Arrêté en janvier 2016 à Los Mochis, sur la côte pacifique, dans son fief de Sinaloa. © belgaimage

« El Chapo », un des plus grands barons de la drogue

Le Vif

Il a été le baron de la drogue le plus puissant du monde : condamné mercredi à la perpétuité aux Etats-Unis, Joaquin Guzman, dit « El Chapo », n’est désormais plus que l’ombre de lui-même.

Ses évasions rocambolesques ont alimenté sa légende et lui ont valu une notoriété internationale, jusqu’à son arrestation en 2016 qui a mis fin à des décennies de traque.

« El Chapo » -« Le Courtaud », un surnom dû à sa petite taille, environ 1,60 m-, est l’un de ces trafiquants de drogue partis de rien : né le 4 avril 1957 dans une famille pauvre d’un village montagneux de l’Etat de Sinaloa, dans le nord-ouest du Mexique, il travaille dès l’enfance, vendant oranges, caramels et boissons gazeuses.

Comme il le racontera à Sean Penn au cours d’un entretien en octobre 2015 censé rester secret mais qui contribuera à son arrestation, il se met, adolescent, à cultiver marijuana et pavot, faute d’autres options. « La seule façon d’avoir de l’argent, d’acheter de la nourriture, de survivre, était de faire pousser le pavot à opium, la marijuana, alors à cet âge, j’ai commencé à en cultiver et à en vendre », confiera « El Chapo » à l’acteur américain.

– Un des plus riches du monde –

Il sera ainsi recruté par le chef du cartel de Guadalajara Miguel Angel Felix Gallardo, surnommé « le parrain » des cartels mexicains modernes. Après l’arrestation de ce dernier en 1989, Joaquin Guzman fonde avec trois associés le cartel de Sinaloa, dont il fera en quelques années un empire aux ramifications européennes et asiatiques.

« Je fournis plus d’héroïne, de méthamphétamine, de cocaïne et de marijuana que n’importe qui dans le monde. J’ai des flottes de sous-marins, d’avions, de camions et de bateaux », se vantait-il dans l’interview accordée à Sean Penn, parue dans le magazine Rolling Stone.

La fortune amassée par le cartel lui vaudra de figurer un temps sur la liste du magazine Forbes des hommes les plus riches du monde, avant d’en sortir en 2013 en raison des dépenses nécessaires à sa protection.

« Le procès est injuste, on dira toujours du mal (de lui), mais il a toujours aidé (les gens) ici à Culiacan », témoigne Milagro Quiroz, une maîtresse d’école maternelle de 32 ans. Des propos qui illustrent son image de bienfaiteur ancrée dans l’inconscient collectif de l’Etat de Sinaloa.

S’il alimentait une légende de « Robin des Bois » aidant les pauvres et ridiculisant les puissants, « El Chapo » a aussi mené une lutte ultra-violente contre ses rivaux, une guerre entre cartels qui fait aujourd’hui encore rage au Mexique.

– Ingénieuses évasions –

Une fusillade en 1993 à l’aéroport de Guadalajara a notamment coûté la vie au cardinal Juan Jesus Posadas Ocampo, que des tueurs avaient confondu avec Joaquin Guzman.

Un mois après, le chef de cartel est arrêté au Guatemala. Détenu dans une prison de haute sécurité mexicaine, il soudoie ses gardes et s’échappe en 2001, caché dans un bac à linge sale.

Les policiers mexicains mettront treize ans à le rattraper, en février 2014, dans la station balnéaire de Mazatlan, où il se cachait avec sa femme Emma Coronel, une reine de beauté de 32 ans sa cadette, et leurs jumelles, nées aux Etats-Unis.

En juillet 2015, rebelote : « El Chapo » s’évade par un tunnel d’un kilomètre et demi débouchant sous la douche de sa cellule et équipé de rails, illustrant l’ingéniosité de ses hommes et infligeant un sérieux camouflet aux autorités mexicaines.

Cette nouvelle cavale sera brève : il est en effet arrêté en janvier 2016 à Los Mochis, sur la côte pacifique, dans son fief de Sinaloa.

C’est en interceptant des messages adressés à l’actrice américano-mexicaine Kate del Castillo que les autorités l’auraient retrouvé. Cette femme, qui incarnait une cheffe de cartel dans la série « La Reine du sud », accompagnait Sean Penn pour l’interview de 2015.

Avant d’épouser Emma Coronel, Joaquin Guzman s’était déjà marié au moins deux fois. Outre ses jumelles, il a au moins deux fils que les autorités américaines ont accusés de jouer un rôle « important » dans son cartel. Un autre, Edgar, a été abattu en 2008.

Expulsé du Mexique le 19 janvier 2017, Joaquin Guzman a été condamné mercredi par un juge de New York à la prison à vie.

La chute est rude pour cet homme de 62 ans qui dirigea 25 ans durant l’un des cartels les plus puissants de la planète, ancien héros de la culture narco et des « narcocorridos », ces ballades mexicaines avec guitares et trompettes qui racontent la vie des chefs de cartels.

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