Migrants try to cross the Rio Bravo towards the United States, seen from Piedras Negras, Mexico, February 12, 2019. REUTERS/Alexandre Meneghini - RC14F8AF92C0

Comment se forment les caravanes de migrants vers les Etats-Unis?

Le Vif

Un message sur les réseaux sociaux, relayé par les médias locaux et voilà 2.000 personnes rassemblées à la gare routière de San Pedro Sula, au nord du Honduras, qui prennent la direction des Etats-Unis.

C’était le 13 octobre, lorsque la première caravane de Centreaméricains s’est formée et élancée. Il s’agissait alors d’une méthode inédite pour émigrer en masse vers le grand voisin du nord, à la recherche d’un travail ou pour fuir la terreur que sème les narco-trafiquants et les « maras », ces redoutables gangs de la région.

Depuis, plusieurs autres convois de ce type ont suivi, provoquant la colère de Donald Trump, qui a envoyé l’armée à la frontière mexicaine pour tenter d’endiguer le flot de migrants, sans compter les tensions diplomatiques entre les Etats-Unis, le Mexique et les pays d’Amérique centrale.

A chaque fois, un message initial sur WhatsApp ou Facebook qui se répand comme une trainée de poudre parmi des habitants cherchant à préserver leurs enfants d’un recrutement forcé par les gangs dans ce pays qui affiche un des plus forts taux d’homicide au monde.

« C’est le pouvoir des réseaux sociaux », résume à l’AFP Sally Valladares, spécialiste de ce phénomène migratoire et de la façon dont les caravanes deviennent virales.

« A cause du chômage et de la violence, les gens (au Honduras) sont vraiment désespérés. Ils voient dans ces caravanes une opportunité d’émigrer en masse et estiment qu’ils n’y parviendront pas si ce n’est pas de cette façon », ajoute-t-elle.

Dans cette première caravane, qui a quitté le Honduras le 13 octobre, se trouvait Ruth Elizabeth Gomez, 25 ans. C’est à la télévision locale qu’elle a entendu parler de l’appel à se rassembler à San Pedro Sula qui circulait de téléphone portable en téléphone portable.

Accompagnée de son frère âgé de 30 ans, cette jeune femme originaire de la ville de Siguatepeque, à 90 km au nord de la capitale, Tegucigalpa, a rejoint la caravane et atteint la frontière américaine après de longues journées de marche, la faim au ventre. A peine passée de l’autre côté, elle a été arrêtée et renvoyée au Honduras, raconte Ruth à l’AFP.

« On était désespérés, aucun des deux n’avait de travail, on a tous les deux des enfants et la situation du pays ne nous offre pas beaucoup de perspective » professionnelle, explique la jeune femme.

– Un flot ininterrompu –

Au Honduras, le gouvernement accuse des trafiquants de personnes et l’opposition d’organiser cette forme de migration collective.

Les Honduriens de l’extérieur sont une composante essentielle de ce petit pays d’Amérique centrale parmi les plus pauvres de la région: plus d’un million d’entre eux vivent aux Etats-Unis d’où ils envoient au total plus de 4 milliards de dollars par an à leurs proches restés à la maison, soit près de 20% du PIB, selon les économistes.

Enquêter sur la manière dont se forment les caravanes, « c’est comme chercher à savoir par où est entrée l’eau dans la noix de coco », estime l’ex-député de l’opposition, Bartolo Fuentes. Ce journaliste de profession est un de ceux accusés par le gouvernement d’avoir encouragé la première caravane.

« L’eau n’entre pas dans la noix de coco, celle-ci se forme toute seule. Il en va de même pour les caravanes: certains ont un peu plus d’argent et prennent le bus, d’autres doivent marcher, chacun fait comme il peut. (La caravane) est composée de personnes qui ont peu de moyens et qui ont décidé d’émigrer », déclare M. Fuentes à l’AFP.

Selon lui, les caravanes sont composées de familles allant jusqu’à 12 membres qui proviennent de différentes régions du pays.

« Peu importe d’où vient l’appel à se rassembler, ensuite il n’y a plus de retour en arrière pour les caravanes car elles se forment à cause du chômage, de la violence et du regroupement familial », en référence à ceux qui cherchent à retrouver leurs proches aux Etats-Unis, abonde Ricardo Puerta, un expert en questions migratoires cubain d’origine, naturalisé américain et hondurien.

Selon lui, Donald Trump est celui qui aura le plus exploité ces vagues de migration: il en a fait un argument de campagne des élections de mi-mandat en novembre et elle sont omniprésentes à chaque fois qu’il veut défendre sont projet de mur à la frontière.

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