Boris Johnson © AFP

Coronavirus, Brexit: Boris Johnson face à une crise de confiance dans son parti

Le Vif

Moins d’un an après son triomphe dans les urnes, le Premier ministre britannique Boris Johnson, critiqué sur sa gestion de la pandémie, s’apprête à affronter une crise de confiance lors du Congrès annuel de son Parti conservateur.

Coronavirus oblige, les discours enflammés dans d’immenses salles et les apartés bien arrosés vont céder la place à des débats et discours en ligne. De quoi potentiellement affaiblir la verve de « BoJo » mais aussi lui épargner de subir frontalement les foudres d’une partie de ses troupes. Car le dirigeant concentre les reproches du public concernant la gestion de l’épidémie qui a déjà fait plus de 42.000 morts au Royaume-Uni – un bilan sans équivalent en Europe – et repart ces dernières semaines.

Selon une enquête réalisée par le site ConservativeHome, les membres du parti soutiennent de moins en moins les mesures de confinement contraint, préférant désormais pour presque la moitié d’entre eux une approche favorisant une distanciation physique volontaire. Paul Goodman, rédacteur en chef de ConservativeHome, a constaté un soutien à la politique sanitaire du Premier ministre « qui s’est nettement dégradé au sein des membres du parti« : « Cette baisse de confiance fait écho à celle observée dans les sondages auprès du grand public et reflète la baisse de popularité du Premier ministre lui-même ».

Boris Johnson a livré son sentiment dans un entretien accordé au Telegraph vendredi: « Je pense que tout le monde en a assez, j’incite tout simplement les gens à être un peu patients. Nous surmonterons cela et nous sauverons de nombreuses vies, et c’est vraiment le mieux que je puisse dire. Je pense qu’il y a un impératif moral à sauver des vies où vous le pouvez ».

L’atmosphère était bien différente l’année dernière lorsque Boris Johnson a été élu à la tête des conservateurs avant de remporter triomphalement en décembre les législatives, sur la promesse de « réaliser le Brexit » après des années de débats sur la sortie de l’Union européenne, votée en 2016. Le bloc européen a désormais lancé une procédure d’infraction contre son ex-membre. Il reproche au gouvernement britannique un projet de loi, approuvé mardi par les députés, qui revient en partie sur l’accord de Brexit conclu il y a un an. Le texte, qui viole du propre aveu de Londres le droit international, a suscité des critiques au sein même des Tories, qui craignent que ce revirement n’entame la crédibilité diplomatique du Royaume-Uni.

« Remplacer » Johnson ?

En temps normal, les conservateurs se délectent de ses attaques contre Bruxelles, où Boris Johnson a lui-même été journaliste. Mais le Brexit est passé et si un accord commercial reste à trouver, les tensions avec Bruxelles sont désormais éclipsées par la pandémie, en pleine résurgence au Royaume-Uni. Certains députés conservateurs ont reproché au Premier ministre de ne pas assez consulter le Parlement concernant les mesures sanitaires, ainsi que son approche restrictive, qualifiée par le député de Philip Davies de « socialiste ».

La presse conservatrice s’est désormais trouvé un nouveau chouchou avec son jeune et télégénique ministre des Finances Rishi Sunak, qu’elle verrait bien en successeur à Downing Street. Dans le Telegraph, M. Johnson a qualifié cette hypothèse de « totalement fausse » avant d’ajouter: « Nous ne faisons qu’un. Je pense que c’est assez juste de dire qu’il y a un esprit d’équipe entre le numéro 10 et le numéro 11 », en référence à sa résidence, le 10 Downing Street, et à celle de son ministre des Finances, au numéro 11 de la même rue.

Ce sera au tour de Rishi Sunak de s’exprimer lundi devant les membres du parti. Pour l’ouverture du congrès samedi, c’est le ministre des Affaires étrangères Dominic Raab qui prendra la parole. Boris Johnson, lui, ne s’exprimera que mardi lors du discours de clôture. « Un seul discours – même provenant d’un gouailleur comme Boris – ne sera jamais suffisant pour renverser la situation, surtout s’il est contredit par les faits », estime le politologue Tim Bale, de la Queen Mary University of London, interrogé par l’AFP. « Le seul avantage pour Boris Johnson, c’est que tenir le congrès en ligne ne donnera pas à ses collègues mécontents l’opportunité de râler et même de se demander – au détour d’un vin blanc trop chaud et d’un triste stand de sandwichs – s’ils ne feraient pas mieux de le remplacer avant qu’il ne soit trop tard« , relève le chercheur.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire