Le PS est-il le parti belge dominant ? (fact-checking politique)

Nicolas De Decker
Nicolas De Decker Journaliste au Vif

« Les Partis politiques en Belgique », un ouvrage publié par des politologues du Centre d’étude de la vie politique de l’ULB, vient d’être publié. Cette « bible » analyse la politique belge et ses évolutions sous toutes les coutures. Le Vif en a tiré 50 questions. Dont celle-ci : le PS est-il le parti belge dominant ?

Non

A l’échelle de la Belgique et de son histoire, le Parti socialiste est incontestablement un acteur politique important. Mais il n’a jamais été dominant que dans des sous-systèmes: la Belgique a été construite, façonnée et dominée par le Parti catholique et ses successeurs. Les biais, ici, se forment sur l’espace et sur le temps. Sur l’espace, tout d’abord, puisque cette domination catholique ne s’est jamais exercée par les urnes wallonnes et bruxelloises, et que, depuis la fédéralisation de la Belgique, le Parti socialiste domine très largement les exécutifs wallon (il y a exercé la ministre-présidence de 1982 à 1985, puis de 1988 à 2017, puis à nouveau depuis 2019), bruxellois (il siège au gouvernement de la Région depuis 1989, sans discontinuer, et n’a cédé la ministre-présidence qu’entre 1999 et 2004) et de la Fédération Wallonie-Bruxelles (il y a exercé la ministre-présidence de 1981 à 1985, puis de 1988 à 1999, puis de 2004 à 2019). Et il a été de tous les gouvernements fédéraux de 1988 à 2014.

Il faut ensuite regarder un peu plus loin, vers cette Flandre majoritaire, un peu plus haut, vers le 16, rue de la Loi, mais aussi beaucoup plus en arrière, pour cerner l’ampleur de la domination catholique sur le système politique. C’est en effet un mandataire du Parti catholique, devenu Bloc catholique, puis PSC – CVP, qui a dirigé tous les gouvernements belges de 1884 à 1937, puis de 1958 à 1973 et de 1973 à 1999. En Flandre, dans les années 1950 et 1960, les « tsjeven » (sobriquet flamand, équivalent de notre « calotin ») dépassent les 50% des suffrages à chaque élection législative, avec un pic à 60% en pleine affaire royale, en 1950, ce qui leur permet de choisir, au gouvernement, le partenaire le plus commode, quand bien même en Wallonie, le PSC ne pesait que rarement plus d’un quart des voix. Cette domination, aujourd’hui oubliée des francophones, fait partie du lointain passé de la Flandre: le CD&V n’est plus le premier parti flamand, donc belge, depuis 2010. Mais ses traces seront au moins aussi éternelles que la Belgique et ses « libertés subsidiées », de l’organisation de son enseignement, entre réseaux, à celle de sa sécurité sociale, entre partenaires sociaux. Les Belges sont tous des « tsjeven ». Même quand ils ne parlent pas flamand.

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