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Les seniors allemands, rempart contre l’extrême droite

Le Vif

Le score spectaculaire de l’extrême droite aux élections en ex-RDA accentue l’érosion des partis traditionnels allemands, sortis victorieux de justesse et essentiellement grâce à leurs fidèles électeurs âgés.

« Les seniors sauvent les partis établis », pointe lundi le Spiegel dans son édition online, notant le large plébiscite des plus de 60 ans pour les conservateurs d’Angela Merkel en Saxe et pour son allié au gouvernement -le parti social démocrate (SPD)- en Brandebourg, la région qui entoure Berlin.

Dans ces deux Länder, les résultats des deux scrutins de dimanche montrent en revanche que le plus gros du contingent d’électeurs entre 30 et 59 ans a voté en faveur du parti anti-migrants Alternative pour l’Allemagne (AfD).

La jeune formation, née en 2013, a touché un nerf sensible avec sa campagne « Terminons la réunification! » dans des régions économiquement toujours à la traîne et où le sentiment d’être des citoyens de second zone est très répandu.

Trente ans après la chute du Mur, il semble aussi qu’une génération qui n’a pas connu le régime communiste de la RDA, ni vécu la douloureuse période de la Réunification et l’effondrement de son industrie, ait néanmoins été séduite par l’AfD, s’étonne le Spiegel.

Car la majorité des moins de 29 ans l’ont choisi en Saxe, alors qu’en Brandebourg, il a été leur deuxième parti favori derrière les Verts, selon les résultats des commissions électorales.

« Ce n’est donc pas le vieil homme blanc qui a aidé le parti (d’extrême droite) à provoquer son tremblement de terre électoral à l’Est. De quoi s’inquiéter pour l’avenir de la démocratie », souligne le journal berlinois Tagesspiegel dans un éditorial.

Un ‘défi énorme’

Comme lors des élections législatives de 2017, quand pour la première fois les plus de 60 ans constituaient le plus important groupe d’électeurs, les scrutins de dimanche « rappellent avec force » que les partis populaires, tels qu’on appelle encore l’Union chrétienne démocrate (CDU) et le SPD, « sont essentiellement devenus des partis de vieux dans une grande partie de l’Allemagne », indique à l’AFP le politologue Michael Bröning de la Fondation Friedrich Ebert.

« Pour les partis politiques qui veulent réfléchir à l’avenir, cela pose un défi énorme », juge-t-il.

La présidente de la CDU Annegret Kramp-Karrenbauer a promis lundi de redoubler d’efforts pour offrir à son parti un profil plus moderne. « Ce qui s’est passé hier est un signal pour la CDU de poursuivre notre renouvellement », a-t-elle estimé, évoquant l’accent mis sur la protection du climat et la numérisation.

A l’instar des autres partis établis, elle a exclu de nouveau tout travail commun avec l’AfD. A la question de savoir si elle pouvait ainsi exclure un quart des électeurs, elle a répliqué: « oui, nous pouvons! » dans un entretien à la télévision publique.

Les partis vont devoir probablement former des coalitions gouvernementales à trois, ce qui promet des pourparlers tendus entre formations parfois idéologiquement très éloignées, comme la CDU et les Verts en Saxe.

L’AfD a de son côté multiplié lundi les appels du pied en direction des conservateurs. Face à la presse à Berlin, son coprésident Alexander Gauland s’est ainsi déclaré « très confiant » en la mise en place « à moyen terme d’une majorité bourgeoise et conservatrice », dont il estime que son parti fait désormais partie.

Le parti d’extrême droite a presque triplé son résultat en Saxe, l’a pratiquement doublé en Brandebourg, et s’est établi dans les deux Länder comme deuxième force politique. Un résultat qui selon lui « n’autorise pas à nous laisser durablement d’une façon ou d’une autre en dehors ».

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