Carte blanche

La Wallonie bientôt au centre d’une Europe circulaire?

La France lance la consigne des bouteilles en plastique et des canettes. Elle rejoint ainsi les évolutions déjà en cours aux Pays-Bas et en Angleterre. Bientôt, tous nos pays voisins utiliseront ce système efficace contre les déchets sauvages. La Région bruxelloise a inscrit la consigne dans son accord gouvernemental. La Wallonie suivra-t-elle le mouvement?

Brune Poirson, la secrétaire d’Etat française à l’Ecologie l’annonçait au quotidien français Le Parisien: « D’après un sondage Ifop réalisé l’an dernier, 83 % des Français sont disposés à rapporter leurs canettes et leurs bouteilles en plastique à la consigne. Ce sera une petite révolution. Je parle volontiers d’un big bang dans les poubelles des Français car ils vont se rendre compte que ces emballages ne sont pas des déchets, mais une source potentielle de ressources pour eux ».

Les industriels français s’engagent pour la consigne

Les industriels français soutiennent cette mesure du gouvernement. Les départements français de Coca Cola Europe, Pepsi, Red Bull, Danone, Evian et Nestlé ont publié une lettre ouverte par l’intermédiaire de leurs fédérations dans Le Journal du Dimanche. La Fédération du commerce et de la distribution l’a cosignée. Parmis ses membres, des chaînes de supermarchés qui sont également actives en Belgique: Aldi, Lidl, Carrefour, Spar et Colruyt.

Sous le titre « La consigne pour le recyclage des emballages de boissons est nécessaire à une économie vraiment circulaire« , les producteurs de boissons et les supermarchés y affirment que ce dépôt est nécessaire pour atteindre l’objectif européen et national d’une collecte sélective à 90% suffisamment rapidement.

Le fait que les géants français réalisent qu’ils ne peuvent atteindre leur objectif que grâce au dépôt, constitue une révolution dans le secteur. Jusqu’à présent, la plupart des sociétés de boissons et des supermarchés affirmaient qu’ils « ne croyaient pas » au dépôt comme solution. C’est aussi le son de cloche que Fost Plus n’a de cesse de répèter.

Mais leurs homologues français concluent, après des mois de recherche, que « seuls les pays qui ont adopté un système de dépôt atteignent et même dépassent l’objectif de la collecte à 90% » . Pas les Pays-Bas, pas la Belgique.

La Belgique risque du retard

En Belgique, la consigne existe. Mais elle ne concerne que les bouteilles de bière et certaines bouteilles de vin. S’agissant de ces deux catégories, l’efficacité du système saute aux yeux. Comparez le grand nombre de canettes de bière abandonnées le long de vos trajets au petit nombre de bouteilles de bière. Les bouteilles (consignées) sont rares, tandis que les canettes (non-consignées) souillent nos rues, nos plages et notre environnement.

En Allemagne et dans les pays scandinaves, grâce à la consigne, on ne trouve plus de bouteilles ni de canettes aux bords des routes. Si vous avez eu le plaisir de visiter Berlin, Oslo ou Copenhague, vous avez sûrement été frappés par la propreté de ces villes.

Les bouteilles et les canettes représentent 40% du volume des déchets sauvages. Leur récupération constitue donc un facteur important pour l’embellissement des nos quartiers et nos paysages. Les exemples à l’étranger démontrent que la consigne réduit le nombre de canettes et de bouteilles dans la nature de 70%, voire de 90%.

Consigner les bouteilles en plastique et les canettes pourrait rendre nos villes et nos villages très vite plus attrayants – pour nous-mêmes et pour les touristes.

Du vrai recyclage de qualité

La consigne présente un deuxième grand avantage, également citée par la secrétaire d’Etat française: le recyclage monte en flèche, et sa qualité s’améliore.

Brune Poirson cite la nouvelle directive européenne[a] qui prescrit que 90% des bouteilles en plastique doivent être collectées séparément au plus tard en 2029. De tels pourcentages sont atteints uniquement par les pays qui pratique la consigne. La directive européenne aura donc comme effet d’étendre la consigne à tous les pays européens dans les dix ans à venir.

Les entreprises belges qui utilisent des emballages (les supermarchés et les producteurs de boissons) se vantent, à travers leur asbl Fost Plus, que la Belgique serait le champion européen du recyclage. C’est faux. Elles se basent sur des chiffres auto-rapportés, gonflés et frappés de nombreuses imprécisions. Selon une étude de 11 intercommunales flamandes, la réalité serait que seulement 50% des bouteilles en plastique sont recyclées.

Une opportunité d’or

Pourtant, notre pays, avec ses nombreuses PME, pourrait être un précurseur dans le développement de l’économie circulaire. Nous possédons un savoir-faire, et nos entreprises sont expertes dans des niches bien spécifiques.

Plus vite la Belgique lancera la consigne, plus vite nos entreprises pourront développer des connaissances et une expertise, qui leur donneront une longueur d’avance sur un marché nouveau qui, grâce à la nouvelle directive, englobera un demi-milliard de consommateurs européens.

La consigne est une compétence régionale. Les nouveaux gouvernements qui se forment dans les Régions ont une opportunité unique d’ouvrir un nouveau créneau économique pour nos PME. La nouvelle coalition du PS, Ecolo et Défi à la région bruxelloise a décidé d’introduire la consigne. Les espoirs que le gouvernement wallon fasse pareil sont grands. Avec 8 Belges sur 10 favorables à son instauration, la consigne est l’une des rares mesures environnementales qui jouit d’une très grande popularité.

Rob Buurman et Tom Zoete, Recycling Netwerk Benelux

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