La Grand-Place de Courtrai en plein jour © Getty

Mort d’un homme à Courtrai : pourquoi personne n’est intervenu?

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Le 3 octobre dernier, peu après minuit, un homme a fait un malaise sur la Grand-Place de Courtrai. Les secours, alertés deux heures plus tard, n’ont pu que constater son décès. Pourtant, sur les caméras de surveillance, on voit huit personnes passer à côté de lui et l’ignorer.

Le parquet de Courtrai, qui a pu identifier certains passants, a dressé un procès-verbal pour négligence coupable, et a ouvert une enquête. En théorie, les passants risquent une peine de prison de huit jours à un an et une amende de 500 euros.

S’il peut paraître aberrant que personne ne soit intervenu en voyant l’homme inanimé par terre, il s’agit d’un phénomène classique selon les psychologues. Interrogé par le quotidien De Morgen, le professeur en psychologie sociale, Frank Van Overwalle (VUB) estime qu’il s’agit d’un cas de responsabilité partagée. C’est ce qu’on appelle aussi l’effet spectateur, plus il y a de témoins, plus on a tendance à rejeter la responsabilité sur d’autres.

« De plus, les gens n’ont peut-être pas toutes les informations. Ils voient quelqu’un couché par terre. Et le sentiment que d’autres ne sont pas intervenus sur-le-champ peut suffire pour décider de ne rien faire. Après coup, on regrette très fort cette décision, mais c’est trop tard », déclare le professeur Paul van Lange (Université Libre d’Amsterdam).

Pourtant, dans le cas présent, il n’y avait pas beaucoup de témoins, et on pourrait croire que le centre de Courtrai, généralement assez désert la nuit, incite les passants à se montrer plus attentifs. Les spécialistes soulignent le rôle de la peur et de l’association à l’ébriété. Les passants ont pu penser que la victime était simplement en train de cuver son vin. Selon Van Overwalle, les passants auraient réagi différemment, si l’incident avait eu lieu en plein jour, et si la victime avait été en costume.

Inutile d’accabler les passants

Interrogé par Krant van West-Vlaanderen, le professeur en psychologie sociale Arne Roets (Université de Gand) estime également qu’il est inutile d’accabler les passants. « C’est toujours facile de juger après coup, évidemment. Il me paraît improbable que chacun de ces passants ait réalisé que cet homme était mourant, qu’ils savaient ce qu’ils avaient à faire, et qu’ils n’ont délibérément rien fait. » « Imaginez-vous comment se sentent ces huit personnes, sachant qu’ils auraient pu évaluer cette situation différemment », ajoute-t-il.

Reste à espérer que même s’il s’agit d’un phénomène psychologique « normal » et qu’il est très facile de juger ces passants, cet incident tragique incite à réagir différemment.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire