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Loi de financement : une brèche pour la N-VA ?

Dans le nouveau modèle de loi de financement, les recettes régionales dépendront davantage du bon fonctionnement de l’administration fédérale. Un enjeu pour les nationalistes flamands ?

Entre la théorie et la pratique, il y a toujours une part d’inconnue. Ainsi la loi de financement aura-t-elle des répercussions qu’on ne soupçonne pas ? Au sein de l’administration fédérale des Finances, certains fonctionnaires s’interrogent sur les effets de l’autonomie fiscale. Sujet de leur préoccupation : dans le modèle qui vient d’être dessiné par les huit négociateurs, les recettes régionales dépendront plus que jamais du bon fonctionnement du fisc. Cela pourrait vite devenir un sujet de prédilection pour la N-VA…

Selon ces fonctionnaires soucieux de l’avenir, les montants alloués aux Régions, dans l’actuel système de dotation du fédéral, sont relativement stables. Dans le futur régime, un tiers de l’impôt des personnes physiques dépendra directement des Régions tout en étant toujours prélevé par le fédéral : les montants évolueront, dès lors, en fonction de paramètres qui ne jouaient pas jusqu’ici. Notamment celui du nombre de contribuables qui ne rendent pas leur déclaration d’impôt.

Selon les chiffres que nous avons pu récolter, à Bruxelles, près de 12 % des contribuables n’avaient toujours pas rendu leur déclaration, en avril dernier, alors qu’ils auraient dû le faire pour juin 2010. Soit plus d’un contribuable sur neuf ! Or l’objectif de la direction des Finances était de ne pas dépasser le seuil des 5 %. En Wallonie, la proportion varie de 7 à 8 %, dans trois directions régionales sur cinq et elle se situe en dessous de 5 % dans les autres. En Flandre, cela oscille entre 2,5 et 3 % dans cinq directions régionales sur six : dans une direction anversoise, le taux des non-déclarants dépasse les 5 %.

A l’avenir, les montants des recettes régionales dépendront aussi de l’efficacité du contrôle fiscal. Celui-ci se fait en fonction de filtres de sélection qui sont actuellement réévalués. Or les objectifs de contrôle de gestion des dirigeants d’entreprise (100 % de contrôle des déclarations sélectionnées et 65 % de rectifications) ne sont atteints que dans trois directions régionales sur treize. Idem pour les contrôles des indépendants, professions libérales et commerçants : les objectifs ne sont atteints que dans quatre directions régionales.

On observera que le fonctionnement du fisc a déjà des répercussions directes sur les recettes régionales, puisqu’une série d’impôts régionaux (droits d’enregistrement, taxes sur les jeux et paris, taxes de circulation, etc.) sont prélevées par l’administration fédérale. De sérieux problèmes ont d’ailleurs déjà été constatés par le passé, notamment à Bruxelles en ce qui concerne le précompte immobilier. Aujourd’hui, avec la part de l’IPP qui revient directement aux Régions via les additionnels, la masse des revenus et des contribuables est beaucoup plus importante. Les répercussions d’un éventuel mauvais fonctionnement du fisc aussi.

Régionalisation totale de l’administration fiscale ?

Voilà une brèche dans laquelle la N-VA risque bien de s’engouffrer. D’autant que le parti nationaliste fait partie du gouvernement flamand mais ne siégera pas au sein de l’exécutif fédéral. Il pourrait tenter de multiplier les procédures en conflit d’intérêts entre le gouvernement fédéral et les entités fédérées. Il pourrait également y trouver des arguments pour réclamer la régionalisation totale de l’administration fiscale.

Révélateur : début octobre, le ministre flamand des Finances Philippe Muyters (N-VA) s’est réjoui d’avoir vu son administration reprendre au fédéral, le 1er janvier dernier, la perception des taxes de circulation. Il a ainsi pu envoyer onze équipes de contrôleurs sur les routes du nord du pays. « Contrairement à leurs prédécesseurs du service public fédéral, ceux-ci vérifient de manière systématique s’il n’y a pas de dette fiscale latente », a déclaré le ministre. Le fisc flamand a ainsi déjà pu récolter près de 340 000 euros de contributions impayées.

Thierry Denoël

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