Mgr Patrick Chauvet. © AFP

Notre-Dame de Paris: Mgr Chauvet, « boss et pasteur » au chevet de sa cathédrale

Le Vif

Deux mois après avoir assisté, sonné, à l’incendie de Notre-Dame de Paris, Mgr Patrick Chauvet, recteur de la cathédrale, multiplie les casquettes: entre consoleur d’âmes, « boss et pasteur » d’une équipe au chômage technique, et… chef de nouveaux chantiers.

« Je suis dans la lignée des prêtres et évêques bâtisseurs », s’amuse-t-il, depuis son bureau situé dans le presbytère où il reçoit l’AFP. L’archiprêtre de 67 ans, raie et mèche de côté, remonte ses lunettes écaille, jette un oeil sur le pignon et la façade sud de l’édifice, désormais orphelin de sa flèche. Au poste de recteur de Notre-Dame depuis septembre 2016, Mgr Chauvet partage son quotidien entre offices, grandes célébrations, direction d’une équipe de salariés et bénévoles, accueil d’hôtes de marque en visite à Paris, conférences, moments « privilégiés » avec la Maîtrise (les choeurs), missions de mécénat…

Une fois passés le « choc » et « l’épreuve » des premiers jours qui ont suivi l’embrasement de sa cathédrale – une « dépossession difficile » confie-t-il -, l’ancien recteur de la basilique du Sacré-Coeur s’est vu chargé de nouvelles missions. Chaque matin désormais, après avoir chanté les laudes rue Chanoinesse (petite rue proche du monument), ce lève-tôt traverse le parvis, toujours fermé au public. Vient saluer les « compagnons du chantier » qui trient pierres et gravats, consolident et protègent, louant ceux qui « se donnent totalement pour soigner la cathédrale ». Et a dorénavant à portée de main un casque de chantier, blanc, sur lequel on peut lire son nom en toutes lettres. « Le Seigneur nous fait parfois passer par des chemins inattendus », ironise-t-il dans son livre « Notre-Dame d’espérance » bouclé juste après l’incendie.

Le voilà également dans l’accompagnement de sa soixantaine de salariés, tous à temps partiel, pour lesquels il faut trouver des reclassements. « Je suis à la fois le boss et le pasteur. Parfois les membres de mon équipe s’adressent plus au père qu’au boss. Ils attendent une parole réconfortante ». Le prêtre a aussi un petit mot apaisant pour les commerçants jouxtant la bâtisse, et s’émeut de rencontrer quelques fidèles « assis au bistrot, contemplant le monument. »

Retour des apôtres

Parmi ses nouveaux chantiers, l’un lui tient particulièrement à coeur: celui de mettre en place, dès que le nettoyage sera terminé sur le parvis, un petit sanctuaire dédié à Marie. Il devrait être abrité d’une tente transparente, flanqué des deux côtés d’autres tentes pour l’accueil des pèlerins, des prêtres, des touristes. Feuilletant les plans, il s’enthousiasme: « la Vierge du Pilier (une reproduction du symbole de la cathédrale, NDLR) sera là, les pèlerins pourront entrer par là. Ici on mettra un confessionnal pour les prêtres, là on laissera de la place pour les fleurs, là il y aura la boutique de chapelets et médailles! » Samedi, il sera au côté de l’archevêque de Paris Michel Aupetit, pour la première messe célébrée depuis l’incendie. Un moment qu’il attend, « hautement significatif », qui permettra de montrer que Notre-Dame, « lieu de la louange », est « bien vivante ».

En septembre, tout en restant recteur de la cathédrale, Mgr Chauvet deviendra « administrateur » de la paroisse, proche, de Saint-Germain-l’Auxerrois, où les activités liturgiques ordinaires de la cathédrale sont déplacées, « en particulier la Maîtrise de Notre-Dame, qui doit absolument conserver sa technique », explique cet ancien des Petits chanteurs de Sainte-Croix de Neuilly. De cet établissement il a été tour à tour élève, aumônier, professeur de latin et de grec, en parallèle à des études de lettres classiques à l’université de Nanterre.

Faut-il reconstruire à l’identique, ou pas, la flèche de l’architecte Viollet-le-Duc ? « Je n’ai personnellement pas d’attachement affectif à la flèche, mais je demande qu’il y ait quand même une harmonie dans l’édifice. On ne peut pas faire quelque chose de totalement du XXIe siècle, sur un édifice du XIIIe », affirme celui qui y a suivi le séminaire des Carmes à Paris et a été ordonné prêtre en 1980. Ce qui lui importe davantage : trouver une place pour les statues des douze apôtres et des quatre évangélistes monumentaux, prélevées, par chance, quelques jours avant l’incendie, pour être restaurées en Dordogne. « Quand ils reviendront, il faudra bien les mettre quelque part, mes apôtres ! »

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