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« Au moins l’argent que les migrants envoient chez eux, ne se retrouve pas dans la poche de dirigeants corrompus »

Annelies Van Erp

Le montant envoyé par les migrants vers leur pays d’origine est trois fois plus élevé que l’aide au développement officielle. Mais ces sommes contribuent-elles au développement ?

En ce 18 décembre, journée internationale des migrants, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), présente dans plus de 100 pays, souligne le lien entre la migration et le développement économique social et culturel. En outre, les migrants ne contribuent pas uniquement aux pays de destination, mais aussi à leurs pays d’origine, notamment par les envois de fonds.

Mauvaises récoltes

En 2014, d’après les estimations de la Banque mondiale, ce montant a atteint les 583 milliards de dollars. Ce chiffre est au moins trois fois plus élevé que l’aide au développement officiel. Cependant, Olivier Ferrari, chargé de migration et de développement à l’OIM se demande dans un texte publié par le forum économique mondial si cet argent contribue par définition au développement du pays.

On ne peut nier l’impact, écrit-il. Pour beaucoup de familles, cet argent supplémentaire qu’on leur envoie est essentiel à leur survie, sert à payer les soins médicaux ou à couvrir les frais d’enseignement d’un membre de la famille. Les envois de fonds peuvent également se révéler très utiles en cas de mauvaise récolte ou de catastrophe naturelle.

Dirigeants corrompus

Contrairement à l’argent consacré au développement, les fonds envoyés vont directement à la population et ne se retrouvent pas dans la poche de dirigeants corrompus ou sur le compte en banque de collaborateurs d’une ONG. Mais ce n’est là qu’une partie de l’explication.

Elaine Zuckerman, directeur de Gender Action, se montre plus critique. « Il n’y a pas d’objectifs de développement liés aux envois de fonds » dit-elle. « Comme l’argent ne va pas directement aux familles, les projets d’intérêt public n’y gagnent pas. Pourtant les projets qui luttent contre le VIH/le sida ou l’égalité des sexes ont également besoin de moyens.

En outre, l’argent n’est pas consacré à l’infrastructure ou aux services publics généraux, ce qui fait que l’économie en profite à peine.

Assurances

Les envois de fonds peuvent se révéler préjudiciables, par exemple quand un individu se retrouve totalement dépendant de cet argent et ne dispose pas d’autres sources de revenus. Ainsi, cet argent crée une inégalité entre ceux qui ont des membres de la famille à l’étranger (qui leur donnent de l’argent) et ceux qui ne peuvent compter sur cette aide. En outre, le migrant subit une forte pression pour envoyer de l’argent.

« Ces envois sont une assurance » estime l’économiste Dilip Ratha. Grand partisan de l’envoi de fonds, il en fustige le coût élevé. « Les états doivent reconnaître que l’envoi de petites quantités de fonds ne revient pas à blanchir l’argent. »

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