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Bezos et Gates, les chercheurs de cobalt

Muriel Lefevre

Kobold Metals, une société américaine spécialisée dans le développement de logiciels, s’est donné comme mission de cartographier les minerais rares qui se cachent dans les entrailles de la Terre grâce à ce qui ressemble à un Google map des sols. Avec l’espoir non dissimulé de trouver du cobalt, qu’on appelle aussi parfois l’or bleu. Et parmi les investisseurs, on retrouve Jeff Bezos et Bill Gates.

Bill Gates s’est, ces derniers temps, plus illustré à travers ses oeuvres caritatives que par ses talents d’entrepreneur. Pourtant, son dernier projet n’a pas grand-chose à voir avec les bonnes causes. Il s’est associé avec Jeff Bezos et Michel Bloomberg pour investir dans Kobold Metals. Le cobalt est un métal blanc argenté à l’état naturel qui est un ingrédient essentiel des batteries des smartphones, mais aussi des voitures électriques. Plus surprenant, Kobold Metals n’est pas à proprement parler une société minière. C’est surtout une société qui développe des logiciels spécialisés dans l’analyse des très nombreuses données géologiques. L’idée est d’obtenir une image détaillée de la composition de la surface de la Terre et du même coup de localiser le cobalt.

60% de la production mondiale de Cobalt vient de la RDC

Pour l’instant, plus la moitié des réserves connues de ce métal rare se trouve dans la République démocratique du Congo, l’un des pays les plus pauvres du monde. On estime qu’en 2021, ce pays devrait même produire les trois quarts de la production mondiale. Sauf que cette production, souvent à proximité ou dans des mines de cuivre, sent le soufre. « Près du quart de la production est extrait artisanalement par des travailleurs dont certains s’insinuent la nuit sur les sites, creusent leur trou et repartent à l’aube pour vendre leur production à des négociants chinois », peut-on lire dans Le Monde. Le secteur emploie aussi beaucoup d’enfants. Selon l’Unicef, près de 40 000 enfants travaillaient en 2014 dans les mines du sud de la RDC. Ce serait aujourd’hui encore beaucoup plus.

Une production qui ne devrait cependant pas faiblir puisque la valeur du cobalt explose de façon exponentielle ces dernières années. Elle a par exemple quadruplé depuis 2016. Si les prix ont quelque peu baissé ces derniers mois, ce ne serait que passager et dû à un léger sursaut dans l’offre et au développement de batteries moins gourmandes en cobalt. Pas de quoi empêcher la demande d’augmenter dans les années qui viennent. Celle-ci devrait même être multipliée par quatre d’ici à 2020 et par 11 en 2025. La Commission européenne prévoit que, suite à l’augmentation de la production de voitures électriques, il y aura une grave pénurie à partir de 2025. Elle a donc encouragé les recherches pour trouver ce métal dans son sol. Une suggestion qui n’est pour l’instant encore peu suivie puisque pour l’instant on ne creuse qu’en Finlande. L’Espagne et la Suède auraient aussi quelques réserves.

Les recherches ne devraient pas se limiter à la terre ferme: les fonds marins pourraient cacher quelques trésors. La zone où une exploitation minière en eau profonde est autorisée s’étend actuellement sur une superficie aussi grande que l’Europe. Une des entreprises leaders du secteur est Deme, une entreprise belge de dragage. Une de ses filiales, la GSR, va même tester, au printemps, des robots marins qui vont racler une partie de l’océan Pacifique à la recherche de tubercules de manganèse, peut-on lire dans De Standaard. De véritables pépites riches en minéraux précieux tels que le nickel, le cuivre et le cobalt.

Et le recyclage ?

10 % de la production annuelle de cobalt finit dans les téléphones portables. En sachant qu’on en vend 1,5 milliard de smartphones par an et que leur durée de vie varie selon les estimations d’un an et demi à deux ans et demi, c’est un gisement incroyable totalement inexploité. On estime qu’en recyclant une batterie lithium-ion sur 10 en circulation, y compris celles des tablettes et téléphones, on pourrait récupérer jusqu’à 4000 tonnes de Cobalt dit le Moniteur automobile. Il se trouve que c’est la quantité utilisée par le parc automobile électrique mondial actuel.

Umicore, une entreprise belge, est à la pointe dans ce domaine. L’un des plus grands producteurs de cathodes pour les batteries des véhicules électriques s’est lancé dans le recyclage. Par le principe de fusion, elle récupère les minéraux nécessaires à la création des cathodes LiCoO2. Elle a investi massivement dans deux usines de recyclage de minerais rares issus de déchets électroniques et a des accords avec Tesla et Toyota pour recycler leurs batteries.

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