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Le fromage presque aussi mauvais pour la planète que la viande

Muriel Lefevre

Manger beaucoup de viande est mauvais pour l’environnement. Mais il semble que le fromage ne soit pas beaucoup mieux, comme le précise De Morgen. Voici quelques chiffres très déprimants pour les amateurs de fromage.

« Dans un souci d’écologie, nous ne devrions pas seulement consommer moins de viandes, mais aussi moins de fromage », est-il précisé dans le dernier New Scientist qui titre « la vérité sur le fromage, le terrible prix de notre aliment préféré. »

L’article décrit dans le menu à quel point grignoter du fromage est presque aussi nocif que de mâchouiller un morceau de porc. Mais aussi à quel point il est naïf de croire que le fromage est bien meilleur pour l’environnement et le bien-être animal que la viande.

Le fromage presque aussi mauvais pour la planète que la viande
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De Morgen le montre lui aussi en revenant sur quelques chiffres. Les vaches sont les « Hummers » des animaux de la ferme. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture), l’élevage est responsable de 14,5 % des gaz à effet de serre produits par l’homme. Notamment grâce à ses pets et son fumier, ce ruminant produit une grande quantité de méthane, un gaz à effet de serre beaucoup plus puissant que le dioxyde de carbone.

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Or il faut beaucoup de vache pour produire du lait. Une vache produit en moyenne entre 25 à 35 litres de lait par jour et il faut 10 litres de lait pour un pour 1 kilo de fromage. On estime que la production de lait dans le monde est passée de 480 millions de tonnes en 1970 à 800 millions aujourd’hui selon Médiapart . Et selon une étude publiée par l’Université d’Oxford, et basée sur 200.000 personnes, ce serait les végétariens qui sont les plus grands consommateurs de fromage au monde. L’industrie du fromage produit elle 22 millions de tonnes par an, contre 15 millions en 2000. La production connaît donc une hausse sensible et qui va encore prendre de l’ampleur avec l’arrivée de l’Asie et ses 2 milliards d’habitants et où la demande en fromage explose.

De véritables usines à lait, des bagnes pour les vaches

Le cycle de vie d’une vache laitière typique n’a rien de réjouissant. Un an et demi à deux ans après sa naissance, la vache est priée de se reproduire et c’est presque toujours par insémination artificielle. Le fermier sépare la mère et le veau à la naissance. Ce dernier va recevoir du lait maternel pendant quelques jours, mais uniquement parce que ce colostrum est important pour le système immunitaire du veau (qui a donc plus de chance de se transformer en future vache laitière) et surtout parce que son goût et son odeur diffèrent à ce point du lait normal qu’il ne peut tout simplement pas être vendu à la consommation. Une fois le colostrum évacué, on va pomper la vache sans retenue. Après environ trois à cinq mois, la vache est de nouveau mise en gestation. Et ainsi de suite. Ces grossesses à répétition provoquées artificiellement diminuent leur durée de vie des deux tiers.

Si la vache a un problème, on la vend et le plus souvent c’est direction l’abattoir. Les veaux mâles s’y rendront eux directement. Ce qui fait que chaque litre de lait équivaut donc à environ 20 grammes de poids carcasse de viande. Un constat qui devrait faire mal puisque selon une étude publiée par l’Université d’Oxford et basée sut 200.000 personnes, les végétariens sont les plus grands consommateurs de fromage au monde.

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Des vaches qui polluent moins au fromage végétal en passant par celui créé en laboratoires, voici quelques pistes :

L’une des pistes est de rendre les vaches moins polluantes. Certains s’attellent à trouver un régime alimentaire différent pour que les vaches produisent naturellement moins de méthane. D’autres estiment que l’on peut semer de nouveaux types d’herbes dans les herbages pour que ceux-ci retiennent plus de CO2. Pour Vellinga de l’Université de Wageningen interviewé par De Morgen: « il devrait être possible de réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’élevage laitier de 50% d’ici 2050 ». Une belle note d’espoir.

Des fromages végétaux ?

Selon certains experts alimentaires, les émissions de CO2 des noix sont nettement inférieures à celles de la viande, soit entre 1,4 et 3,2 kilos de CO2 pour 1 kilo de noix. Mais là aussi l’alternative n’est pas parfaite puisque certaines cultures de noix sont très gourmandes en eau. Néanmoins avec les arachides, la structure du fromage peut être très bien imitée. Il existe des roqueforts ou des chèvres aux noix de cajou ou encore du fromage aux amandes fumé.

Du fromage créé en laboratoire

Jaap Korteweg, le fondateur de De Vegetarische Slager, rêve lui de devenir un producteur laitier végétalien en reproduisant en machine le processus de transformation de l’herbe en lait. Un projet un peu fou et dont lui-même n’estime qu’à un 1% les chances de succès.

Une autre piste est de reproduire la caséine en laboratoire. Cette protéine n’existe nulle part ailleurs dans la nature que dans le lait. C’est elle qui forme des boules dans le lait, avec du calcium dedans. Lors de la fabrication du fromage, on enlève la couche externe des boules qui se traduit par une sorte de gel dans lequel les boules de graisse sont piégées et qui est la base du fromage.

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Kasper Hettinga, professeur spécialisé dans l’alimentation de l’Université de Wageningen précise dans De Morgen qu’il y parvient de façon plus ou moins concluante dans son laboratoire.  » On parvient à donner aux caséines la structure sphérique qui est importante pour obtenir la texture typique du fromage. On parvient même à obtenir un mélange laiteux dans nos éprouvettes ». Il espère même parvenir à recréer la caséine sans l’intervention des animaux.

Une chose à laquelle la firme américaine Perfect Day se serait déjà attelée et qui promet de sortir d’ici un à deux ans des yaourts. Sauf que comme le précise Hettinga, toujours dans De Morgen, faire du fromage ça risque d’être beaucoup plus compliqué. Ce dernier est en effet le fruit d’interactions très complexes avec toutes sortes d’autres molécules. Le prix de production risque aussi d’être un sérieux frein. Aujourd’hui, on est capable de produire beaucoup du fromage à base de lait animal à peu de frais. Celui qui serait produit en laboratoire ne sera pas capable de rivaliser dans un avenir proche.

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