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Trop ou pas assez ? Tous les experts ne s’accordent pas sur la manière de combattre la variante anglaise

Tex Van berlaer
Tex Van berlaer Collaborateur Knack.be

Si tous les experts observent d’un oeil très inquiet la propagation de la variante britannique du covid, cela ne signifie pas pour autant qu’ils s’accordent sur la meilleure approche pour la ralentir.

Des centaines de cas, et peut-être même des milliers. Le virologiste Marc Van Ranst (KU Leuven) est inquiet. La montée en puissance du coronavirus britannique, très contagieux, est incontestable. Ici et là, on signale également la variante sud-africaine. Geert Molenberghs (KUL/UHasselt) n’est pas plus tranquille: « Le coronavirus a lancé sa dernière offensive », déclarait encore hier le biostatisticien dans nos colonnes.

Ces deux experts sont loin d’être les seuls. Le microbiologiste Herman Goossens (UA) est lui aussi inquiet. Son étude sur la variante, réalisée à la demande du ministre de la Santé Frank Vandenbroucke (SP.A), a été lue presque mot pour mot au Parlement jeudi. Vandenbroucke indique même qu’il s’agit d’un « nouveau danger ». C’est surtout l' »augmentation significative » du nombre de cas suspects dans les laboratoires fédéraux qui semblent montrer une propagation de la variante anglaise. Goossens a encore enfoncé le clou le soir même sur la VRT : « Cela peut devenir très explosif ».

Que faire ?

Il y a un point sur lequel tous les experts s’accordent. Il faut agir aux frontières. Mais ils nuancent tout de même en précisant que les fermer complètement n’est pas une option. Ce n’est en effet pas une option envisageable par notre gouvernement.

Ce qui est possible, par contre, c’est qu’on limite le trafic frontalier non essentiel. « Je le dis à contrecoeur, mais nous devrions rendre les voyages non essentiels plus difficiles », déclare ainsi l’infectiologue Steven Callens (UZ Gent). « Nous avons maintenant une « window of opportunity » puisque notre taux d’infection est assez faible. » C’est en tous cas cette piste qui devrait être proposée au gouvernement De Croo par les scientifiques du Conseil consultatif du GEMS.

Il y a urgence

Vendredi matin, la ministre de l’Intérieur Annelies Verlinden (CD&V) a déjà décidé de renforcer les règles pour les voyageurs en provenance de l’extérieur de l’Union européenne. Ils devront remplir le formulaire de localisation du passager (« passenger locator form », PLF) quelle que soit la durée de leur séjour à l’étranger. Les nouvelles règles semblent s’adresser en particulier aux personnes qui se rendent en Grande-Bretagne.

Selon le GEMS, ce n’est pas suffisant puisqu’il faudrait d’urgence une politique de test plus stricte. Pour Steven Callens tout voyageur entrant dans notre pays, qu’il arrive en avion, en train, en bus ou en voiture, devrait être soumis à un test obligatoire.

Malgré tout, tous les experts ne s’accordent pas autour d’une réponse unique à la variante britannique.

Par exemple, Piet Maes, virologiste à la KUL, dit qu’il ne faut pas exagérer. Maes, qui fait pourtant partie du même consortium de recherche que M. Goossens, a estimé, pour sa part, que certaines des déclarations faites jeudi étaient « trop peu alarmistes ». « A Louvain et à Liège, nous constatons également une augmentation du nombre de cas suspects, mais la plupart de ces échantillons ne sont pas de la variété britannique », a-t-il déclaré.

OEillère

Maes craint qu’en agissant ainsi nous perdions de vue les autres variantes. « Si nous nous concentrons trop sur la variante britannique, nous risquons de passer à côté d’autres évolutions et mutations », dit-il. Callens le rejoint sur ce point et espère, lui aussi, que toute l’attention ne se portera pas sur la variante britannique.

Maes n’est pas non plus convaincu par l’idée d’Herman Goossens de tester des villages entiers si la variante britannique y est trouvée. « C’est exagéré. Des opérations de cette envergure menacent de mettre la pression sur notre capacité de testing », précise encore le virologue. Même son de cloche chez Steven Callens qui se réfère aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé. Celles-ci préconisent de tels tests à grande échelle uniquement lorsque l’incidence du virus est faible. « Or, pour le moment, nous en sommes loin. Hier, par exemple, le microbiologiste Emmanuel André (KUL) a annoncé que 46 cas de la variante britannique avaient été dépistés. Supposons que ces cas proviennent tous de villages différents : nous devrions alors tester plus 100 000 personnes par jour. On arriverait très vite à la limite de nos capacités de testing.

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