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Halle, ville morte après l’assaut contre une synagogue

Le Vif

Des rues désertes, des transports en commun suspendus, une population sous le choc : la ville de Halle, dans l’est de l’Allemagne, se trouve en état de siège après une tentative d’assaut mercredi contre une synagogue qui a fait au moins deux morts et deux blessés graves le jour de Yom Kippour.

Aux abords de la synagogue et du restaurant de kébabs visés par l’attaque, la population est encore sonnée.

La ville est manifestement passée tout près d’un carnage: entre 70 à 80 fidèles de confession juive se trouvaient dans l’édifice religieux pour célébrer Yom Kippour lors de l’assaut.

Halle, ville morte après l'assaut contre une synagogue
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– Casque en acier –

« Nous avons vu à travers la caméra de notre synagogue qu’un agresseur lourdement armé, avec un casque en acier et un fusil, a tenté de pousser nos portes », a témoigné le président de la petite communauté juive de Halle, Max Privorotzki, dans le quotidien Stuttgarter Zeitung.

Le responsable, à la tête de cette communauté orthodoxe de 555 membres, célébrait la fête la plus importante du calendrier juif quand les tireurs, au moins deux personnes selon des images vidéo amateur de la scène qui circulent sur internet, ont tenté sans succès de pénétrer dans la synagogue du quartier Paulus.

Le parquet anti-terroriste allemand saisi de l’enquête sur la fusillade

Le parquet anti-terroriste allemand a été saisi de l’enquête sur la fusillade survenue contre une synagogue à Halle, qui a fait deux morts mercredi. Un suspect a été arrêté en lien avec les faits. Les autorités décrivent cependant toujours cet événement comme un « Amoklauf » (un acte de violence commis avec frénésie), et non comme un acte terroriste. D’après les déclarations du parquet fédéral à l’agence de presse Evangelischer Pressedienst, il existe suffisamment d’éléments pour évoquer un potentiel acte d’extrême-droite.

La décision a été prise en raison de l' »intérêt particulier de l’affaire », explique le parquet de Karlsruhe.

La police a déclaré sur Twitter que d’autres assaillants sont peut-être toujours en fuite. Plusieurs personnes se sont en effet échappées du lieu de la fusillade dans une ou plusieurs voitures.

Plus tôt dans la journée, un porte-parole du ministre de l’Intérieur Horst Seehofer avait fait savoir que les circonstances des faits n’étaient pas encore clairement déterminées.

Selon un porte-parole du parquet fédéral, il existe suffisamment d’éléments pour évoquer un potentiel acte d’extrême-droite. Il se réfère notamment aux circonstances des faits.

« Nous avons barricadé les portes de l’intérieur et attendu la police », a poursuivi M. Privorotzki.

« En attendant, nous continuons à célébrer notre office religieux » dans le bâtiment à l’architecture mauresque, qui accueille de nombreux Juifs originaires de l’ex-Union soviétique, assure-t-il stoïque.

Décimée par la Shoah, la communauté juive d’Allemagne est en plein essor depuis l’arrivée au début des années 90 de nombreux juifs originaires de l’ex-empire soviétique.

Halle, ville morte après l'assaut contre une synagogue
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Le ou les auteurs ont également tenté de tirer sur la porte du cimetière juif mitoyen.

Un restaurant turc de kébabs, situé à 600 m de la synagogue, a également été pris pour cible. Etait-ce prévu par les tireurs ou se sont-ils retournés contre ce local faute d’avoir pu entrer dans la synagogue?

Un client, Conrad Rössler, interrogé par la chaîne d’information n-tv, se trouvait à l’intérieur de l’établissement de restauration rapide quand un tireur « a jeté une grenade » sur le local.

– Grenade –

« La grenade s’est écrasée sur la porte et a explosé », a ajouté M. Rösler, encore tremblant.

« L’homme a ensuite tiré au moins une fois dans le magasin, l’homme qui était assis derrière moi a dû mourir. Je me suis caché dans les toilettes et j’ai verrouillé la porte », a-t-il raconté.

Halle, ville morte après l'assaut contre une synagogue
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A Halle, à moins de 200 km au sud-ouest de Berlin, la circulation des tramways et des bus a été suspendue, tandis que les écoliers ont été renvoyés chez eux dans la ville voisine de Leipzig.

Dans plusieurs villes du pays, comme Leipzig, Dresde mais aussi Berlin et Francfort, la sécurité a été renforcée aux abords des synagogues et d’autres bâtiments de la communauté juive comme des écoles ou centres culturels.

Des mesures spéciales pour protéger les établissements juifs existent déjà depuis la fin de la Seconde guerre mondiale en Allemagne.

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« Mes pensées et mes prières sont avec vous, mes chers Juifs », a tweeté le président du Conseil central des musulmans d’Allemagne, Aiman Mazyek.

Précédentes attaques contre des lieux de culte et communautaires juifs

Rappel de précédentes attaques meurtrières contre des synagogues et lieux communautaires juifs dans le monde, après l’attaque visant une synagogue et un restaurant turc qui a fait au moins deux morts en Allemagne.

– 2002 –

TUNISIE: le 11 avril, 21 personnes — 14 Allemands, cinq Tunisiens et deux Français — sont tuées dans un attentat-suicide contre la synagogue de la Ghriba, sur l’île de Djerba (sud), le plus ancien lieu de culte juif en Afrique.

L’attentat est revendiqué par Al-Qaïda.

– 2003 –

TURQUIE: le 15 novembre, des véhicules remplis d’explosifs frappent deux synagogues d’Istanbul, Neve Shalom et Beth Israel, faisant 30 morts et plus de 300 blessés. Les attentats sont revendiqués par une cellule turque d’Al-Qaïda.

– 2012 –

FRANCE: le 19 mars, Mohamed Merah, islamiste franco-algérien de 23 ans, tue trois enfants et un enseignant dans un collège juif du sud-ouest.

– 2014 –

ETATS-UNIS: le 13 avril, un suprémaciste blanc connu pour son antisémitisme attaque un centre communautaire et une maison de retraite juifs du Kansas (centre), tuant trois personnes dont aucune n’était juive.

BELGIQUE: le 24 mai, un homme ouvre le feu dans le hall d’entrée du Musée juif de Bruxelles, faisant quatre morts. Le Franco-Algérien Mehdi Nemmouche a été condamné en mars dernier à la prison à perpétuité pour ces assassinats, considérés comme le premier attentat commis en Europe par un combattant revenu de Syrie.

ISRAEL: le 18 novembre, une attaque menée par deux Palestiniens contre une synagogue de Jérusalem-Ouest fait cinq morts. Il s’agit de la première attaque contre un lieu de culte juif à Jérusalem.

– 2015 –

FRANCE: le 9 janvier, quatre juifs sont tués lors d’une prise d’otages dans une épicerie casher par un jihadiste à Paris.

DANEMARK: Le 14 février, un Danois d’origine palestinienne, qui avait prêté allégeance au groupe Etat islamique, ouvre le feu sur un centre culturel de Copenhague où se déroule une conférence sur la liberté d’expression, tuant un cinéaste. Dans la nuit, il abat un fidèle juif de 37 ans qui montait la garde devant la synagogue de Copenhague où était célébrée une bar-mitzvah, avant d’être tué par la police.

– 2018 –

ETATS-UNIS: Le 27 octobre, onze personnes meurent sous les balles d’un antisémite de 46 ans qui sème la terreur dans la synagogue « Tree of Life » de Pittsburgh en plein office du shabbat. Robert Bowers, un camionneur blanc, qui a ainsi perpétré l’attaque la plus sanglante commise contre des juifs aux Etats-Unis, encourt la peine de mort.

– 2019 –

ETATS-UNIS: Le 27 avril, un homme de 19 ans se revendiquant comme antisémite et islamophobe tue une femme et fait trois blessés, dont un rabbin, en attaquant à l’arme automatique une synagogue près de San Diego (sud de la Californie), au dernier jour des festivités de la Pâque juive.

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