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François Hollande élu président, s’adresse à l’Europe

François Hollande est devenu dimanche le premier président socialiste en France depuis 17 ans lors d’un vote sanction contre le sortant Nicolas Sarkozy, auquel il a immédiatement donné une dimension de réorientation de la politique européenne.

« Les Français en ce 6 mai viennent de choisir le changement en me portant à la présidence de la République », a-t-il lancé devant ses partisans à Tulle (centre de la France), son fief.

Promettant qu’il serait le « président de tous », François Hollande a demandé à être « jugé sur deux engagements majeurs, la justice et la jeunesse ».

François Hollande, 57 ans, a été élu avec 51,67% des suffrages exprimés, contre 48,33% à Nicolas Sarkozy, selon une totalisation des résultats portant sur la France entière, à l’exclusion d’un million de Français de l’étranger, établie par le ministère français de l’Intérieur. L’abstention s’est élevée à 18,97% des inscrits. Les résultats concernant les Français de l’étranger seront communiqués dans la matinée.

A l’unisson de ses partisans, le président élu a voulu, pour son premier discours, s’exprimer avec sobriété, face à la situation de crise économique en France et en Europe. « Nous nous sentons assaillis par ce sentiment de responsabilité et de gravité », a déclaré son directeur de campagne, Pierre Moscovici.

« François Hollande est le nouveau président de la France et doit être respecté »

Nicolas Sarkozy a très rapidement concédé la défaite. « La France a un nouveau président de la République, le peuple français a fait son choix (…) François Hollande est le nouveau président de la France et doit être respecté », a déclaré le chef de l’Etat conservateur. Mais il a immédiatement appelé à la mobilisation pour les élections législatives des 10 et 17 juin.

La France est régie par un système politique présidentiel à forte composante parlementaire, dans lequel le chef de l’Etat doit disposer d’une majorité à l’Assemblée nationale pour pouvoir gouverner. Dans le cas contraire, c’est le Premier ministre qui est le personnage clé de l’exécutif. « Il faut gagner la bataille des législatives. Elle est gagnable. Le score (de dimanche) est honorable. Je ne mènerai pas cette campagne », a ajouté le président sortant.

Nicolas Sarkozy a indiqué qu’il se mettait en retrait de la vie politique, mais laissé planer un doute sur cette prise de distance : sera-t-elle momentanée ou définitive ? Il va « redevenir un Français parmi les Français », a-t-il dit.

Si les responsables socialistes gardaient une certaine retenue, le peuple de gauche était en liesse dans les rues de France, et singulièrement place de la Bastille, à Paris, symbole des conquêtes politiques socialistes, où des dizaines de milliers de personnes étaient présentes.

Elio Di Rupo est le premier à féliciter François Hollande

François Hollande, qui prendra ses fonctions avant le 15 mai, restera cinq ans à la tête d’une des principales puissances mondiales, détentrice de l’arme nucléaire, membre permanent du Conseil de sécurité et moteur de l’Union européenne. Il est le premier président de gauche depuis François Mitterrand (1981-1995).

La victoire du socialiste a suscité une réaction immédiate de plusieurs dirigeants européens, qui ont fait un pas en sa direction. Le premier ministre socialiste belge Elio Di Rupo a été le premier à le féliciter et était présent dès le début de la soirée à Paris, rue de Solférino, au siège du PS.

Mais François Hollande avait été snobé pendant la campagne par les leaders conservateurs européens, en particulier l’Allemande Angela Merkel, qui a soutenu Nicolas Sarkozy et a longtemps rejeté sa demande d’une politique de croissance économique au niveau européen. « La chancelière a appelé François Hollande ce soir et l’a félicité pour sa victoire », a indiqué le porte-parole du gouvernement allemand dans un communiqué. « Nous devons maintenant sceller un pacte de croissance pour plus de compétitivité », a dit le chef de la diplomatie allemande Guido Westerwelle.

« Nous avons clairement un objectif commun : relancer l’économie européenne pour générer une croissance durable », a abondé José Barroso, président de la Commission européenne.

Le chef du gouvernement italien Mario Monti a émis le désir de « collaborer étroitement avec la France, en particulier dans le cadre européen », dans un message de félicitations adressé dimanche soir par téléphone au nouveau président François Hollande. Cette collaboration doit avoir pour « objectif une union toujours plus efficace et orientée vers la croissance », a indiqué M. Monti, selon un communiqué du Palais Chigi, siège de la présidence du Conseil.

Le nouveau chef de l’Etat français s’est exprimé dans le même sens durant la conversation, souhaitant également « une étroite collaboration » entre les deux gouvernements. M. Monti a estimé que les résultats des élections en France et en Grèce « imposent une réflexion sur la politique européenne ».

Il a révélé avoir eu à ce sujet des échanges de vues avec le président du Conseil européen Herman Van Rompuy, la chancelière Angela Merkel et le premier ministre David Cameron, pour évaluer « les perspectives qui s’ouvrent pour la politique européenne ».

Nicolas Sarkozy est le dernier en date des dirigeants européens balayés par la crise économique après ceux de la Grèce, de l’Espagne ou de l’Italie. Dans plusieurs de ces pays, les politiques d’austérité provoquent des manifestations de rejet, comme en témoigne la percée des partis anti-européens aux élections en Grèce, ce même dimanche.

« Je mesure que l’Europe nous regarde »

« Aujourd’hui même, responsable de l’avenir de notre pays, je mesure aussi que l’Europe nous regarde. Au moment où le résultat a été proclamé, je suis sûr que dans bien des pays européens, ça a été un soulagement, un espoir, l’idée qu’enfin l’austérité ne pouvait plus être une fatalité », leur a lancé François Hollande.

Il a indiqué que sa première visite à l’étranger serait réservée à la chancelière allemande Angela Merkel. Son camp a annoncé qu’il s’était entretenu avec elle dès dimanche soir, de même qu’avec d’autres leaders mondiaux, dont le Premier ministre britannique David Cameron, qui l’a félicité au téléphone.

Obama félicite Hollande et l’invite à la Maison Blanche

Barack Obama a félicité François Hollande et l’a invité à une rencontre bilatérale à la Maison Blanche avant les sommets du G8 et de l’Otan prévus dans deux semaines aux Etats-Unis, a annoncé la présidence américaine. « Le président Obama a appelé le président élu français François Hollande pour le féliciter après l’annonce de l’élection française aujourd’hui » dimanche, a précisé le porte-parole de la Maison Blanche, Jay Carney.

De même source, « le président Obama a déclaré avoir l’intention de travailler étroitement avec M. Hollande et son gouvernement sur un ensemble de dossiers difficiles en matière économique et de sécurité ».

En outre, « le président Obama a noté qu’il accueillerait le président élu Hollande à Camp David pour le sommet du G8 et à Chicago pour le sommet de l’Otan ce mois-ci, et a proposé que tous deux se rencontrent auparavant à la Maison Blanche », a révélé M. Carney dans un communiqué.

Lors de cet appel, « le président Obama et le président élu Hollande ont tous les deux rappelé l’alliance importante et durable entre les Américains et les Français », a conclu le porte-parole.

Un retour à l’équilibre budgétaire pour 2017

Arrivé en tête au premier tour le 22 avril (28,6% contre 27,2% au sortant), François Hollande était depuis des mois donné favori du scrutin. « C’est un échec très lourd pour Nicolas Sarkozy face à un candidat sans expérience de gouvernement », a estimé le politologue Stéphane Rozès.

Issu de l’Ecole nationale d’administration (ENA), creuset de l’élite française, François Hollande a été onze ans chef du Parti socialiste, élu plusieurs fois député du département rural de Corrèze (centre) qu’il préside, mais n’a jamais exercé aucune fonction ministérielle.

Après la percée historique de Marine Le Pen, dirigeante de l’extrême droite au premier tour (17,9%), Nicolas Sarkozy, sans réserves de voix, avait radicalisé son discours sur l’immigration et la sécurité pour tenter de récupérer les électeurs du Front national.

La partie ne sera pas simple pour François Hollande, parti en campagne en outsider total il y a un an. Réputé pour son sens de la synthèse et de l’humour mais qualifié de « flou » et de « mou » par ses détracteurs, il n’a émergé qu’après la mise à l’écart de l’ex-patron du FMI Dominique Strauss-Kahn.

Outre sa priorité de renégocier le traité européen, il entend retrouver l’équilibre budgétaire en 2017, taxer les plus riches, lutter contre le chômage en créant des emplois notamment pour les jeunes.

Le Vif.be, avec Belga

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