Sophie Wilmès © Belga

Un an de confinement: de l’union autour des pouvoirs spéciaux à l’unité de commandement pas toujours acceptée

Le Vif

Le monde politique a connu face à la pandémie de covid-19 l’un de ses rares moments d’union politique en offrant en 2020 au gouvernement Wilmès une très large majorité pour lui octroyer des pouvoirs spéciaux. Il n’y eut pourtant jamais de grande unité nationale, les nationalistes flamands comme le PTB refusant d’accorder leur confiance à l’exécutif minoritaire dirigé par la libérale francophone.

Le 17 mars, depuis l’opposition, les socialistes, les écologistes, DéFI et le cdH ont accordé la confiance au gouvernement fédéral MR-Open Vld-CD&V qui depuis les élections du 26 mai 2019 ne disposait plus que de 38 sièges sur 150 à la Chambre. Une tentative d’un gouvernement d’union nationale réunissant socialistes, écologistes, libéraux, chrétiens démocrates et la N-VA a échoué à la mi-mars. Le président des socialistes francophones, Paul Magnette, a refusé de se lancer dans une aventure où il se serait allié à la N-VA, un scénario qu’il rejetait depuis des mois. Le PS choisira de soutenir de l’extérieur ce qui reste du gouvernement « suédois » et lui octroyer des pouvoirs spéciaux, un mécanisme qui permet à l’exécutif de prendre des mesures législatives appelées à être ratifiées par le parlement.

La Belgique est frappée de plein fouet par la pandémie dont les premiers effets se sont fait sentir à la fin février, au retour du congé de détente (Carnaval). Le 17 mars, la phase fédérale du plan d’urgence est enclenchée et la Belgique entre dans son premier confinement au terme d’un conseil national de sécurité.

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

Le 26 mars, le gouvernement Wilmès reçoit lesdits pouvoirs pour une période de trois mois renouvelables. L’expérience des « kern+10 » commence, soit la réunion hebdomadaire des principaux ministres du gouvernement Wilmès et des présidents des dix partis qui ont soutenu les pouvoirs spéciaux… ou plutôt les 9 présidents car la N-VA n’est pas représentée par Bart De Wever mais par son chef de groupe à la Chambre, Peter De Roover.

Le 12 juin, l’union vole en éclats. M. De Roover claque la porte de la réunion où se discutent des mesures de soutien socio-économique. A ses yeux, ce « kern+10 » n’est pas la bonne formule pour prendre de telles décisions. Il en appelle à la formation d’un vrai gouvernement de plein exercice.

Le 27 juin, les pouvoirs spéciaux ont expiré. Ils ne seront pas renouvelés.

Les tractations politiques mènent à la formation d’un nouveau gouvernement le 1er octobre. Sophie Wilmès, devenue le visage de la lutte contre le coronavirus, passe le relais à Alexander De Croo. Du côté francophone, l’aura de la première cheffe de gouvernement fédéral de l’histoire du royaume a compensé l’image de sa ministre de la Santé, Maggie De Block, ternie par des propos maladroits, la décision de détruire un stock stratégique et des économies dans les soins de santé. Une autre figure s’impose à ce poste: le socialiste flamand Frank Vandenbroucke au style beaucoup plus dirigiste que sa prédécesseure.

Les conseils nationaux de sécurité cèdent la place aux plus classiques comités de concertation. De nouveaux comités voient le jour: exit la Cellule d’évaluation fédérale (Celeval) et le GEES (Groupe d’Experts en charge de l’Exit Strategy), place à un commissaire covid et au GEMS (Groupe d’experts en charge de la stratégie de crise, présidé à nouveau par l’infectiologue anversoise Erika Vlieghe).

Rapidement, les différents gouvernements doivent affronter la deuxième vague de l’épidémie. La situation flambe en Belgique et le royaume se retrouve dans le bas du classement européen pour sa gestion. Une décision est particulièrement controversée: celle prise le 23 septembre, à une semaine de la formation du nouvel exécutif, de passer à la phase de « gestion de risque », et non plus de crise, et d’assouplir les mesures pour s’assurer de l’adhésion de la population alors que les contaminations grimpent.

Au mois d’octobre, graduellement, se met en place un deuxième confinement. La question de l’union politique se pose avec moins d’acuité puisque tous les gouvernements disposent d’une majorité mais l’exercice réalisé au sein du comité de concertation n’en demeure pas moins délicat puisqu’il implique par exemple d’associer la N-VA exclue de la majorité fédérale. Le démarrage ne sera pas facile. Dans un premier temps, les nationalistes rechignent à prendre des mesures trop strictes face à une flambée plus marquée à Bruxelles et en Wallonie. Le 23 octobre, un comité de concertation aboutit d’ailleurs à un résultat jugé timide. Le ministre-président wallon Elio Di Rupo menace de prendre des mesures pour sa seule Région. Une semaine plus tard, le comité de concertation décide d’un confinement renforcé, avec la fermeture pour un mois des commerces non essentiels.

Au sein de la majorité fédérale, la rigueur des mesures et la lassitude de la population suscitent des remises en cause et parfois des critiques acerbes. C’est au MR que l’autorité de M. Vandenbroucke et sa ligne stricte semblent le plus mal passer. Bon an mal an, cette ligne s’est pourtant imposée jusqu’à présent.

Les mesures sanitaires s’appuient sur un arrêté ministériel depuis un an. La longueur de la crise a mis à mal cette technique qui prive le dispositif d’une assise parlementaire alors qu’il s’agit de restrictions lourdes des libertés publiques. Face aux critiques qui se sont multipliées, le gouvernement a fini par présenter au parlement un projet de loi pandémie. Un débat sur le sujet à la Chambre est attendu avant le congé de Pâques.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire