Le roi Phillippe a rendu visite aux Diables rouges, jeudi après-midi. © Belga

Un Euro 2020 décisif pour les Belges, très politique et lié à l’incertitude sanitaire

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

C’est le jour J. L’Euro 2020, reporté d’un an, est une occasion unique pour notre « génération dorée » de gagner un titre, enfin. De quoi doper la Vivaldi fédérale. Symbolisant l’unité européenne, le tournoi illustre déjà ses divisions géopolitiques. Sur fond d’une épidémie qui le rend plus indécis que jamais.

L’Euro 2020, reporté en 2021, démarre ce vendredi soir à Rome avec le match d’ouverture opposant l’Italie à la Turquie. Les chants des supporters résonneront comme un signe d’espoir dans ce pays qui fut l’un des plus marqués par la crise du coronavirus: le Stadio Olimpico pourra accueillir 25% de sa capacité, soit environ 15000 spectateurs.

Dès samedi soir, 21h, la Belgique vibrera avec les Diables rouges à l’occasion d’un déplacement piégeux en Russie. Vingt-quatre pays se disputent le titre,lors d’un tournoi déjà marqué par une dimension politique importante: organisé dans onze pays différents pour symboliser la construction européenne, il est, aussi et surtout, le reflet de ses divisions.

1 Un tournoi décisif pour la Belgique

Pour la « génération dorée » des Diables rouges, ce tournoi est le moment ou jamais de remporter un titre majeur, après la désillusion de l’Euro 2016 contre le Pays de Galle (un quart de finale qu’ils n’auraient jamais du perdre) et le ‘Seum » de la Coupe du monde 2018, en demi-finale face à la France.

La Belgique figure, cette fois, parmi les principaux outsiders de la compétition aux yeux des ‘bookmakers ». Nos voisins français sont loin devant, suivent les Belges en compagnie des Anglais, des Espagnols et des Portugais – mais il ne faut pas écarter les Allemands et les Italiens, de même…qu’une surprise. Pour l’anecdote, une simulation chiffrée de la banque Goldman Sachs donne la Belgique victorieuse en finale contre l’Italie, tandis qu’un algorithme de la société Sportradar attribue le titre à… la République tchèque face au Danemark.

Politiquement, la place des Diables rouges ne pèse a priori pas lourd, mais un parcours réussi dans une compétition d’envergure serait un adjuvant pour une Vivaldi fédérale qui a fait d’un « projet positif pour la Belgique » sa marque de fabrique face au nationalisme flamand. Pas de Vincent Kompany, capitaine engagé, cette fois, pour se mesurer à Bart De Wever sur les réseaux sociaux. L’entraîneur, Robert Martinez, est le prototype du modèle international échappant à toute querelle intestine et le noyau de l’équipe est plus international que jamais. Mais dans les rues du pays, si les ambitions se concrétisent enfin, cela pourrait faire du bruit.

2 Un tournoi très politique: unité et division

En décidant d’organiser le tournoi dans un grand nombre de pays européens – une première! – l’UEFA a voulu fêté l’anniversaire du tournoi (né en 1960) et refléter de façon positive la construction européenne: ce n’est pas par hasard que le coup d’envoi a lieu à Rome, ville symbole du traité fondateur de la Communauté économique européenne (CEE), ancêtre de l’Union européenne. L’Europe du football va même bien plus loin dans sa fédération de pays, jusqu’à Moscou et Bakou. Seule absence de marque, symbolique également: Bruxelles, capitale de l’Europe, ne sera pas au rendez-vous… faute de stade national – faut-il rappeler cette triste saga belgo-belge?

Cela étant, la compétition pourrait aussi et surtout refléter les divisions propres à l’Europe d’aujourd’hui, tiraillées par les nationalismes. La première polémique d’envergure est née du maillot de l’Ukraine, contesté par la Russie avec laquelle le pays est en guerre quasi ouverte. Celui-ci reprend une carte en filigraine de l’Ukraine comprenant la Crimée (annexée de force par les russes) et des slogans nationalistes: l’UEFA a dû intervenir.

Russie et Turquie sont, au demeurant, des pays susceptibles d’utiliser l’Euro pour témoigner de leur appétit géopolitique: on se souvient notamment des manifestations de joie ‘militaires’ des Turcs lors de la phase éliminatoire du tournoi ou de l’approche très ‘sof power’ de la Russie de Poutine lors de son Mondial. La présence, pour la première fois, de l’équipe de Macédoine du Nord est marquante, tandis que des duels mériteront leur dose de piment, comme un sulfureux Angleterre-Ecosse sur fond de Brexit et de velléité indépendantiste des Ecossais. Le tournoi sera à l’image de l’Europe d’ajourd’hui: tourmenté.

3 L’incertitude liée à la crise sanitaire

En organisant l’Euro dans toute l’Europe, l’UEFA voulait aussi célébrer la liberté de circulation, un des piliers de la construction européenne, avec des supporters voyageant partout. Ce droit, que l’on pensait acquis, a pris un sérieux coup dans l’aile depuis un an et le Certificat sanitaire européen n’est pas encore au rendez-vous. Même si la vaccination permet le retour du public, de nombreux candidats aux précieux tickets ont dû renoncer à se déplacer.

Sportivement aussi, le rendez-vous pourrait être perturbé par le Covid. Les Diables rouges ont été vaccinés, mais ce n’est pas le cas de toutes les équipes. L’Espagnol Busquets, capitaine de l’équipe, a été contrôlé positif, les équipes espagnoles et portugaises mises en quarantaine dans la foulée. Le règlement prévoit que si une équipe est décidée par la maladie, son match pourra être reporté de 48 heures ou, si ce n’est toujours pas possible de le jouer, se verra battue 0-3 sur le tapis vert.

Enfin, la saison des joueurs a été particulière, longue, marquée par un enchaînement de matchs important, surtout pour les grosses cylindrées des principaux championnats. Les risques de blessures ou de pertes de rythme sont réels, ce qui pourrait rebattre les cartes d’un tournoi qui est, peut-être, plus incertain que jamais. Après tout, ce n’est peut-être pas un hasard si un algorithme donne un République tchèque – Danemark en finale…

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