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Bill Barr, le ministre bouclier de Trump

Le Vif

L’image lisse, plutôt consensuelle, de Bill Barr a volé en éclats depuis sa confirmation comme ministre américain de la Justice, ayant fait de lui la bête noire de l’opposition démocrate.

Chargé dès son arrivée de gérer la clôture de l’explosive enquête russe, ce juriste chevronné de 68 ans est accusé par les démocrates d’avoir endossé le rôle d' »avocat » de Donald Trump.

« Comme d’autres, vous avez sacrifié votre réputation, décente jusqu’ici, pour le menteur et escroc qui occupe la Maison Blanche », lui a lancé la sénatrice Mazie Hirono, en l’appelant à démissionner lors d’une audition à haute tension cette semaine au Congrès.

La prestation de Bill Barr, resté de marbre face à ces attaques, a plu à Donald Trump qui l’a jugée « fantastique ». Pour lui, le ministre est un « vrai gentleman », un homme « solide ».

Ces mots ont une saveur particulière comparés à la « faiblesse » imputée par le président à son ancien ministre de la Justice Jeff Sessions, qui avait eu le tort à ses yeux de se récuser dans le dossier russe, le privant ainsi de sa protection.

Bill Barr s’est, lui, pleinement emparé de cette enquête. « C’est devenu mon bébé », a-t-il déclaré jeudi à deux reprises, en défendant ses prérogatives de ministre de la Justice.

« J’ai conclu »

Cet homme, à la fois affable et inflexible, connaît bien le poste pour l’avoir occupé sous George H.W. Bush de 1991 à 1993. A l’époque, il avait été confirmé avec un fort consensus, puis s’était distingué en soutenant une politique pénale répressive.

Reparti dans le privé, il avait continué à entretenir ses réseaux à Washington, notamment dans les cercles conservateurs et catholiques.

Ce sont eux qui ont soufflé son nom à Donald Trump, qui ne le connaissait pas personnellement, et qui ont permis son retour au gouvernement à la mi-février, alors que le procureur spécial Robert Mueller mettait la touche finale à ses investigations.

Dès le 22 mars, Bill Barr a été l’unique destinataire de son rapport d’enquête.

Deux jours plus tard, il faisait savoir que M. Mueller n’avait pas trouvé de preuves de collusion entre Moscou et Donald Trump lors de la présidentielle de 2016.

Quant aux soupçons d’entrave à la justice, « j’ai conclu que les preuves n’étaient pas suffisantes » pour des poursuites, avait ajouté Bill Barr, faute d’avis tranché du procureur sur ce point.

La publication, le 18 avril, du fameux rapport, a toutefois dressé un tableau plus troublant. Robert Mueller y détaille une dizaine de pressions exercées par M. Trump sur son enquête, à commencer par une tentative de le limoger.

Cela n’empêche pas Donald Trump de se dire « totalement exonéré ». « Pas de collusion, pas d’obstruction », martèle-t-il, fort du soutien de son ministre.

« Mesquin »

L’opposition accuse Bill Barr d’avoir mené une « opération de relations publiques » pour influencer la perception des Américains et d’avoir trop vite refermé la porte à d’éventuelles poursuites.

Même le procureur Mueller lui a reproché dans une lettre la présentation de son travail, vidée selon lui de son « contexte » et de sa « substance » et susceptible de créer de la « confusion » pour le public.

Bill Barr, sur qui les critiques semblent glisser, a balayé un courrier « un peu mesquin », « probablement » écrit par un associé de celui qu’il surnomme « Bob » et présenté comme un « ami » de trente ans.

Pour ses partisans, ce natif de New York, diplômé de la prestigieuse université de Columbia, ne défend pas Donald Trump, mais la fonction présidentielle. Il est connu dans les milieux légaux pour défendre l’idée que la Constitution donne de larges pouvoirs au président sur son exécutif.

Dans un mémo rédigé au printemps dernier, il avait d’ailleurs estimé que le limogeage de l’ancien chef du FBI James Comey par Donald Trump – qui avait nourri les soupçons d’entrave à la justice – rentrait dans son champ de compétences et ne pouvait donc pas être considéré comme une entrave à la justice.

Pour les démocrates, il s’agissait d’une « offre de services », que le président a saisie.

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