 60 ans, la majorité des cheminots congolais n’attendent que leur retraite. La récente promesse d’investissements allemands redonne espoir aux cadres de la compagnie. D’ici là, seules la volonté des cheminots et les réparations de fortune maintiennent les lignes en fonction.

Un article de Colin Delfosse, avec le soutien du Fonds pour le journalisme en Fédération Wallonie-Bruxelles.

Au mur du centre de formation SNCC, une photo d'archives de la Compagnie du chemin de fer du bas-Congo au Katanga (BCK), ancêtre colonial de la SNCC.
Au mur du centre de formation SNCC, une photo d’archives de la Compagnie du chemin de fer du bas-Congo au Katanga (BCK), ancêtre colonial de la SNCC.
Le Diamant Béton en gare de Tenke, à 237 kilomètres de Lubumbashi. Ce nouveau train pour passagers, nommé d'après le président congolais Félix
Le Diamant Béton en gare de Tenke, à 237 kilomètres de Lubumbashi. Ce nouveau train pour passagers, nommé d’après le président congolais Félix « Fatshi Béton » Tshisekedi, est le seul autorisé à circuler.
Le Diamant Béton à proximité du parc de l'Upemba, sur le tronçon Bukama-Kabondo. Passé les centres urbains de Likasi et de Kolwezi, le rail katangais est cerné par la brousse, sur des centaines de kilomètres.
Le Diamant Béton à proximité du parc de l’Upemba, sur le tronçon Bukama-Kabondo. Passé les centres urbains de Likasi et de Kolwezi, le rail katangais est cerné par la brousse, sur des centaines de kilomètres.
Le rail, autrefois principal moyen de déplacement, est devenu secondaire au Katanga. Sortir de Lubumbashi, qui compte plus de deux millions d'habitants, se fait quasiment au pas.
Le rail, autrefois principal moyen de déplacement, est devenu secondaire au Katanga. Sortir de Lubumbashi, qui compte plus de deux millions d’habitants, se fait quasiment au pas.
Kabongo, agent de police ferroviaire de Kamina. La SNCC emploie aujourd'hui plus de 14 000 personnes, dont la moyenne d'âge est de 60 ans. Plus de 2 000 cheminots attendent leur prime de départ à la retraite.
Kabongo, agent de police ferroviaire de Kamina. La SNCC emploie aujourd’hui plus de 14 000 personnes, dont la moyenne d’âge est de 60 ans. Plus de 2 000 cheminots attendent leur prime de départ à la retraite.
Gaby, 21 ans, et Freddy, 13 ans, tentent de rejoindre Lubumbashi à l'arrière d'un wagon de marchandises. L'arrêt des trains voyageurs a fait exploser le nombre de passagers clandestins sur les rails
Gaby, 21 ans, et Freddy, 13 ans, tentent de rejoindre Lubumbashi à l’arrière d’un wagon de marchandises. L’arrêt des trains voyageurs a fait exploser le nombre de passagers clandestins sur les rails
Des journaliers dégagent les voies non loin de la gare de Kamina. Trois lignes partent de cette ville connue comme le noeud ferroviaire de la région: vers Kindu au nord, vers Illebo au nord-ouest et vers Lubumbashi au sud-est.
Des journaliers dégagent les voies non loin de la gare de Kamina. Trois lignes partent de cette ville connue comme le noeud ferroviaire de la région: vers Kindu au nord, vers Illebo au nord-ouest et vers Lubumbashi au sud-est.

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