Hervé Hasquin

La Hongrie du trop catholique Orban. Un Pétain sur le Danube (carte blanche)

Hervé Hasquin historien, écrivain, académicien

Hervé Hasquin, historien, écrivain et académicien, s’exprime avec vigueur contre le Premier ministre hongrois. « La démocratie « illibérale » de Viktor Orbán, c’est Pétain et Vichy sur le Danube! », écrit-il.

Peuplée de Magyars arrivés vers 900, la Hongrie peut revendiquer ses racines chrétiennes. Et comment! Son roi Etienne I est couronné le 1er janvier 1001 avec la bénédiction du pape. Dès le milieu du XIème siècle, le pays est considéré comme le rempart contre le monde orthodoxe, contre le monde païen et, un peu plus tard, contre le monde musulman.

1456. L’heure de la gloire. Grâce aux Hongrois, les Ottomans subissent un terrible échec devant Belgrade. L’invasion de la Hongrie par les Turcs est retardée de 70 ans. Cette année-là, le pape proclame la Hongrie « bouclier de la Chrétienté ». On sonnera même dorénavant l’angélus le midi dans toutes les églises du monde catholique!

Fierté et Décadence. Deux tiers du territoire tomberont bientôt sous la coupe des Turcs. Le dernier tiers avait à sa tête un Habsbourg de Vienne depuis le milieu du XVIème siècle. C’est le début d’une monarchie austro-hongroise, bientôt empire. A l’intérieur de cet ensemble qui comprenait aussi le royaume de Bohême, le royaume de Hongrie retrouvera progressivement ses limites d’antan. Au XIXème siècle, la nationalisme magyar bouillonne contre l’Autriche. La langue nationale aux origines obscures est âprement défendue face à l’allemand. Mais l’appétit d’autonomie des Hongrois de souche montre une totale intrasigeance à l’égard des minorités slovaques, croates, roumaines et serbes. Un mot d’ordre: la magyarisation des autres peuples, l’assimilation pure et simple. Et cela jusqu’à la première Guerre mondiale …

4 juin 1920. Le traité de Trianon. L’empire austro-hongrois est démantelé. Les Alliés ont prêté main forte aux peuples dominés. La Hongrie – environ 300 000 km2 – est désossée. Elle est réduite des deux tiers et ne compte plus que 93 000 km2. Trois millions de Hongrois vivent désormais dispersés au-delà des nouvelles frontières. L’orgueil national ne s’en est jamais remis. Le régime fascisant de la fin des années trente pactise avec Hitler. L’appât? Un léger agrandissement du territoire qui peut laisser espérer un retour à la grandeur passée. Rêve éphémère. La liberté est retrouvée après l’occupation soviétique. Mais les virus d’ancien régime ont survécu. Viktor Orbán n’a fait que les raviver.

Déjà premier ministre de 1998 à 2002, il agite les vieux démons de la tradition hongroise dès 2011. Une nouvelle Constitution. Mais tout un symbole. Référence à l’histoire millénaire du pays et à ses racines chrétiennes. Octroi de la nationalité hongroise aux Magyars citoyens des pays voisins. Protection de la vie dès son commencement. En 2019, la politique familiale et chrétienne, donc nataliste, est enore plus clairement affirmée. Elle se double de xénophobie : la chasse aux migrants musulmans. Pas celle des chrétiens. Les Ukrainiens sont les bienvenus pour répondre aux besoins de main d’oeuvre. La défense de la famille traditionnelle est érigée en dogme. La migration n’est pas la solution. Gloire au christianisme en Europe. Il doit s’y renforcer « sans quoi la Hongrie restera un Etat solitaire ». La dénonciation de l’homosexualité n’est rien d’autre que le corollaire d’une pensée chrétienne très dogmatique.

La démocratie « illibérale » de Viktor Orbán, c’est Pétain et Vichy sur le Danube!

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