Si le look de la voiture à toute son importance, c'est surtout la dextérité de son pilote qui suscitera l'admiration des fans de drift. © CHLOE SHARROCK

Bagdad drift: des jeunes pilotes passionnés de glisse au coeur de la capitale irakienne (reportage)

Dans la capitale irakienne, de jeunes pilotes se réunissent autour d’une passion commune: faire glisser sur le bitume leur bolide lancé à plein régime. L’occasion de parader mais aussi d’oublier un temps les tensions qui traversent le pays.

Un reportage de Chloe Sharrock.

Au coeur de Bagdad, des centaines de jeunes se retrouvent régulièrement pour participer à des compétitions de drift. Si le sport était encore récemment considéré comme underground, se réduisant à des courses sauvages et informelles dans des parkings abandonnés, la pratique s’officialise depuis peu, avec son inscription au registre des sports reconnus en Irak.

Le Mesopotamia Engines Sport Club a ainsi été créé en 2019 par Farouk Al Rubaye après l’obtention – longuement attendue – d’une accréditation du ministère des Sports et de la Jeunesse. Mais les drifters souhaitent dorénavant donner un élan supplémentaire à leur passion, et visent la reconnaissance officielle de leur club par la Fédération internationale de l’automobile, basée à Paris.

Le car drift consiste à perdre intentionnellement le contrôle de sa voiture en bloquant les quatre roues motrices du véhicule lancé à pleine puissance, afin de déraper avec agilité sur la piste. Les pilotes se réunissent non seulement pour attester de leur talent au volant, mais aussi pour parader avec leurs bolides pimpés, tout en échangeant avec d’autres passionnés. Des Chrysler flamboyantes aux BWM vintage, qu’importe le véhicule pourvu qu’on ait la vitesse.

Mais plus qu’un passe-temps anodin, cet engouement dévoile le visage d’une jeunesse désireuse d’un semblant de normalité, loin des conflits et de l’insécurité meurtrière. Les tensions sectaires qui secouent habituellement leur pays n’ont pas leur place. « Nous voulons aller au-delà de la violence et des divisions auxquelles le pays est généralement associé », déclare Omar, membre de l’équipe de drift d’Al I’adam (« les bourreaux »). « Ici, nous sommes tous des Irakiens. Non, en fait, ici, nous sommes tous des drifters. C’est tout. »

Un jeune Irakien s'octroie une pause lors d'une journée de course au Mesopotamia Engines Sport Club dans le quartier d'al-Amiriyah, en banlieue de Bagdad. Ce jour-là, une centaine de drifters se sont rassemblés, unis par leur passion.
Un jeune Irakien s’octroie une pause lors d’une journée de course au Mesopotamia Engines Sport Club dans le quartier d’al-Amiriyah, en banlieue de Bagdad. Ce jour-là, une centaine de drifters se sont rassemblés, unis par leur passion.© CHLOE SHARROCK
Chaque voiture est customisée afin d'allier maniabilité et style - le pot d'échappement de celle-ci porte l'inscription
Chaque voiture est customisée afin d’allier maniabilité et style – le pot d’échappement de celle-ci porte l’inscription « Mashallah », en arabe. Le drift reste un passe-temps coûteux. Certaines voitures peuvent valoir jusqu’à 35 000 euros. Une fortune pour les Irakiens dont le salaire moyen s’élève à environ 400 euros.© CHLOE SHARROCK
Dans cette atmosphère bon enfant, les spectateurs en viennent presque à oublier que l'Irak reste l'un des pays les plus dangereux du Moyen-Orient.
Dans cette atmosphère bon enfant, les spectateurs en viennent presque à oublier que l’Irak reste l’un des pays les plus dangereux du Moyen-Orient.© CHLOE SHARROCK
Des compétiteurs brandissent joyeusement le drapeau de leur équipe.
Des compétiteurs brandissent joyeusement le drapeau de leur équipe. « Nous voulons aller au-delà de la violence et des divisions auxquelles l’Irak est généralement associé », déclare Omar.© CHLOE SHARROCK
Une voiture s'élance sur la piste avec agilité. C'est notamment grâce aux vidéos YouTube de Keiichi Tsuchiya, célèbre drifteur professionnel japonais, que la plupart des aficionados ont découvert cette pratique, inconnue dans leur pays jusqu'au début des années 2000, et appris à manier leur bolide.
Une voiture s’élance sur la piste avec agilité. C’est notamment grâce aux vidéos YouTube de Keiichi Tsuchiya, célèbre drifteur professionnel japonais, que la plupart des aficionados ont découvert cette pratique, inconnue dans leur pays jusqu’au début des années 2000, et appris à manier leur bolide.© CHLOE SHARROCK
Farouk Al Rubaye, l'un des directeurs et fondateurs du Mesopotamia Engines Sport Club, a beaucoup oeuvré pour la reconnaissance officielle du drift par le ministère des Sports et de la Jeunesse.
Farouk Al Rubaye, l’un des directeurs et fondateurs du Mesopotamia Engines Sport Club, a beaucoup oeuvré pour la reconnaissance officielle du drift par le ministère des Sports et de la Jeunesse. « Nous avons maintenant des adeptes dans tout le pays, et certains viennent de l’autre bout de l’Irak juste pour participer à un événement. »© CHLOE SHARROCK

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