© Belga

Nous avons regardé la télévision du MR: soignée, mais très formatée

Olivier Mouton Journaliste

Les libéraux lancent leur télévision propre canal d’informations, pour contourner les médias traditionnels. Son contenu ne laisse guère de place à des aspérités ou à des contradictions.

Le MR lance sa propre télévision, baptisée DreaMR (prononcez « Dreamer »). C’est le premier parti francophone à entrer dans cette danse, alors que du côté flamand, le Vlaams Belang a déjà lancé le mouvement. C’est forcément dans l’air du temps: la communication politique se fait de façon directe, vers les réseaux sociaux, et la vidéo est devenu un moyen d’expression incontournable.

« Il était temps de moderniser notre communication et de communiquer de manière directe à un public que l’on ne peut rencontrer que sur les plateformes, explique le président du parti, Georges-Louis Bouchez, que l’on sait conscient de bousculer les codes. L’idée ici est d’englober l’information sur de multiples canaux. A côté de l’émission télé et radio, avoir une présence médiatique digitale est vraiment nécessaire. Cette démarche s’inscrit dans une nouvelle stratégie de communication que nous voulons jeune et dynamique. Le MR est le premier parti francophone à créer son média! »

Une façon de contourner des médias hostiles

Ce qu’il ne dit pas ouvertement, mais qu’il exprimait dans une interview accordée au Vif/L’Express à la mi-octobre, c’est que le libéral entend de la sorte contourner un paysage médiatique considéré comme hostile au MR en Belgique francophone. Extraits choisis: « Il manque d’analyses prospectives, de sens de la mesure, de respiration…, disait-il notamment. On est dans l’instant. Si j’additionne les éditoriaux qui ont été écrits à mon égard, à une semaine d’intervalle, certains disaient que j’étais un génie, d’autres parlaient d’un immense gâchis, allez trouver la vérité là-dedans. »

Ou encore: « J’aimerais que l’on m’octroie le même espace pour des débats de fond: quand j’ai rédigé un bouquin, j’ai eu laborieusement deux articles. Ici, pour la petite phrase de l’un ou de l’autre, la plupart du temps ‘off’, on fait des duplex devant le siège du MR pendant une semaine. La manière dont le débat public est géré est lamentable. Pour le statut des artistes, je n’ai pas eu une minute au cours des JT. Nous avons organisé des libres débats sur le fond des dossiers, mais la seule chose qui intéressait les JT, c’était de savoir ce que Sophie Wimès ferait à la Chambre le 17 septembre. »

Certains voient dans la création de DreamMR la confirmation d’une forme de « trumpisation » du discours du MR, avec un Georges-Louis Bouchez sur tous les fronts, s’exprimant librement sur les réseaux. Ce ne sera toutefois pas la « télé Bouchez », défend-il au Soir: « Une cinquantaine de sujets sont déjà prêts et j’apparais une minute trente dans celui sur Jean Gol et moins d’une minute dans celui sur le statut des artistes. DreaMR ne m’est donc pas dédicacée. »

https://twitter.com/rwarmont/status/1339464750045028352Régis Warmont 📢https://twitter.com/rwarmont

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

550rich3153600000Twitterhttps://twitter.com1.0

Nous avons regardé quelques sujets de DreaMR à son lancement. Premier constat: ce sont des vidéos bien léchées, un travail professionnel. Sur la forme stricte, c’est évidemment bien maîtrisé. Deux jeunes, Orane Godrie et Qassem Fosseprez, donne un ton dynamique et frais à l’ensemble.

Sur le fond, c’est évidemment maîtrisé également, dans le mauvais sens du terme: c’est un contenu formaté, sans esprit critique.

Une émission complète est consacrée à la proposition du parti pour le statut des artistes. Bouchez, avec un sweet ‘United States of Belgium’ bien marketé, expose longuement le caractère original de la proposition (avec le temps qu’il n’aurait pas ailleurs?). Les témoignages des artistes viennent ensuite, un support cool et avenant pour poursuivre la démonstration. Forcément, cela ne décape pas comme les epxressions vives des milieux culturels que l’on a coutume d’entendre. Une séquence spécial USA et un exercice pédagogique sur l’élection belge semblent un peu décalé par rapport à l’élection confirmée de Joe Biden. Une séquence ‘Qu’en pensent les Belges? » pose la question: « Plutôt Trump ou Biden? ». Intéressant, vu le grand écart constaté parfois parmi les libéraux, mais sans que l’on ne réponde vraiment à la question. Cela tourne, par moments, à de la mauvaise émission concédée à la RTBF.

Un long « hors-série » est consacré à la figure tutélaire du parti, Jean Gol, en donnant la parole à ses proches – et moins proches, parfois – au sein du parti: Daniel Bacquelaine, Hervé Hasquin, Louis Michel, Philippe Monfils, bien sûr Didier Reynders, sa famille – et bien sûr Georges-Louis Bouchez qui ne l’a pas connu, mais en vante les mérites visionnaires… sans manquer de parler de ses propres propositions. Là encore, le style est soutenu, le montage agréable, mais le ton panégyrique.

Le MR, avec DreamMR, risque de ne convaincre que les convaincus.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire