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Course contre la montre pour déséchouer le paquebot Concordia

Ingénieurs, techniciens, ouvriers, plongeurs: ils sont venus du monde entier pour relever un des plus grands défis de l’histoire maritime, débarrasser l’île du Giglio (Toscane) de l’épave du Costa Concordia, qui y a fait naufrage le 13 janvier dernier.

D’immenses grues dominent la carcasse du paquebot de croisière qui git sur le flanc, à 50 m du rivage, depuis l’accident qui a fait 32 morts. Non loin de là, une foreuse géante tente de percer le sol rocheux pour y planter des piliers sur lesquels arrimer le navire.

« C’est la première fois qu’un bateau de croisière sera déséchoué et enlevé en un seul morceau. C’est une difficulté extrême, un véritable défi au niveau de l’ingénierie », explique à l’AFP Sergio Girotto, un ingénieur de Micoperi.

Cette firme italienne et le spécialiste américain Titan Salvage ont remporté en mai dernier l’appel d’offres pour remettre à flots puis remorquer le Concordia, haut comme un immeuble de 11 étages, long de près de 300 mètres, et pesant 114.500 tonnes.

« Dans un certain sens, c’est le plus gros renflouage de navire jamais effectué », relève le Sud-Africain Nick Sloane, chef de l’opération pour Titan, pour qui c’est aussi « un véritable casse-tête mais un casse-tête basé sur les informations recueillies par nos équipes d’ingénieurs ». Le coût du projet a été évalué à 400 millions d’euros.

L’un des principaux risques est que le paquebot qui est resté posé sur des récifs plats, ne glisse vers les hauts fonds quand il aura été redressé.

Le consortium Micoperi/Titan a donc entrepris de « planter » 26 piliers au fond de la mer pour y arrimer le navire et soutenir des plateformes sous-marines dont certaines aussi grandes qu’un terrain de football sur lesquelles reposera le paquebot, une fois redressé grâce aux grues.

« Pour le moment, l’arrivée de l’hiver est notre plus grand défi. Si nous réussissons à faire les 26 trous sans trop souffrir des conditions climatiques difficiles durant l’hiver, alors ce sera un gros plus pour l’ensemble du projet », estime Nick Sloane.

En raison du sol granitique, les opérations ont déjà pris six mois de retard par rapport au calendrier initial et la phase de forage devrait se terminer « en juin au plus tôt », selon le spécialiste.

Les équipes ont fêté un premier succès cette semaine en perçant le premier des fameux 26 trous. « Il n’y a jamais rien eu de tel, c’est à la fois un renflouage, à la fois une opération offshore », explique Franco Porcellacchia, vice-président de Carnival, la maison-mère de Costa, la compagnie propriétaire du navire.

Ouvriers, ingénieurs et plongeurs qui ont fait faire des t-shirts avec le slogan « amour et détermination », se relaient jusqu’à tard. Comme ces 66 plongeurs qui ont déposé cette semaine quelque 17.000 tonnes de sacs de ciment pour combler les trous entre les récifs et former une surface complètement plate sous le navire.

Une fois les préparatifs terminés, des réserves de flottaison remplies d’eau dans un premier temps puis remplies d’air dans un second, seront fixées sur les flancs du bateau pour lui permettre de flotter.

« Nous nous efforçons de terminer les travaux avant le début de la saison estivale, qui est la plus importante pour le tourisme sur l’île et tout cela dans le respect total de l’environnement », assure M. Porcellacchia.

La crainte est que le navire ne se brise en deux avant son renflouage: si le carburant a été pompé, il reste encore à l’intérieur des milliers de litres de produits d’hygiène, de cuisine, sans parler des meubles et des effets personnels des passagers.

« Le navire est posé sur des rochers donc plus on lui apporte un soutien, plus il a de chances de survivre à l’hiver et au mauvais temps », souligne M. Sloane.

Le retard pris par les opérations inquiète certains résidents mais réjouit les bars et restaurants du port qui bénéficient de la présence des sauveteurs et des touristes d’un jour.

« Le navire nous fait travailler, cela stimule l’économie locale alors que cet été il y a eu une chute du tourisme à cause de la crise économique », estime Giacomo, 38 ans, épicier au Giglio, réserve naturelle réputée pour ses eaux cristallines.

Pour Luca, un constructeur local, « mieux vaut que les experts prennent leur temps plutôt que briser le bateau et polluer le rivage ».

Le Vif.be, avec Belga

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