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Pour Didier Bellens, la Belgique est un pays hostile aux entreprises

L’administrateur délégué de Belgacom, Didier Bellens, s’est montré très critique à l’encontre des normes d’émission en vigueur à Bruxelles et sur la nouvelle loi télécom. Ses propos ont suscité de vives réactions politiques, notamment au sein de l’exécutif fédéral ainsi qu’à la Région bruxelloise.

Dans un discours prononcé, en présence de plusieurs journalistes, dans la cadre du « drink de nouvel an » du groupe de télécoms, Didier Bellens a estimé que la Belgique se distinguait à l’étranger comme un pays hostile aux entreprises. Didier Bellens n’a pas de mots assez durs contre les normes en vigueur en Région de Bruxelles-Capitale et qui, selon lui, ne permettent pas à Belgacom d’y offrir la technologie 4G. Belgacom est actuellement en train de déployer en Belgique cette technologie d’internet mobile plus rapide. « La capitale de l’Europe risque d’être le seul endroit en Europe où il n’y a pas de 4G », a averti le patron de l’entreprise publique.

« Ces gens-là ont besoin de la 4G et que leur dit Bruxelles? Fuck you… »

Selon Didier Bellens, de nombreuses entreprises se posent des questions. Il a rappelé que Bruxelles était « l’endroit au monde où l’on compte le plus d’ambassades » puisque chaque pays a trois ambassades dans la capitale: une pour la Belgique, une pour l’Union européenne et une pour l’Otan. « Ces gens-là ont besoin de la 4G et que leur dit Bruxelles? Fuck you… », a déclaré le CEO. Celui-ci a encore jugé qu’il « était grand temps que les responsables politiques fassent le lien entre le développement du pays, la création d’emploi et le rôle que les télécom jouent à cet égard ».

Bellens a ensuite critiqué la nouvelle loi télécom, en vigueur depuis octobre, et qui permet au consommateur de changer d’opérateur après 6 mois sans frais, tant pour l’abonnement téléphone, GSM, internet ou de télévision. La législation européenne avait fixé le délai à 12 mois maximum mais « la Belgique, dans sa grande sagesse, comme d’habitude, a décidé d’instaurer une loi plus restrictive que dans les autres pays européens », a ironisé le patron de Belgacom. « Cela affaiblit naturellement les entreprises télécoms belges par rapport à leurs concurrentes européennes », juge encore le CEO, qui dit avoir déjà dû expliquer à des investisseurs aux Etats-Unis « pourquoi la Belgique veut tuer ses entreprises industrielles ». Les propos du patron de Belgacom ont suscité de vives réactions politiques, notamment au sein de l’exécutif fédéral ainsi qu’à la Région bruxelloise.



Huytebroeck: « un comportement de grossier personnage »

Evelyne Huytebroeck a réagi à propos de la technologie 4G. « La Région fera des propositions pour permettre son exploitation, mais il n’est pas question de négocier sous la pression de « sorties grossières par presse interposée », a commenté mardi la ministre bruxelloise de l’Environnement, Evelyne Huytebroeck, après les propos tenus par le patron de Belgacom au sujet de l’attitude de la Région-capitale dans ce dossier. « Je suis outrée parce que M. Bellens m’avait habituée à autre chose qu’à ce comportement de grossier personnage. Jusqu’ici, nous avons essayé de travailler en conscience et dans le respect mutuel », a commenté à Belga la ministre bruxelloise actuellement en déplacement en République Démocratique du Congo dans le cadre de la coopération en matière d’adoption.

Evelyne Huytebroeck a ajouté qu’il y aurait bientôt une nouvelle réunion entre la Région et les opérateurs de telecommunications « où nous viendrons avec des propositions et M. Bellens le sait ».

« Mais on ne négociera pas sous la pression de sorties grossières par presse interposée. S’il le faut je négocierai avec les autres opérateurs seuls », a affirmé la ministre.

Labille: « j’attends autre chose d’un top manager »

Le ministre des Entreprises publiques, Jean-Pascal Labille (PS), a lui aussi dénoncé mardi soir « tant sur la forme que sur le fond » les déclarations du patron de Belgacom. « (J’) attends autre chose d’un top manager d’une des plus grandes entreprises de Belgique. Si Belgacom est autonome, elle n’en demeure pas moins une entreprise publique », a réagi le ministre dans un communiqué.

M. Labille invite dès lors M. Bellens à contribuer, « par le biais de réflexions constructives », à améliorer l’accueil réservé aux entreprises qui font le choix de s’installer dans notre pays.

Sur le fond de la polémique, Jean-Pascal Labille souligne que « les dispositions mises en cause par M. Bellens participent pleinement à la défense des intérêts d’une part sanitaires (ondes GSM), d’autre part économiques (loi Télécom) des citoyens ».

« A côté du développement des entreprises, c’est là aussi l’un des objectifs de service public que doivent nécessairement poursuivre un gouvernement… et une entreprise publique », ajoute le ministre fédéral.

Catherine Fonck (cdH) dénonce des « propos hallucinants » et réclame des excuses

La cheffe de groupe cdH à la Chambre, Catherine Fonck, a dénoncé mardi soir les « propos hallucinants » de Didier Bellens sur la loi télécoms, attendant à présent des excuses publiques du patron de Belgacom. « Ses propos montrent que le seul objectif de M. Bellens est de remplir les caisses de Belgacom sur le dos des consommateurs », a commenté la députée dans une réaction auprès de l’agence Belga.

Pointant les tarifs télécoms particulièrement élevés chez nous en comparaison de ceux pratiqués en France, ainsi que les « contrats-pièges » encore applicables jusqu’il y a peu en Belgique, l’élue centriste estime que la loi télécoms dénoncée mardi par Didier Bellens « est évidemment une loi indispensable ».

Amère, Mme Fonck ne va toutefois pas jusqu’à réclamer la démission du patron de Belgacom, mais attend à présent « un sursaut de lucidité » de M. Bellens qui « doit présenter ses excuses, non aux politiques, mais à l’ensemble des consommateurs ».

Celle-ci interrogera jeudi, en plénière de la Chambre, le ministre de tutelle, Jean-Pascal Labille (PS) « qui doit demander des comptes à M. Bellens pour ces propos inacceptables », a-t-elle encore annoncé.

Peeters: et si on régionalisait Belgacom?

Le ministre-président flamand Kris Peeters a, de son côté, profité mardi de la polémique autour des propos peu diplomatiques de Didier Bellens pour suggérer une éventuelle régionalisation de Belgacom. « Bellens explique à l’étranger pourquoi la Belgique tue l’industrie. C’est une généralisation grotesque. Mais pourquoi ne pas parler d’une régionalisation de Belgacom? « , a lancé mardi soir le ministre-président flamand sur son compte Twitter.

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