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Perquisitions menées aux domiciles de quatre hébergeurs de migrants

Des perquisitions ont été menées dimanche aux domiciles de quatre hébergeurs de migrants à Saint-Gilles, Watermael-Boitsfort et Nandrin. Parmi eux, deux femmes ont été interpellées, présentées à un juge d’instruction et relâchées, indiquait en fin de journée la Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés. Quinze migrants ont été arrêtés et deux d’entre eux ont été remis en liberté.

La Plateforme citoyenne a dénoncé des actions qui s’apparentent, selon elle, à des visites domiciliaires déguisées visant à criminaliser la solidarité.

« Des ménages belges ont été ciblés comme s’ils étaient devenus les repères de narcotrafiquants. Portes et serrures forcées, plaquages au sol, mandats d’amener, citoyens menottés. Si la lutte contre le trafic d’êtres humains est indéniablement nécessaire, nous ne comprenons pas que des hébergeurs puissent de la sorte être traités comme des criminels pour avoir été solidaires envers un public plus souvent victime de traite d’êtres humains que coupable de trafic d’êtres humains », indique Mehdi Kassou, qui précise que les mandats auraient été obtenus sur base de numéros de téléphone qui auraient été donnés par les hébergeurs à leurs hébergés.

« Il semble donc que le parquet ait trouvé une parade au projet de loi dit des visites domiciliaires et qu’aujourd’hui, toute famille belge qui aura fourni à son invité une carte SIM afin qu’il puisse rester en contact avec son hôte ou sa famille et les contacter en cas de danger puisse devenir la cible potentielle d’une opération de police traumatisante. Deux hébergeuses ont été privées de liberté, mais nous ne savons, pour l’heure, toujours pas ce qui leur est reproché », conclut-il.

Alexis Deswaef
Alexis Deswaef© VIRGINIE LEFOUR/belgaimage

Selon Me Alexis Deswaef, avocat de deux hébergeurs interpellés dimanche dans le cadre d’une enquête sur le trafic d’êtres humains, ces arrestations sont un dommage collatéral des mesures de lutte anti-terroristes et plus précisément de celle qui a supprimé l’anonymat des cartes SIM. « Sans documents d’identité, les sans-papiers ne peuvent en effet plus s’en procurer et se sont les hébergeurs qui les leur achètent à leur nom. Si la personne qu’ils hébergent téléphone par exemple à quelqu’un pour lui demander de l’aide pour passer au Royaume-Uni, et que l’individu appelé est placé sur écoute dans le cadre d’un dossier de trafic d’êtres humains, la police peut retrouver leur nom puisque ce sont eux qui ont acheté la carte SIM ».

Le parquet de Bruxelles a confirmé et justifié l’opération. « Sept personnes sont placées sous mandat d’arrêt. Le juge d’instruction estime qu’il y a assez d’éléments pour penser que ce sont des auteurs ou des co-auteurs de trafics d’êtres humains qui effectuent le passage des victimes de la Belgique vers l’Angleterre », a indiqué la porte-parole Ine Van Wymersch sur RTL-TVi.

La plateforme citoyenne envisage de lancer une action de solidarité par laquelle les hébergeurs se dénonceraient spontanément à la police. L’Ordre francophone des avocats, Avocats.be, a d’ores et déjà fait savoir qu’en vertu de la loi Salduz, ces personnes avaient droit à l’assistance d’un avocat si elles étaient convoquées pour une audition à la police et qu’il se tenait prêt à assurer celle-ci.

L’hiver passé, Avocats.be faisait partie des organisations qui combattaient le projet de loi relatif autorisant les « visites domiciliaires » chez des particuliers afin d’exécuter un ordre de quitter le territoire. L’examen du texte est depuis lors gelé.

« A une semaine des élections, on semble être en train de faire passer par la fenêtre ce qu’on fait sortir par la porte afin de donner un message de fermeté », a regretté Jean-Marie Picard, président de la commission « droit des étrangers » d’Avocats.be.

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