Avant de verser aux artistes les sommes qui leur reviennent, il faut les collecter. Pas si simple... © BELGAIMAGE

Plus de 650 millions d’euros dorment dans les coffres des sociétés de gestion des droits d’auteur

Laurence Van Ruymbeke
Laurence Van Ruymbeke Journaliste au Vif

Alors que les artistes tirent le diable par la queue, plus de 650 millions d’euros dorment dans les coffres des sociétés de gestion des droits d’auteur. Le travail de celles-ci est certes complexe. Mais en pleine crise sanitaire, l’importance de cette somme interpelle.

A la fin de 2018, quelque 665 millions d’euros étaient logés dans les caisses des 26 sociétés de gestion des droits d’auteur et des droits voisins du pays, selon le dernier rapport annuel disponible du service de contrôle de ces sociétés, logé au sein du SPF Economie. Six de ces 26 sociétés détiennent 83 % de la dette totale et 45 % sont à la charge de la seule Sabam. A l’heure où la crise du coronavirus jette nombre d’artistes dans de graves difficultés financières, ne serait-il pas possible de leur faire profiter au plus vite de cet argent ? Minute, papillon : ce n’est pas si simple.

Interrogé, le SPF Economie renvoie la balle au cabinet de la ministre de l’Economie, dès lors qu’il s’agit là  » d’une question politique « .  » Ces droits doivent être distribués par les sociétés de gestion conformément à leurs règlements de répartition, indique-t-on au cabinet. Ce n’est pas de l’argent auquel le gouvernement a droit. Il ne peut donc imposer aux sociétés de droits d’auteur de libérer ces sommes au profit des artistes.  »

Peut-être leur versement pourrait-il toutefois être accéléré ? Le rapport du SPF Economie indique en effet que 64 % des 665 millions de dette totale sont  » payables  » aux ayants droit.  » La raison pour laquelle ces sommes restent dans les sociétés de gestion est que le processus de répartition et de paiement n’est pas encore clôturé « , peut-on y lire. Avant de verser aux artistes la somme qui leur revient pour l’utilisation de leurs oeuvres, les sociétés de gestion de droits doivent en effet collecter cet argent auprès des utilisateurs, les chaînes de radio et de télévision, par exemple, ou les cafés, puis le répartir en fonction de règles complexes.

La majeure partie des dettes enregistrées à la fin de 2017, soit 409 millions d’euros, doit encore être répartie. Le montant total des dettes déjà perçues et réparties mais pas encore payées s’élève à 140 millions d’euros, dont 104 millions pour la seule Sabam qui en a versé 77 dans son fonds social. Au début du mois d’avril, celle-ci a décidé, en raison de la crise sanitaire, d’anticiper, au départ de ce fonds social, le versement de 18 millions d’euros à 9 000 de ses 29 000 membres, soit en moyenne 2 000 euros par bénéficiaire. Sur le solde de la dette totale des sociétés de gestion, quelque 35,7 % – 238 millions d’euros – ne pourront être versés rapidement aux bénéficiaires, par exemple parce qu’il s’agit de sommes contestées en justice, parce que des informations pratiques manquent pour effectuer le paiement ou parce que la société de gestion n’a pas encore reçu l’argent de l’utilisateur du droit.

Le rapport du SPF économie indique que 64 % des 665 millions de dette totale sont u0022 payables u0022 aux ayants droit.

En moyenne, rappelle le cabinet de l’Economie, la vitesse de répartition est de quinze mois après la clôture de l’année comptable de la perception. Depuis juillet 2017, le gouvernement a imposé une vitesse de répartition accrue des droits, qui doivent désormais être versés dans les neuf mois. La dette envers les ayants droit s’est d’ailleurs stabilisée et n’a plus augmenté.

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