Mélanie Geelkens

Une sacrée paire de conducteurs : « Il faudrait pas que bobonne griffe la carrosserie. Ils sont meilleurs, les conducteurs. Plus francs, plus sûrs. » (chronique)

Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

Dans 99 % des couples, c’est le mari qui conduit la plupart du temps. Pourquoi ce n’est pas bobone qui roule? Parce que les conducteurs, ils « sont meilleurs. Plus francs. » Il y a même des psys qui pensent parce que ce serait un nouveau moyen de faire la guerre. La route : le champ de bataille. La BMW : le destrier. Tous contre tous et chacun pour soi.

C’était un samedi d’août comme il aurait pu s’en dérouler en octobre, décembre ou mai. Une virée au Decathlon avant de rechercher les gamins aux scouts puis d’aller manger un poulet-compote chez belle-maman. Pourtant, ce samedi-là, ce père de famille avait eu une révélation, dans son Renault Scenic : au volant de toutes les autres voitures croisées sur la route, il n’y avait que des hommes. Ce constat l’avait visiblement ébranlé puisque, le lendemain, la volaille bien digérée, il s’en était ému sur le groupe Messenger réunissant quelques amis, mâles et blancs et aimant plaisanter en tant que tels. « Dans 99 % des couples, c’est le mari qui conduit la plupart du temps. N’est-ce pas quelque chose d’intolérable en 2020 ? » Rires gras des destinataires.

Y a même des psys qui pensent (sans rire) que s’ils l’aiment autant, leur caisse, c’est parce que l’habitacle leur rappelle le ventre maternel.

Lui faisait partie du pour cent restant, évidemment. Bien sûr que Madame maniait le levier de vitesses ! N’était-ce pas elle, le chauffeur, lors de leur dernier week-end à Blankenberge, alors qu’il avait mails et statuts Facebook à rédiger ? Il lui avait quand même ordonné « on change avant le ring, c’est prouvé que les femmes font plus d’accidents », à elle, qui emprunte ledit ring cinq fois par semaine pour se rendre au bureau, là où son expérience à lui se limite à deux trajets bruxellois l’année. Puis il y avait cette fois à la sortie d’un restaurant, quand il avait aperçu un contrôle d’alcoolémie. Ben quoi, ils avaient bu la même sélection de vin, fallait bien qu’un des deux souffle et se fasse confisquer son permis.

Pourquoi les 99 % ne partageaient donc pas, eux aussi, le volant ? Un peu de parité, quoi, les gars ! Bon, c’est vrai qu’il faudrait pas que bobonne griffe la carrosserie. Ils sont meilleurs, les conducteurs. Plus francs, plus sûrs. D’ailleurs, c’est d’ailleurs sûrement des fake news, toutes ces statistiques officielles démontrant que les femmes sont moins impliquées dans des accidents. « De toute évidence, le comportement féminin au volant est plus prudent, plus responsable et plus respectueux des autres usagers, écrivait l’Institut belge pour la sécurité routière en mars dernier. A l’inverse, l’homme tend davantage à relativiser ses fautes et semble moins conscient des dangers qu’il court (et fait courir). » Blablabla.

Des gentlemen, en fait. Qui rendent service : elles détestent la bagnole, autant qu’ils l’adorent. Y a même des psys qui pensent (sans rire) que s’ils l’aiment autant, leur caisse, c’est parce que l’habitacle leur rappelle le ventre maternel. Ou parce que ce serait un nouveau moyen de faire la guerre. La route : le champ de bataille. La BMW : le destrier. Tous contre tous et chacun pour soi. En garde, la camionnette ! La berline va bien t’achever.

Parce qu’elle est grosse, forcément, leur auto. Aussi grosse que leur soif de virilité et de puissance. Un territoire de mâles, ça, et les femelles qui y empiètent s’en font petit à petit chasser à coups de « t’avais pas vu la priorité ? » et de « ton créneau, quelle cata ! » Alors elles finissent par rouler moins bien, selon l’impitoyable « menace du stéréotype » : par crainte de renforcer le cliché, la peur prend le pas sur la performance (1).

Et puis c’est plus confortable, le siège passager. Conforme à ce qu’on leur a toujours enseigné : pas trop bouger, être bien calme, pas trop de risques. C’est pour les garçons, le danger. Gentilles filles. Occupez-vous plutôt de préparer le poulet-compote, pendant que ces messieurs découvrent le monde patriarcal à bord de leur Scenic.

(1) Pas une invention féministe, des expériences scientifiques l’ont maintes fois démontré. Ça vaut aussi pour les vieux, les Noirs, les pauvres…

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Six cent cinquante-sept femmes avaient participé, en 2019, au challenge de la WoWo Community, un réseau dédié aux entrepreneures. L’édition 2020, qui se déroulera en ligne du 10 au 17 septembre prochain, proposera à celles qui ont ou vont lancer leur entreprise de relever un défi par jour « pour éviter les cinq erreurs fatales faisant perdre du temps et de l’argent ». Si l’entrepreneuriat féminin progresse, les hommes restent deux fois et demi plus nombreux que les femmes à exercer une activité sous le statut d’indépendant.

Surprise estivale

La modification a été actée au Moniteur belge en ce mois d’août : le code judiciaire (dans son article 78) prévoit désormais que les magistrats, futurs ou déjà nommés, doivent suivre « une formation approfondie en matière de violences sexuelles et intrafamiliales ». Une nouvelle qui a surpris les associations féministes, mais dont la lutte contre les féminicides et les violences ne se plaindra pas.

La victoire des hôtesses

Une sacrée paire de conducteurs :
© TWITTER
Depuis un an, le collectif (d’hôtesses) #pastapotiche en avait fait son combat : mettre fin à la présence de deux femmes sur les podiums du Tour de France, ainsi qu’aux bisous aux vainqueurs. Une pétition avait été lancée (37.000 signatures) et l’organisation de la compétition cycliste (qui débute ce 29 août) a décidé que le champagne et les bouquets de fleurs seraient désormais remis par une femme… et un homme. Liège-Bastogne-Liège et la Flèche wallonne procédaient déjà paritairement. Quant aux bises, le Covid s’en est chargé.

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