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Baisse des impôts: Trump proche d’un succès majeur

Le Vif

La grande baisse d’impôts promise par Donald Trump était mardi à quelques heures de son adoption définitive au Congrès, un succès historique pour le président américain, onze mois après sa prise de fonctions.

La Chambre a adopté le texte final en début d’après-midi, et le Sénat doit l’adopter dans la soirée. Des cris de joie ont retenti à l’intérieur de la Maison Blanche à l’annonce du vote de la Chambre.

C’est la première grande réforme du mandat du dirigeant, qui l’a présentée comme un « cadeau de Noël » aux Américains.

La minorité démocrate est unanimement opposée mais la majorité républicaine est finalement rassemblée, après des semaines de marchandages. Le calendrier initial – la fin de l’année – a même été respecté.

« C’est l’exemple parfait d’une promesse faite et d’une promesse tenue », s’est réjoui Paul Ryan, président de la Chambre et porteur de la réforme.

« Nous rendons aux gens de ce pays leur argent, c’est leur argent! » s’est-il écrié.

Au Sénat, malgré l’absence de John McCain, soigné pour son cancer du cerveau, la majorité sénatoriale devrait rester soudée et rassembler les 51 voix restantes, sur 100 membres.

Selon un responsable de la Maison Blanche, la voix du vice-président Mike Pence, qui a reporté un voyage au Proche-Orient, ne sera finalement pas nécessaire (il est autorisé à voter pour départager tout vote 50-50).

Donald Trump est ainsi en passe de venger l’échec de l’abrogation de la loi sur l’assurance maladie de Barack Obama, torpillée par des défections au sein de son propre camp en septembre.

La réforme réduira dès 2018 les impôts fédéraux sur les sociétés et sur le revenu, à un coût de 1.500 milliards de dollars pour les finances publiques sur la prochaine décennie. Mais le locataire de la Maison Blanche espère qu’elle installera durablement la croissance économique américaine au-delà des 3% actuels, ce qui génèrerait en retour de nouvelles rentrées fiscales.

La Banque centrale américaine a déjà relevé, la semaine dernière, ses prévisions de croissance de 2,1% à 2,5% pour 2018.

« La Bourse et l’économie vont continuer à monter une fois que la loi de baisse d’impôts sera complètement comprise dans son ampleur et sa taille », a tweeté le milliardaire. « Profitez-en et créez plein de beaux emplois ! »

« La réforme fiscale nous amènera à 3% », a abondé Paul Ryan.

– L’année n’est pas finie –

La réforme était également censée simplifier le code des impôts afin que les Américains puissent remplir leurs déclarations de revenus sur une « carte postale ». Mais la promesse a fait long feu, les lobbies ayant réussi à sauver tel abattement ou telle niche fiscale, par exemple sur la déduction des intérêts d’emprunts immobiliers.

Et si la baisse d’impôts est permanente pour les sociétés, elle ne durera que jusqu’en 2025 pour les ménages, faute d’accord à plus long terme. Le gain de pouvoir d’achat pour les familles s’érodera ainsi progressivement sur la prochaine décennie, jusqu’à s’annuler pour la moitié d’entre eux en 2027, selon le Tax Policy Center.

L’adoption serait néanmoins une victoire politique majeure pour le président Trump, qui espère que les Américains s’en souviendront quand ils se rendront aux urnes en novembre 2018, pour les législatives.

Pour l’instant, ils sont sceptiques: 55% s’opposent à la réforme, selon un sondage publié par CNN, et deux tiers jugent qu’elle profitera plus aux riches qu’à la classe moyenne.

Mais « les résultats la rendront populaire », assure Paul Ryan. Dès février, les impôts prélevés à la source baisseront.

Le texte inclut aussi deux de leurs grandes revendications conservatrices: l’annulation de l’amende imposée par « Obamacare » aux personnes qui ne sont pas assurées; et l’ouverture de terres protégées de l’Alaska aux forages pétroliers.

Les démocrates, eux, dépeignent la loi comme un cadeau aux plus riches et aux entreprises.

« Souvenez-vous de ce jour », a lancé Nancy Pelosi, chef des démocrates de la Chambre. La loi est, dit-elle, « un vol pur et simple de la classe moyenne ».

Une fois la réforme fiscale adoptée, les parlementaires auront seulement trois jours pour désamorcer une crise budgétaire, avant vendredi minuit.

Il faudra voter des crédits à l’Etat fédéral, ainsi que de multiples mesures sur la santé, le renseignement, les catastrophes naturelles voire l’immigration. Or l’opposition démocrate retrouvera sa minorité de blocage au Sénat et donc son pouvoir de chantage, contrairement au débat fiscal, qui selon une procédure spéciale ne requérait qu’une majorité simple.

La réforme de la fiscalité américaine en 5 chiffres

Le Congrès américain devrait adopter mardi une grande réforme de la fiscalité, à temps pour tenir la promesse du président Donald Trump d’une grande baisse d’impôts avant Noël, qui s’appliquera dès 2018.

Voici cinq éléments clés pour comprendre la réforme, présentée comme la plus ambitieuse depuis 1986.

– 21 %

L’impôt fédéral sur les sociétés baissera de 35% à 21%. C’est le volet de la réforme sur lequel Donald Trump parie le plus pour doper la croissance américaine, même si en réalité, la plupart des entreprises ne paient pas le taux plein grâce à des déductions fiscales.

– 1.456 milliards

Le coût net de la baisse d’impôts pour les finances publiques sur la période 2018-2027, selon une commission parlementaire. Les déficits fédéraux sont appelés à se creuser, et le regain prévu de croissance ne génèrera pas suffisamment de recettes fiscales pour compenser entièrement ce manque à gagner fiscal, selon plusieurs analyses.

La dette publique fédérale atteindrait entre 95 et 98% du PIB en 2027, selon le Committee for a Responsible Budget, contre 91% si le statu quo était maintenu et 77% aujourd’hui (selon l’un des chiffrages de la dette utilisé aux Etats-Unis, et qui n’est pas directement comparable aux statistiques européennes).

– 37%

Le taux maximal de l’impôt sur le revenu. Le taux le plus bas restera à 10%, tandis que le plus élevé passera de 39,6% à 37%, pour les revenus dépassant 600.000 dollars annuels pour un couple marié. Aux Etats-Unis, les impôts sont retenus à la source pour les salariés, et l’administration a annoncé que la baisse d’impôts serait reflétée sur les salaires dès février prochain.

– 2.059 dollars

Le pouvoir d’achat supplémentaire pour une famille moyenne, selon le président de la Chambre des représentants et porteur de la réforme, Paul Ryan. Des analyses indépendantes estiment que tous les niveaux de revenus verront leurs impôts baisser en 2018, mais que la plupart des ménages verront ces avantages s’éroder sur la prochaine décennie, en raison de l’inflation et de l’expiration de nombreux articles.

– 2026

La baisse d’impôt pour les particuliers prendra fin en 2026, car les élus n’ont pas réussi à trouver une formule permettant de les rendre permanentes. Les réductions ou suppressions d’abattements fiscaux prendront également fin à la même date… à moins que le Congrès ne revote d’ici là.

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