© BELGA - YORICK JANSENS

Libye : un pilote de F-16 belge témoigne

Depuis le début de la semaine, la Belgique participe, avec ses six F-16 basés à Araxos, en Grèce, à l’opération menée par la coalition en Libye. Pilote de F-16, « Mickey » évoque la mission belge « Freedom Falcon » dans le ciel libyen.

Qui décide d’envoyer les chasseurs-bombardiers belges dans le ciel libyen ? Qui détermine leurs objectifs ? Les F-16 belges devront-ils se contenter de missions d’interception ou participeront-ils à des frappes air-sol ? Un pilote belge de F-16, qui s’attend à partir sous peu en opération, nous répond. Pour des raisons de sécurité, il nous demande de préserver son anonymat et de l’appeler « Mickey ».

LeVif.be : Participer à une opération de guerre en Libye, c’est, pour un pilote de F-16, une responsabilité et un stress différents de ce qu’on ressent lors d’une simple mission d’entraînement ?

« Mickey » : Les Belges ne le savent pas assez, mais nous avons en permanence, en Belgique, deux pilotes de F-16 prêts, 24 heures sur 24, à décoller pour contrer toute menace de type « 11-Septembre ». Plusieurs fois par an, nous sommes confrontés à des appareils qui pénètrent dans le ciel belge sans répondre aux demandes d’identification. La mission actuelle d’interception dans le ciel libyen est de ce type. Il n’y a donc pas vraiment de stress supplémentaire, même si nous avons conscience de ne plus être en entraînement. Si nous devons appuyer sur le bouton, nous connaissons les conséquences de ce geste.

Le souci principal, c’est la coordination des forces engagées par les pays de la coalition ?

Tout à fait. Cette coordination est très complexe, mais bien rodée. Nous participons régulièrement à des exercices internationaux. L’argent investi dans ces exercices peut paraître énorme, mais on se rend compte, aujourd’hui, de son utilité. Notre force aérienne, c’est comme une assurance : tant qu’on ne s’en sert pas en situation de conflit réel, elle semble coûteuse et inutile, mais quand on a besoin d’elle…

Vous préparez-vous à rejoindre vos collègues engagés dans la mission belge « Freedom Falcon » ?

Tous les pilotes opérationnels belges sont susceptibles de partir en opérations. Il faudra assurer la relève de nos collègues. Nous disposons de six F-16 sur la base militaire grecque d’Araxos, mais les patrouilles sont toujours composées de quatre appareils. Si la mission se prolonge, comme c’est le cas en Afghanistan, il faudra effectuer des rotations, pour pouvoir assurer la maintenance des avions, réparer les pépins. Il nous reste, en réserve, une vingtaine de F-16 opérationnels.

Les F-16 belges ont assuré, ces jours-ci, des missions air-air de surveillance. Dimanche dernier, deux C-130 ont acheminé des munitions à Araxos, dont des bombes pour nos chasseurs-bombardiers. Quand les F-16 participeront-ils à des attaques air-sol pour neutraliser des éléments de défense aérienne et d’autres objectifs militaires libyens ?

Pour le moment, nous faisons ce que l’on appelle de la « police aérienne », pour faire respecter la zone d’interdiction aérienne et l’embargo sur les armes. Nous devons empêcher tout appareil de menacer des civils, sur la côte libyenne, mais aussi dans l’intérieur du pays.

A la Royal Air Force, on estime que l’aviation libyenne n’existe plus comme force de combat. Les risques d’affrontements entre les F-16 belges et des avions libyens ne sont-ils pas quasi inexistants ?

Vous avez tout compris. Vu la présence des forces de la coalition dans le ciel libyen, il y a peu de chance que l’aviation de Kadhafi se manifeste. Mais le risque zéro n’existe pas. Et il y a aussi les hélicoptères.

La question du commandement des opérations en Libye reste pendante. Concrètement, qui décide de faire intervenir les F-16 belges ? Qui fixe les objectifs de chaque intervention ? Les Américains ?

Non, c’est la coalition. Tous les participants travaillent dans la même direction.

Mais encore ?

Les opérations belges sont décidées à Ramstein, en Allemagne. Au sein de ce centre de commandement, un responsable militaire belge décide si oui ou non la mission qui nous est impartie est dans les limites de ce que l’on peut faire. Il tient compte de nos capacités et des règles d’engagement fixées. Si nécessaire, il alerte le QG à Bruxelles.

Entretien : Olivier Rogeau

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