Ceux qui restent persuadés que l’importance du covid est exagérée par les politiques et les médias et qui continuent à s’affranchir des règles collectives malgré le désastre sanitaire sont responsables de morts. C’est indéniable.
Le (re)confinement n’est drôle pour personne. Ni pour vous, ni pour moi, ni pour le médecin ou l’infirmière qui, le soir, ne peut même pas essayer d’oublier les horreurs du jour en buvant un verre avec des amis. Mais, en situation de guerre, on n’a pas le choix. Or, « nous sommes en guerre », comme l’a dit le président français dès le mois de mars. L’ennemi est invisible mais il tue, sûrement et de plus en plus rapidement si on le laisse faire. L’équation est simple. Cela n’empêche pas de rester vigilant par rapport à l’action de nos gouvernants. Pourtant, certains ne la comprennent pas cette élémentaire équation. Ou ne veulent pas la comprendre. Ils l’avouent, voire le clament haut et fort, dans la rue (masque ôté), sur les réseaux sociaux ou en faisant la file devant Ikea ce week-end.
Ils sont sceptiques ou égoïstes. Ou les deux (souvent, l’un ne va pas sans l’autre). Et ils tuent. Le constat est sévère mais c’est indéniable. Car, en ne respectant pas les règles sanitaires et le bon sens face à la deuxième vague qu’on sait désastreuse, ils boostent les contaminations et, sans aucun doute, les décès en bout de course. Les chiffres sont là, transparents, impitoyables, obligeant désormais les hôpitaux à faire des choix entre malades à sauver. La lassitude par rapport aux mesures prises ne doit pas être une excuse. Ceux qui n’y croient pas se ferment les yeux juste pour pouvoir continuer à vivre comme avant, dans l’indifférence des drames qui se jouent non loin d’eux, mais pas suffisamment près pour qu’ils en acceptent l’ampleur. Le jour où eux-mêmes ou leur épouse, leur père seront en danger, ils seront moins convaincus que le prix de la liberté est plus grand que celui de la vie.
« Que les sceptiques signent une décharge! »
Ces égoïstes et ces sceptiques, à l’évidence en bonne santé ou asymptomatiques, sont doublement responsables. Parce que, face à leur discours et leur influence, le personnel soignant baisse les bras. Réflexion d’infirmiers devenue banale: « A quoi bon se crever à sauver des vies si les gens ne font aucun effort et remettent en cause ce qu’on endure à l’hôpital? ». On entend aussi des médecins suggérer que les sceptiques signent une décharge pour ne pas encombrer les services de soins intensifs, au cas où ils attraperaient le virus en développant des complications suffisamment sévères que pour les y envoyer. « Qui veut signer? », demandent les toubibs. Le découragement inquiétant dans les hôpitaux est à la hauteur de l’égoïsme ambiant.
Sans parler des secteurs économiques qui souffrent le plus du confinement. Moins les mesures pour calmer la pandémie seront respectées, plus le confinement durera et fera des dégâts. Ici aussi, l’équation est simple mais incomprise par ceux qui ne pensent qu' »à passer du bon temps et au diable le reste! ». La crise du covid, avec ses conséquences difficiles, est révélatrice de l’état d’empathie d’une société. Or l’empathie, au-delà de notre cercle restreint, est justement ce qui différencie l’homme de l’animal. Le degré d’empathie est également un marqueur de notre niveau de civilisation (relisez l’essai de Jeremy Rifkin sur le sujet). Ce sont les révolutions successives des communications dans l’histoire qui ont facilité l’universalisation grandissante de l’empathie. Or on n’a jamais autant communiqué qu’aujourd’hui. Mais il y a toujours des résistants au progrès…
Une nouvelle conscience pour un monde en crise, vers une civilisation de l’empathie, Jeremy Rifkin, Babel éd.