Pierre Nkurunziza, président burundais © REUTERS/Goran Tomasevic

Burundi: le président Nkurunziza apparaît pour la première fois depuis la tentative de coup

Le président burundais Pierre Nkurunziza est apparu dimanche à son palais de Bujumbura, pour la première fois depuis la tentative de coup d’Etat manqué l’ayant visé mercredi, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Vêtu d’un costume bleu, l’air détendu et souriant, Pierre Nkurunziza s’est exprimé très brièvement devant les journalistes de la presse nationale et internationale, sans évoquer les derniers évènements politiques dans son pays.

Après un coup d’Etat manqué, Bujumbura connaissait dimanche une journée de trêve, toujours dans la crainte des représailles du pouvoir burundais, et dans l’expectative sur une possible reprise des manifestations contre le président Pierre Nkurunziza.

Dans le centre-ville de la capitale burundaise, quelques échoppes et magasins ouvraient leurs portes en milieu de matinée après une nuit sans incident, alors que des fidèles endimanchés se rendaient dans les églises et les temples où résonnaient des chants religieux.

« Trêve d’une journée ce dimanche » dans les manifestations, afin de permettre « l’enterrement des nôtres tués au cours de la semaine », a annoncé sur son compte Twitter Pacifique Nininahazwe, une figure de la contestation contre un troisième mandat du président Nkurunziza, qui a fait une vingtaine de morts depuis le 26 avril. « Les manifestations reprendront lundi matin », a-t-il promis, demandant « aux manifestants de rester vigilants quant à leur sécurité dans les différents quartiers ».

On est sans nouvelles du chef des putschistes, le général Niyombare, en fuite selon les autorités, et d’autres officiers pourraient être impliqués.

La présidence n’exclut pas un léger report des élections, condamne les attaques des radios

La présidence burundaise s’est dit prête dimanche à envisager un léger report des élections législatives et présidentielle prévues à partir de fin mai, comme le réclame la communauté internationale en raison de la crise politique qui secoue le pays.

Interrogé par quelques médias sur ce possible report, le conseiller en communication de la présidence Willy Nyamitwe a répondu: « Ca s’est passé en 2005, ça s’est passé en 2010, pourquoi ça ne se passerait pas en 2015 si la Commission (électorale) trouve qu’on peut faire un glissement de deux au trois jours, d’une semaine… ».

Par ailleurs, la présidence a « condamné » les récentes attaques contre des radios privées du pays, lors de la tentative manquée de coup d’Etat cette semaine. « Qu’on brûle des médias, au niveau de la présidence, on condamne avec la dernière énergie », a encore affirmé Willy Nyamitwe.

Les directeurs des principales radios et télévisions indépendantes visées par ces attaques ont accusé les forces pro-Nkurunziza d’en être responsables.

Il ne reste quasiment plus aujourd’hui de médias privés indépendants au Burundi, alors que la radio-télévision (RTNB) continue elle de relayer les messages présidentiels.

Après avoir été violemment attaquées et vu leur matériel endommagé ou détruit, la RPA (radio la plus écoutée du pays), la Radio-Télé Renaissance et les deux autres principales radios privées, Bonesha et Isangarino, qui avaient diffusé les messages des putschistes, ne peuvent plus émettre aujourd’hui. Le patron de la RPA Bob Rugurika a fui à l’étranger et plusieurs journalistes de médias privés se cachent.

Des pro-Nkurunziza ont traqué des putschistes dans un hôpital, des tirs ont été échangés

Des forces loyales au président burundais Pierre Nkurunziza ont traqué des putschistes blessés dans un hôpital de Bujumbura cette semaine, dans une opération qui a dégénéré dans des échanges de tirs et s’est terminée par le saccage des urgences, selon des témoins et sources sécuritaires.

Selon des responsables des forces de sécurité s’exprimant sous couvert d’anonymat, l’opération avait été montée jeudi par les forces fidèles au président Nkurunziza, visé depuis la veille par une tentative de coup d’Etat, sur la base d’informations faisant état de la présence, dans l’établissement, du numéro deux des putschistes, le général Cyrille Ndayirukiye.

Un groupe de policiers et de soldats loyalistes sont arrivés en milieu d’après-midi, vers 15h30 (13h30 GMT), à l’hôpital Bumerec du quartier de Kinindo, dans l’ouest de Bujumbura, a raconté un témoin travaillant sur place. « Ils ont demandé s’il y avait des militaires venus se faire soigner », a-t-il dit, ajoutant qu’un policier et deux soldats avaient effectivement été admis.

Selon lui, des policiers ont forcé la porte du service des urgences. « Un des militaires qui étaient soignés a (alors) tiré sur le policier qui était devant les autres et l’a touché à la tête », a-t-il poursuivi. Toujours d’après le témoin, les policiers et soldats restés dehors ont ouvert le feu à l’extérieur de la salle des urgences, avant d’y entrer et de continuer à tirer. Puis ils ont sorti le personnel et les patients et fouillé l’hôpital pendant plusieurs heures, où il ont finalement retrouvé et arrêté le policier et un soldat qui s’était caché. Le deuxième soldat, blessé à la tête, est mort entre-temps sur la table de soins.

Un journaliste de l’AFP a pu constater samedi de nombreux impacts de balles sur la façade de l’hôpital. Des vitres avaient été brisées, le hall d’entrée et le service des urgences étaient tapissés de douilles. Des flaques de sang jonchaient le sol des urgences. Tout le matériel a été cassé et la salle des urgences saccagée.

Les forces pro-Nkurunziza n’ont pas trouvé dans l’hôpital le général Ndayirukiye qui, le soir même, alors qu’il était en compagnie des principaux leaders de la tentative de coup d’Etat, dont son chef le général Godefroid Niyombare, a annoncé l’échec du putsch.

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