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Joe Biden au Capitole pour défendre ses grandes réformes

Le Vif

Joe Biden a fait vendredi le rare déplacement de la Maison Blanche jusqu’au Capitole pour tenter de rallier tous les élus démocrates autour de ses grandes réformes, qui s’embourbent sous le poids d’une guerre entre l’aile gauche et les centristes.

Ex-sénateur pendant plus de 35 ans, le président américain a parcouru, accompagné d’une impressionnante garde rapprochée, les couloirs qu’il connaît si bien pour s’engouffrer dans une réunion des élus de son camp à la Chambre des représentants.

Il n’a pas fait de déclaration à son arrivée.

« Il veut parler directement aux parlementaires, répondre à leurs questions, et expliquer pourquoi nous devrions tous travailler ensemble pour donner aux Américains un peu plus d’oxygène », grâce à des mesures d’aides censées soulager les familles qui ont du mal à boucler les fins de mois, à déclaré la porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki.

« Il s’agit de ses propositions, de ses idées audacieuses », a-t-elle insisté.

L’objectif est clair: convaincre ses troupes de faire avancer ses réformes, paralysées aux Congrès, pour éviter le naufrage parlementaire.

Joe Biden, réputé couche-tôt, avait éteint plus tard que d’habitude les lumières du Bureau ovale jeudi, espérant un vote final sur l’un de ses grands projets, un investissement massif dans les infrastructures américaines.

Las, les parlementaires démocrates, trop divisés, y ont renoncé.

– Coup de billard parlementaire –

Joe Biden a promis de « reconstruire en mieux » l’Amérique après la pandémie, et face au changement climatique. Il veut rénover les infrastructures physiques et rebâtir l’architecture sociale.

Le septuagénaire, dont la popularité s’étiole depuis le retrait chaotique d’Afghanistan, et qui peine à susciter l’enthousiasme populaire pour ses réformes, doit réussir un coup de billard parlementaire à plusieurs bandes.

Il y a d’un côté de lourds investissements dans les routes, les ponts, les réseaux électriques, qui sont plutôt consensuels, soutenus par plusieurs élus républicains, et, sur le papier, par les démocrates.

Et il y a de l’autre un gigantesque programme de dépenses sociales (éducation, santé, garde des jeunes enfants) et environnementales, dont les conservateurs ne veulent pas entendre parler, et qui divisent le camp démocrate.

Leur montant, encore incertain, était annoncé au départ à 3.500 milliards de dollars.

L’articulation entre les deux fait l’objet de tractations certainement incompréhensibles pour le grand public.

Les démocrates progressistes refusent de voter sur les infrastructures sans garanties sur les dépenses sociales. Leur argument: les démocrates du centre, une fois financés les ponts et les routes, seraient trop heureux de renvoyer aux calendes grecques un vote sur cet autre volet.

Pour certains démocrates centristes – les plus en vue étant le sénateur Joe Manchin et la sénatrice Kyrsten Sinema – la question est celle du montant, qu’ils voudraient baisser, et du financement, qu’ils contestent, par des hausses d’impôt sur les riches et les multinationales.

Mais au-delà de ces marchandages, le débat porte sur la philosophie même du projet Biden, censé faire de l’Amérique du 21ème siècle un modèle de prospérité et de stabilité face à la Chine.

Pour ces démocrates centristes, et pour tout le camp républicain, l’Etat ne doit pas trop se mêler, même avec les meilleures intentions, de la vie privée des Américains.

Pour les élus les plus à gauche, emmenés par le sénateur Bernie Sanders, il y a au contraire urgence à corriger des inégalités béantes.

Et au milieu, il y a Joe Biden qui tente la synthèse, en répétant à l’envi « je suis un capitaliste », mais aussi qu’il faut soutenir la classe moyenne laborieuse.

Or, si les démocrates contrôlent le Congrès, leur majorité au Sénat est si courte que toute défection est impossible. Sans compter qu’ils risquent fort de la perdre dans un peu plus d’un an, lors des élections de mi-mandat.

Pour compliquer encore les choses, les républicains, se frottant les mains face à cette guerre intestine, veulent que les démocrates se débrouillent seuls, au prix là encore de manoeuvres parlementaires tortueuses, pour voter, avant le 18 octobre, un relèvement du « plafond de la dette ».

Cette procédure budgétaire, longtemps considérée comme technique, mais désormais prisonnière des clivages partisans, doit empêcher un défaut de paiement des Etats-Unis, aux conséquences imprévisibles.

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