© Reuters

Egypte: l’Europe, impuissante, en réunion de crise

Le Vif

Les ministres des Affaires étrangères européens se réunissent ce mercredi pour décider d’une position commune sur la crise égyptienne. Misant sur une improbable médiation, ils ne prendront aucune sanction.

Marquer le coup sans compromettre l’avenir: les ministres des Affaires étrangères des pays de l’Union européenne vont chercher mercredi, lors d’une réunion extraordinaire à Bruxelles, à envoyer un message ferme mais aussi constructif aux acteurs de la crise égyptienne.

L’Egypte est le seul sujet au menu de cette réunion, prévue de 13h00 à 16h00, qui a été organisée à la hâte en pleine trêve estivale pour réagir aux violences ayant fait plusieurs centaines de morts depuis une semaine.

Les ministres se prononceront sur « une série d’options » que leur présentera la chef de la diplomatie de l’UE, Catherine Ashton, très active sur le dossier égyptien depuis la destitution du président Mohamed Morsi le 3 juillet. Ils devraient ainsi débattre de l’opportunité de stopper ou suspendre une partie de l’aide financière que verse l’UE, ou de remettre en cause des accords dans le domaine de la défense et de la sécurité.

Mais il semble exclu que la réunion débouche sur l’annonce de sanctions, comme l’UE en impose à l’Iran ou à la Corée du Nord, selon des sources diplomatiques. « A ce stade, nous n’avons pas discuté de sanctions », a indiqué Bernardino Leon, le représentant spécial de l’UE pour le sud de la Méditerranée, à l’issue d’une réunion préparatoire lundi. Certaines capitales souhaitent que l’UE signifie sa désapprobation de la répression en conditionnant le déboursement d’une partie de son aide au respect du rétablissement progressif de l’Etat de droit. Le chef de la diplomatie néerlandaise, Frans Timmermans, a ainsi préconisé d’appliquer le principe du « plus pour plus » (plus d’aide pour plus de démocratie).

A l’issue de leur réunion, les Européens vont surtout « envoyer un message politique à l’ensemble des parties égyptiennes », selon un diplomate. »Nous devons être constructifs. Nous sommes convaincus qu’une solution politique est toujours possible », a insisté lundi M. Leon, qui a effectué de nombreuses visites au Caire ces dernières semaines. Pour William Hague, le ministre britannique, « notre influence est peut-être limitée » mais « nous devons faire de notre mieux pour promouvoir les institutions démocratiques et le dialogue politique et garder foi dans la majorité des Égyptiens qui veulent simplement un pays stable et en paix ».

L’Europe face à l’influence de l’Arabie saoudite

Les Européens cherchent ainsi à conserver un rôle de médiation entre l’armée et les Frères musulmans, salué notamment par des ONG comme International Crisis Group, en dépit d’un contexte rendu plus délicat par les critiques croissantes au Caire contre les Occidentaux et la presse étrangère. Mais leur influence, comme celle des Américains, est de plus en plus contestée par les pays fortunés de la région, en particulier l’Arabie Saoudite, qui soutient sans faille le nouveau pouvoir. Son chef de la diplomatie, le prince Saoud al-Fayçal, a d’ailleurs prévenu que « la nation arabe et islamique, avec les ressources dont elle dispose, n’hésitera pas à apporter son aide à l’Egypte » si les Occidentaux réduisaient leur soutien.

L’UE est traditionnellement l’un des principaux pourvoyeurs d’aide et le premier partenaire commercial de l’Egypte. En novembre 2012, elle a annoncé un vaste programme d’assistance de cinq milliards d’euros pour la période 2012-2014, destiné essentiellement à améliorer la vie quotidienne des Egyptiens. Plusieurs projets sont cependant gelés en raison de l’absence de progrès dans la démocratisation, selon une source européenne.

Sur le plan militaire, l’influence européenne est bien moindre, avec une aide annuelle de 140 millions d’euros, bien inférieure à celle des Etats-Unis. Quelques pays, comme l’Allemagne, ont décidé de geler leurs exportations d’armes. La ministre italienne des Affaires étrangères, Emma Bonino, a indiqué qu’elle proposerait mercredi que cette décision soit généralisée au niveau européen. « L’Italie a suspendu les fournitures d’armes depuis juin, bien avant le coup d’Etat. Nous nous battrons pour que les pays de l’UE adoptent la même mesure », a-t-elle déclaré au quotidien La Stampa.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire