Lettre de Sylvie Lausberg, présidente du Conseil des femmes francophones de Belgique, à Paul Magnette: « Enrayez la violence faite aux femmes »

Le Vif

Cher Paul Magnette,

Le premier des droits humains est le droit à l’intégrité physique. En Belgique, la lutte contre les violences envers les femmes doit devenir une priorité nationale. Pour que les filles et les femmes puissent vivre sans crainte d’être agressées, violées, frappées, battues, assassinées.

La réponse ne peut pas être uniquement institutionnelle ou pénale. L’Etat belge, comme il s’y est engagé en ratifiant la Convention d’Istanbul (1), doit mettre en place des politiques concertées, prendre des mesures de prévention, de protection et assurer la poursuite des agresseurs.

Les réponses, les dispositifs, le maillage géographique pour que chaque femme puisse bénéficier d’une vie à l’abri des violences, doivent être élaborés avec les associations de terrain et concerner tous les domaines : formation des magistrats et des policiers, éducation à l’égalité à destination des jeunes – mais pas seulement ! — campagnes de sensibilisation, etc. pour que partout, chaque fois qu’un acte de violence se produit, il y ait une réponse adéquate, la plus rapide possible. Ce doit devenir un réflexe et on est loin du compte puisque les femmes cibles de violence sont souvent rejetées, isolées et leur parole mise en doute. Sur le terrain, les asbl qui mettent des refuges à disposition sont débordées ; il n’y a pas assez de places d’accueil, ni de services de première ligne. Ces associations doivent endosser d’énormes responsabilités ; leur financement structurel est indispensable.

En plus du coût humain, le coût financier des violences envers les filles et les femmes est énorme. Leurs répercussions affectent tous les domaines et tous les secteurs. Santé, justice, enseignement, mais aussi le budget. En Belgique, on recense 40 000 procès-verbaux par an pour violences entre partenaires, chiffre qui ne représente que 15% des faits. Leur coût, rien que dans le monde du travail, est évalué à 388 millions d’euros par an.

Nous demandons d’inverser la tendance, comme en Espagne, où le nombre de féminicides a été divisé par trois en dix ans. Le coût global de ces violences doit être évalué. Nous demandons que cet argent soit investi en amont, par tranche, sur une période de cinq ans renouvelables, période au terme de laquelle les résultats obtenus pourront être analysés afin d’améliorer ce qui a été mis en place. Enrayer la spirale des violences envers les filles et les femmes est un premier pas vers l’éradication de ce fléau généralisé, indigne d’une démocratie. »

  • La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à égard des femmes et la violence domestique ratifiée en 2016

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire