A vous marques. Prêts? Partez! Les enfants du cours de Molembike font la course sur l'esplanade de Tour et Taxis. © Stagiaire Le Vif

Molembike : « Je suis tombée de mon vélo, mais j’ai la volonté de continuer »

Stagiaire Le Vif

L’association Molembike propose des cours pour apprendre à rouler à vélo, à des femmes essentiellement. De nombreuses débutantes y trouvent l’occasion pour se mettre au vélo, et pour faire des rencontres. Reportage dans une communauté qui s’est créée autour du vélo.

Le premier tour entier de pédale semble être le plus difficile. De relever le pied de terre en s’élançant, le mettre sur la pédale et la faire tourner, alors que l’autre pied a déjà fait la moitié du tour. Aux premiers essais, au moment de mettre le pied sur la pédale pour la faire tourner, Lina remet le pied à terre. Elle une quinzaine d’années, et c’est la première fois qu’elle vient au cours des hirondelles de Molembike, organisé par Riet Naessens. Après plusieurs tentatives de démarrage, elle arrive à faire tourner le pédalier, et à avancer quelques mètres. Elle commence à trouver l’équilibre, et bientôt elle perce le mystère et fait le tour de l’esplanade de Tour et Taxis. En montée, en descente, entre les pots de fleurs et les barrières. Ce n’était pas sorcier.

Ouafa, la quarantaine, en est à sa troisième participation. A la séance précédente, elle était tombée, prenant un coup de guidon dans les côtes, et la pédale dans le genou. « Mais j’ai le courage et la volonté de continuer », affirme-t-elle. Au cours du jeudi, elle parcourt l’esplanade, confiante. « J’ai encore du mal à tourner à droite, à garder l’équilibre pour tourner à droite ». A terme, Ouafa veut pouvoir rouler dans le trafic, même si elle en appréhende encore la dangerosité. « Je m’entraîne sur la petite allée. Il faut que j’arrive à rouler droit, comme sur une piste cyclable. »

Le déclic pour se mettre à la bicyclette lui est venu en juillet, lors des vacances. Au camping, dans le Sud de la France, tout le monde se déplaçait à vélo. « J’ai tout dû faire à pied, pour aller à la plage etc. Je me suis dit que je devais aussi me mettre au vélo. » A son retour à Bruxelles, elle tombe sur Riet, qui emmenait son groupe de cyclistes dans les rues de Jette, pour leur apprendre à rouler dans le trafic. Ouafa l’arrête, et se renseigne pour participer.

Françoise, la quarantaine, n’en est pas à son premier essai non plus. Mais elle reste incertaine sur un vélo, même si elle a moins peur que la première fois. « Je ne veux pas apprendre à faire du vélo pour rouler dans le trafic. J’ai peur d’embêter les autres cyclistes sur les pistes. Non, j’apprends pour pouvoir faire du vélo à Ostende. »

Une dame plus âgée est au cours pour une première fois aussi. Timide, elle n’ose pas se prononcer devant la presse. Pour sa première journée, elle fait des exercices d’équilibre, comme marcher avec le vélo entre les jambes, ou faire comme de la trottinette, un pied sur la pédale, pour monter sur le vélo en mouvement. Sans monter dessus ; c’est certes un exercice compliqué pour une première fois.

L'exercice de faire de la trottinette avec le vélo, puis de l'enjamber, semble difficile pour plus d'une participante.
L’exercice de faire de la trottinette avec le vélo, puis de l’enjamber, semble difficile pour plus d’une participante.© Stagiaire Le Vif

Les cours des hirondelles de Molembike se tiennent les jeudi et samedi après-midi. Le prix d’accès est de 10€, prix unique pour un nombre illimité de séances. Ce jeudi 10 septembre, 8 personnes sont au rendez-vous, dont un homme et une enfant. Un mélange cosmopolite et multiculturel, représentant l’Afrique du Nord majoritairement, l’Ile de la Réunion, l’Azerbaïdjan et la Belgique. Lors de la distribution des vélos, dans les sous-sols des hangars derrière le bâtiment Tour et Taxis, deux femmes avec quatre enfants rejoignent le groupe.

« C’était un peu chaotique au début aujourd’hui », concède Riet Naessens, l’organisatrice. « Il y avait des groupes à des niveaux différents, je n’ai pas pu me concentrer sur tout le monde. Des personnes ont dû partir plus tôt, et j’ai dû retourner déposer les vélos, laissant les autres cyclistes sans surveillance. Il y avait trop de monde aussi à gérer pour une personne, normalement mon fils m’aide, ou des femmes qui ont fait plusieurs cours aiment venir aider aussi. » A la fin de la séance, ne restaient plus que Lina et sa mère, la dame âgée et son amie. Riet a donc finalement pu assister les toutes nouvelles élèves.

Selon les jours, si le groupe se débrouille bien, les hirondelles s’aventurent plus loin dans le parc de Tour et Taxis, jusqu’aux stations Pannenhuis et Belgica, et s’essaient aussi à la montée. Pour la fin de la sortie, si les participantes ont le courage de s’y aventurer, le groupe revient par la route et fait l’expérience du trafic. Apprendre à rouler hors du trafic est une expérience que Soraya, mère de famille, apprécie. « Avant j’avais essayé avec une autre association, mais on m’a fait faire des descentes dangereuses à Forest, entre les voitures. J’étais paniquée », témoigne-t-elle à la fin de la séance sur l’esplanade.

Les cours de Riet ont commencé après le confinement, le 1er juin. Elle a envoyé des newsletters pour la reprise des activités de Molembike, et l’envie de se (re)mettre au vélo a attiré de nombreuses personnes. Le cours pour débutantes s’est organisé dans la foulée. Au-delà du cours, les hirondelles font aussi des excursions, comme à la forêt de Soignes, début septembre. Dimanche 13 septembre, elles participeront à la ballade féministe à Bruxelles, Women Bike The City.

Au-delà de l’apprentissage du maniement des deux-roues, Riet souligne le côté social des cours. « Nous sommes comme un mouvement de jeunesse. Un peu comme le cercle des poètes disparus, mais le cercle des cyclistes. Nous sommes vraiment une communauté multiculturelle, qui se rapproche grâce au vélo. Des femmes reviennent pour participer à d’autres activités, ou pour aider aux cours. »

Un atelier Do-it-yourself

Sponsorisée par Bruxelles Mobilité et des associations Bike for Brussels et Cyclo, Molembike est une initiative du Centre Communautaire Maritime (CCM), association culturelle à Molenbeek. Autre que des cours pour femmes débutantes, des cours pour apprendre à mieux rouler dans le trafic, à quoi faire attention, quel chemin emprunter pour se déplacer au travail par exemple, sont aussi donnés. L’association comprend aussi l’Atelier Vélo, au sous-sol du site Tour et Taxis.

Dans l'Atelier Vélo, les mécaniciens en herbe peuvent réparer eux même leur bicyclette.
Dans l’Atelier Vélo, les mécaniciens en herbe peuvent réparer eux même leur bicyclette.© Stagiaire Le Vif

« Nous allions ouvrir le 10 mars », se souvient Riet. Mais l’épidémie de coronavirus en a voulu autrement, et l’ouverture a été reportée au post-confinement. Le principe est simple : pour le prix d’un euro, les personnes peuvent réparer leur vélo en empruntant le matériel mis à disposition, et profiter des astuces des mécaniciens.

« Nous voulons aussi profiter de cet endroit pour créer de la cohésion sociale, pour réunir les habitants du quartier Maritime et les habitants des nouveaux complexes créés sur le site de Tour et Taxis. Le vélo a ce pouvoir rassembleur », explique Edoardo Luppari, responsable du Centre Communautaire et de l’atelier. Fin octobre, une exposition d’artistes molenbeekois devrait aussi voir le jour dans l’atelier et dans le hall d’accès.

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