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L’accord russo-turc pourrait permettre une désescalade, reconnaît l’UE

L’accord russo-turc conclu mardi soir à Sotchi sur un contrôle de la frontière syrienne et un retrait turc constitue une tentative pour parvenir à la fin du cycle actuel de violences, a reconnu mercredi l’Union européenne, par la voix de la présidence finlandaise du Conseil. Les députés, quant à eux, ont adopté un ton bien plus critique.

« Concernant l’accord dit de Sotchi, la désescalade des hostilités au nord-est de la Syrie pourrait sauver des vies et prévenir des souffrances de populations civiles », a commenté Titty Tuppurainen, la ministre finlandaise en charge des Affaires européennes, au terme d’un débat au Parlement européen.

« Dans ce sens, nous l’accueillons comme une tentative pour arriver à la fin du cycle actuel de violences », a-t-elle ajouté.

La ministre a toutefois insisté sur la nécessité d’attendre encore pour vérifier les véritables conséquences de cet accord. Elle a répété la nécessité d’un accord politique négocié « par les Syriens pour les Syriens » sous l’égide des Nations unies, sur base de la résolution 2254 de 2015, et rappelé que des pourparlers débuteront fin du mois à Genève.

Rappelant que l’Union avait déjà condamné l’incursion turque et que les États membres s’étaient engagés à suspendre leurs ventes d’armes à la Turquie, Mme Tuppurainen a aussi demandé de reconnaître la contribution de plusieurs acteurs internationaux au ralentissement des violences, allant jusqu’à citer la visite du duo américain Pence-Pompeo chez le président turc Erdogan en plus de l’accord Poutine-Erdogan.

Mais « il n’y a aucune excuse pour la mort de 200 civils, les bombardements d’hôpitaux et de stations d’épuration d’eau ». En outre, l’offensive turque sape la lutte contre l’État islamique, a-t-elle dénoncé. La Turquie, qui « a fait des efforts énormes dans l’accueil de réfugiés », a participé par son offensive à rendre la situation plus « complexe et dramatique ». La ministre finlandaise a insisté pour un accès libre à l’aide humanitaire que l’UE continuera de soutenir.

« Ceci éloigne encore la Turquie de l’Union européenne »

Le ton était bien moins conciliant dans les rangs des députés, qui préparent une résolution sur laquelle ils voteront jeudi.

« Ceci éloigne encore la Turquie de l’Union européenne », a commenté le conservateur allemand Michael Gahler pour le PPE. Il a rappelé que le Parlement avait demandé en mars la suspension formelle des négociations d’adhésion avec la Turquie.

Les plus importants groupes politiques du Parlement appellent à prendre des sanctions économiques ciblées contre la Turquie. « Pourquoi ne pas envisager des mesures sur l’importation de produits agricoles turcs, ou la suspension de l’union douanière UE-Turquie ? « , demande M. Gahler.

Pour Kati Piri (S&D), l’accord de Sotchi risque bien de légitimer la présence russe sur la frontière turco-syrienne.

Une zone de sécurité contrôlée par les Nations unies est réclamée par de nombreux eurodéputés.

Pour Hilde Vautmans (Open Vld, Renew Europe), « l’Europe est aux abonnés absents », réduite à un rôle d’observatrice des actions des puissances américaine, russe ou turque. Et ce, alors que « nous devrons assumer les conséquences migratoires et celles de la radicalisation ». Elle a aussi appelé à se soucier des plus de 700 enfants européens dans les camps du Kurdistan syrien.

« Où est l’Europe ? « , a embrayé Frédérique Ries (MR, Renew Europe). Elle a stigmatisé l’absence d’un véritable embargo européen sur les exportations d’armes vers la Turquie et appelé à un gel des crédit de pré-adhésion à la Turquie, sans atteindre les populations civiles.

Kris Peeters (CD&V, PPE) est allé dans ce sens. La crise actuelle est un rappel amer à l’UE pour qu’elle développe sa politique migratoire et une Europe de la défense, a-t-il dit en appelant lui aussi à une zone de sécurité sous contrôle de l’ONU.

Les Verts/ALE sont également favorables à des sanctions économiques. La néerlandaise Tineke Strik a cité pour exemple une suspension des accords commerciaux. La belge Saskia Bricmont a appelé à une action coordonnée de l’UE pour rapatrier les enfants des camps.

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