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Minorités : nouveau coup de massue pour la Belgique

Michelle Lamensch Journaliste

L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (CE) a adopté, jeudi, un nouveau projet de résolution invitant ses Etats membres qui ne l’ont pas encore fait à signer et/ou ratifier la convention-cadre pour la protection des minorités nationales « sans réserves ni déclarations équivalentes à des réserves », et à retirer ces réserves, le cas échéant. Il en est de même pour le Protocole n° 12 à la Convention européenne des droits de l’Homme.

Le vote a été acquis par 32 voix pour (dont celles des députés MR, Damien Thiéry, et PS, Christophe Lacroix) 2 contre (dont celle du député sp.a Dirk Van der Maelen) et 12 abstentions.

La Belgique est concernée à ce double titre. Elle se voit à nouveau tancée par le Conseil de l’Europe, qui réunit 47 Etats du continent… et que la Belgique a présidée en 2015.

La convention-cadre pour la protection des minorités nationales (1998) prévoit d’accorder à ces minorités le libre exercice de droits politiques et culturels. Les francophones en Flandre, les néerlandophones à Bruxelles et les germanophones en Wallonie. Les premiers d’entre eux, niés comme minorité, sont exposés aux refus répétés de la Flandre de leur reconnaître pareils droits.

Le Protocole n°12 à la convention européenne des droits de l’Homme vise, lui, une interdiction générale de discrimination, que les personnes aient été ou non reconnues comme minorités.

La Belgique a signé (1) la convention-cadre mais ne l’a pas ratifiée (2) au sein de ses parlements régionaux. De même, notre pays a signé (3) le Protocole n°12 mais ne l’a pas ratifié (4).

En 2006, le CE avait battu le rappel auprès des pays défaillants. Il déplore qu’aucune nouvelle ratification ne soit intervenue depuis lors. Le rapport présenté jeudi à Strasbourg par le député roumain Viorel Riceard Badea (PPE) entend « dépolitiser des questions qui devraient être traitées sous l’angle des droits de l’Homme universels. » Il considère les deux instruments internationaux comme « un moyen de garantir la stabilité, la sécurité démocratique et la paix sur l’ensemble du continent. »

Notre pays a ignoré les multiples invitations

M. Badea reproche à la Belgique de n’avoir « pas répondu au questionnaire adressé en 2017 aux Etats en défaut et de n’avoir envoyé personne à l’audition tenue à Bucarest, cette année-là. (…) Il est regrettable, poursuit le rapporteur, que la Belgique n’ait pas répondu aux invitations multiples à entrer en dialogue autour de ce sujet important. »

« Lors de cette audition, à Bucarest, se réjouit Damien Thiéry, la présidente du comité consultatif de suivi de l’application de la convention-cadre, Petra Roter, nous a confirmé que la définition du mot ‘minorité’ ne pouvait être un frein à la ratification de la convention-cadre. »

M. Badea se félicite toutefois de la « reprise des réflexions internes concernant la définition des minorités nationales dans le contexte belge », au sein du groupe de travail de la conférence interministérielle de politique étrangère, présidée par le ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders (MR). M. Badea invite le nouveau président de ce groupe de travail, Bernard Hauwen, à assurer, « parmi ses premières tâches », un suivi approprié aux décisions déjà adoptées par ce même groupe de travail. A savoir rencontrer notamment des associations de la société civile, dont l’Association pour la promotion de la francophonie en Flandre. Ce qui est chose faite.

« Plusieurs membres de ce groupe de travail, insiste Damien Thiéry, ont estimé utile d’organiser une rencontre à Bruxelles avec le comité de suivi afin d’évaluer les éventuelles implications de la ratification de la convention-cadre sur la législation belge relative à l’emploi des langues en matière administrative. Cela nous permettrait d’avancer sérieusement. Je vais demander au président Hauwen d’organiser une rencontre. »

Paradoxe : la définition préalable, en interne, du concept de minorités nationales était l’une des deux réserves émises par la Belgique lors de la signature de la convention-cadre. Réserves que le CE invite précisément notre pays à retirer…

Michelle Lamensch

(1) Contrairement à la France, Monaco, Andorre et la Turquie

(2) Au même titre que la Grèce, l’Islande et le Luxembourg.

(3) Contrairement à la France et Monaco.

(4) Au même titre que la Grèce, l’Islande et la Turquie.

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