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L’abolition universelle de la peine de mort: une utopie ?

A l’occasion de la 19e Journée européenne et mondiale contre la peine de mort, la ministre des Affaires étrangères Sophie Wilmès réaffirme dimanche l’engagement belge sur l’abolition universelle de la peine de mort.

Cette année, la Journée mondiale est axée sur les femmes, bien qu’elles ne représentent qu’un faible pourcentage des personnes condamnées à la peine de mort. « Dans certains pays, les femmes sont plus souvent condamnées à mort que les hommes pour des crimes touchant à la morale sexuelle, comme l’adultère. En outre, les circonstances atténuantes liées à la violence et aux abus sexistes sont rarement prises en compte au cours de la procédure pénale », pointe Sophie Wilmès. « La peine de mort viole donc non seulement le droit à la vie, mais aussi d’autres droits de l’homme tels que le droit à l’égalité et à la non-discrimination. Elle reste avant tout un châtiment cruel et une violation inacceptable de la dignité humaine », ajoute la ministre.

Sophie Wilmès
Sophie Wilmès

Vendredi dernier, le Conseil des Droits de l’Homme a adopté une nouvelle résolution, co-présentée par Belgique, qui porte sur la question de la transparence dans l’application de la peine de mort. Cette résolution « appelle les pays qui n’ont pas encore aboli la peine de mort à garantir la transparence dans l’imposition et l’exécution de cette peine, y compris dans leurs méthodes d’exécution, et appelle les pays qui procèdent encore à des exécutions secrètes à mettre fin à cette pratique », précise le SPF Affaires étrangères. Elle a été soutenue par une soixantaine de pays.

Avec cette initiative, la Belgique, candidate pour un siège au Conseil des Droits de l’Homme pour la période 2023-2025, s’inscrit dans l’objectif d’une abolition complète de la peine de mort pour tous les crimes dans le monde, ponctue le communiqué. La peine de mort a été abolie dans notre pays en 1996, mais la dernière exécution remonte à 1950.

– Majorité d’abolitionnistes –

Fin 2020, Amnesty International comptabilisait 144 pays abolitionnistes en droit ou de facto, c’est-à-dire ceux n’ayant pas procédé à des exécutions au cours des dix dernières années. Soit près des trois quarts des Etats dans le monde.

Parmi eux, 108 ont aboli la peine de mort par la loi, pour tous les crimes, selon l’ONG. Près de la moitié d’entre eux se trouvent en Europe et en Asie centrale.

Depuis le début de l’année 2021, deux autres pays ont mis fin à l’application du châtiment capital, le Kazakhstan et le Malawi. En Sierra Leone, l’abolition a été votée en juillet mais la loi n’est toujours pas promulguée.

Aux Etats-Unis, la Virginie a rejoint en mars dernier les 22 autres Etats américains abolitionnistes, une décision d’autant plus symbolique que ce territoire détient le record d’exécutions dans l’histoire américaine et qu’aucun Etat de l’ancien Sud confédéré n’avait encore franchi ce pas. Trois autres Etats (Californie, Oregon, Pennsylvanie) observent un moratoire.

Salle dédiée aux exécutions, pénitencier de Huntsville, au Texas
Salle dédiée aux exécutions, pénitencier de Huntsville, au Texas© Reuters

Plus de 30 pays d’Afrique maintiennent encore la peine de mort dans leur législation, mais un peu moins de la moitié ont procédé à des exécutions ces dernières années.

En 2020, aucune exécution n’a été recensée à Bahreïn, au Bélarus, au Japon, au Pakistan et au Soudan, alors qu’en 2019 ces pays avaient tous appliqué des sentences capitales. La Gambie, la Malaisie, la Russie et le Tadjikistan ont maintenu leur moratoire sur les exécutions.

– En 2020, des exécutions dans 18 pays –

Décapitation, électrocution, pendaison, peloton d’exécution ou encore injection létale: les méthodes prévues sont nombreuses, souligne l’ONG Amnesty International dans son dernier rapport, portant sur l’année 2020.

Au moins 483 personnes ont été exécutées en 2020 dans 18 pays selon Amnesty, soit une baisse de 26% par rapport à 2019 (657 exécutions), ce qui va dans le sens du recul constaté année après année depuis 2015.

Ce chiffre, le plus faible jamais enregistré depuis plus d’une décennie, n’inclut toutefois pas les milliers d’exécutions qui ont probablement eu lieu, selon Amnesty, en Chine, où ces données sont classées secret d’État, mais également en Corée du Nord et au Vietnam.

Quatre pays comptabilisent 88% de l’ensemble des exécutions recensées en 2020: l’Iran (246), l’Egypte (107), l’Irak (45) et l’Arabie saoudite (27).

La diminution du nombre total d’exécutions enregistrées au niveau mondial est principalement imputable à deux pays du Moyen-Orient : l’Arabie Saoudite où ce nombre a chuté de 85% et l’Irak où il a diminué de plus de 50%.

En Arabie Saoudite qui avait recensé 184 exécutions en 2019, la baisse est en partie due à un moratoire sur les condamnés dans les affaires de trafic de drogue.

Bien que le royaume ait annoncé l’année dernière des réformes du système judiciaire, comme l’abolition de la peine de mort pour les personnes condamnées pour des crimes commis alors qu’elles avaient moins de 18 ans, au moins 40 personnes ont déjà été exécutées entre janvier et juillet 2021.

Après une interruption de plusieurs années, l’Inde, Oman et le Qatar ont repris les exécutions. En Afrique subsaharienne, les exécutions ont chuté de 36%, passant de 25 en 2019 à 16 l’an dernier. En revanche, en Égypte, elles ont plus que triplé pour atteindre un total qui n’avait jamais été aussi élevé depuis le pic enregistré en 2013 (109 exécutions).

Pour la 12e année consécutive, les Etats-Unis ont été le seul pays du continent américain à mettre à mort des prisonniers. La Cour suprême a autorisé en juillet 2020 la reprise des exécutions fédérales après 17 ans d’interruption. Le nombre d’exécutions et de condamnations à mort a toutefois diminué par rapport à 2019, passant respectivement de 22 à 17 et de 35 à 18.

– Condamnations à mort en baisse –

Au moins 1.477 condamnations à mort ont été recensées dans 54 pays en 2020, soit 36% de moins qu’en 2019, où l’ONG en avait enregistré au moins 2.307 dans 56 pays.

Cette baisse est due en partie à la pandémie de Covid-19 qui a entraîné des perturbations et des retards dans le fonctionnement des systèmes judiciaires partout dans le monde.

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