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Iran: le religieux modéré Hassan Rohani élu président

Le Vif

Le religieux modéré Hassan Rohani a créé la surprise en remportant dès le premier tour la présidentielle iranienne avec 50,68% des voix, une victoire qui marque le retour des modérés et réformateurs au gouvernement après une longue traversée du désert.

Immédiatement après l’annonce des résultats officiels, plusieurs milliers d’Iraniens sont descendus à pied ou en voiture dans les rues de la capitale pour « fêter » la victoire.

Quelque 1.000 personnes arpentaient l’avenue Vali Asr dans le centre de la capitale, a constaté un journaliste de l’AFP. Ils portaient des portraits de M. Rohani mais aussi ceux des anciens présidents Mohammad Khatami (réformateur) et Akbar Hachemi Rafsandjani (modéré). Un peu partout dans la ville, des automobilistes circulaient en klaxonnant, ont rapporté des témoins.

Le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a salué samedi l’élection de M. Rohani, selon son site officiel, khamenei.ir. M. Rohani a « obtenu 18,6 millions de voix sur un total de 36,7 millions de votes exprimés », a déclaré le ministre iranien de l’Intérieur, Mostafa Mohammad Najar à la télévision d’Etat, en donnant les résultats définitifs du scrutin. Il a ajouté que « la participation avait atteint 72,7% », sur les 50,5 millions d’électeurs appelés aux urnes, contre 85% en 2009.

Le vainqueur a été félicité par les autres candidats ainsi que par le président sortant, Mahmoud Ahmadinejad.

Après une campagne atone, M. Rohani, un proche de M. Rafsandjani, a bénéficié du désistement du candidat réformateur Mohammad Reza Aref et de l’appui mardi de M. Khatami.

La victoire de M. Rohani ne marquera toutefois pas une rupture dans la politique de la République islamique, les dossiers stratégiques comme le nucléaire ou les relations internationales étant sous l’autorité directe du guide suprême Ali Khamenei.

L’élection présidentielle intervient sur fond de grave crise économique due aux sanctions internationales imposées à l’Iran en raison de son programme nucléaire controversé et quatre ans après la victoire contestée dans la rue de M. Ahmadinejad.

Selon les chiffres officiels, M. Rohani devance largement les trois principaux candidats conservateurs: le maire de Téhéran Mohammad Bagher Ghalibaf (16,5%), l’actuel chef des négociateurs nucléaires Saïd Jalili (11,35%) et l’ex-chef des Gardiens de la révolution, l’armée d’élite du régime, Mohsen Rezaï (10,58%).

Les deux autres candidats, l’ex-chef de la diplomatie Ali Akbar Velayati et Mohammad Gharazi, arrivent plus loin derrière. Tout en étant le représentant de l’ayatollah Khamenei au Conseil suprême de la sécurité nationale, M. Rohani prône plus de souplesse dans le dialogue avec l’Occident, un dialogue qu’il avait dirigé entre 2003 et 2005 sous la présidence Khatami. Durant la campagne, il a évoqué de possibles discussions directes avec les Etats-Unis, ennemi historique de l’Iran. Saïd Jalili, membre de l’aile dure du régime, ou M. Ghalibaf refusent, eux, toute « concession ».

Dans la journée, des policiers s’étaient déployés sur les principales places de la capitale en prévision de l’annonce des résultats.

En 2009, l’annonce de la réélection de M. Ahmadinejad dès le premier tour avait provoqué des heurts entre police et partisans des candidats réformateurs malheureux, Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi, et des semaines de manifestations de masse dénonçant des fraudes

massives.

La contestation avait été sévèrement réprimée et les deux ex-candidats sont en résidence surveillée depuis 2011. Les réformateurs se sont retrouvés isolés et soumis à des pressions sans précédent de la part du régime.

Pour les réformateurs, l’enjeu du scrutin était de mobiliser ceux qui avaient manifesté contre la réélection de M. Ahmadinejad puis juré de ne plus participer à un scrutin qu’ils estimaient joué d’avance. Pour les conservateurs, il s’agissait de montrer que le peuple soutenait le régime face aux « ennemis ».

Mais la majorité des électeurs partageait la même préoccupation: la crise économique provoquée par les sanctions internationales et qui se traduit par une hausse du chômage, une inflation supérieure à 30% et une dépréciation du rial de près de 70%.

Ces sanctions ont été imposées pour contraindre l’Iran, accusé malgré ses démentis de vouloir se doter de l’arme atomique, de cesser ses activités sensibles.

Selon la Constitution, le président est le deuxième personnage de l’Etat. Mais il devra composer les autres franges du pouvoir tenues par les conservateurs, comme le Parlement et l’autorité judiciaire tenus par les frères Ali et Sadegh Larijani.

Israël, l’autre ennemi juré de l’Iran, et les Etats-Unis ont d’ailleurs souligné que l’élection n’apporterait pas de changement dans la politique iranienne.

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