Jan de Zutter

« La N-VA s’est-elle battue pour la défense des valeurs européennes? Non, certainement pas »

Jan de Zutter Porte-parole de la fraction sp.a au parlement européen

Le président de la N-VA Bart De Wever nous explique ce que nous avons à défendre : l’Europe, les valeurs européennes et la citoyenneté éclairée, écrit Jan de Zutter, « mais ce n’est pas ce que fait son parti au parlement européen ».

On ne nous octroie pas de repos. Pas même pendant les vacances d’été, car « celui qui ne veut pas se battre devra vivre à genoux ». La métaphore de l’homme agenouillé est un échantillon de cynisme comme seul Bart De Wever peut en inventer, car la phrase est empruntée au révolutionnaire mexicain de gauche Emiliano Zapata: « Mejor morir de pie que vivir toda una vida arrodillado, mieux vaut mourir debout que vivre toute une vie à genoux ». C’est ainsi qu’on connaît notre nounours anversois.

Oublions un instant la rhétorique belliqueuse du président de parti et bourgmestre pour nous demander si nous ne devons pas en effet défendre un peu plus énergiquement les valeurs que nous représentons. Poser la question, c’est évidemment y répondre. De Wever nous explique ce que nous avons à défendre : l’Europe, les valeurs européennes et la « citoyenneté éclairée », où les notions telles que la dignité humaine, l’humanisme, l’état de droit, la liberté d’expression, les libertés et droits individuels, bref un résumé du préambule du Traité européen, passent en revue. Il est frappant que De Wever ne tombe pas dans le piège du chou-fleur à la sauce blanche et ne tienne pas de discours de valeurs nationalistes. Rien de flamand. Quand il parle du « Ceux qui ne veulent pas se battre », il parle bel et bien de l’Europe et du citoyen européen. Un bon point pour lui.

Le 12 avril 2016, le rapport intitulé « Apprendre l’Union européenne à l’école » a été présenté au vote au parlement européen. Passé inaperçu dans la presse, ce rapport exprime une position importante sur l’intégration de la dimension européenne dans l’enseignement. Les valeurs européennes fondamentales et les valeurs clés figurent plusieurs fois dans le rapport. Selon le rapport, « l’éducation a notamment pour objectif de préparer les individus à la vie et à la citoyenneté active dans des sociétés de plus en plus complexes, exigeantes, multiculturelles et intégrées » et souligne qu' »une dimension de l’Union dans l’éducation est capitale afin d’aider les citoyens à mieux comprendre l’Union (…), et peut approfondir le rôle des valeurs énoncées à l’article 2 du traité UE… ». L’article 2 stipule : « L’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’État de droit, ainsi que de respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l’égalité entre les femmes et les hommes. »

La N-VA se comporte comme une anguille dans un seau de morve : elle est insaisissable

Renfonçons une porte ouverte et répétons la question de Bart De Wever: ne devons-nous pas davantage défendre davantage ces valeurs ? Certainement. La N-VA s’est-elle battue pour ces valeurs au parlement européen ? Non, certainement pas. Bien au contraire. La N-VA a fait ce qu’elle fait toujours quand il faut défendre une dimension européenne: s’abstenir la queue entre les jambes. Representé par Gerolf Annemans, le Vlaams Belang est plus clair : ce parti ne veut rien savoir de ces histoires de droits de l’homme, la non-discrimination politiquement correcte, la solidarité bisounours de gauche, etc. Annemans a voté contre. La N-VA utilise la stratégie ni chair ni poisson et sur le plan de la défense des valeurs européennes elle se comporte comme une anguille dans un seau de morve : insaisissable. Elle s’abstient. On ne peut jamais dire qu’ils sont contre cette dimension européenne dans l’enseignement, mais on ne peut pas prétendre non plus qu’ils sont pour. Ce qu’on peut dire, c’est qu’ils ne se sont pas battus.

Pourtant, il y a des petits bijoux dans le rapport qui doivent plaire à l’historien De Wever, fasciné par les Romains et depuis peu par les hoplites. « Le parlement souligne l’importance et le potentiel d’une approche européenne sur l’enseignement de l’histoire (…) puisque certains événements historiques ont joué un rôle déterminant dans l’émergence des valeurs et des idéaux européens; la Commission et les États membres demandent de soutenir les sociétés historiques et les centres de recherches historiques, afin de valoriser leur contribution scientifique à l’histoire européenne et leur rôle dans la remise à niveau des enseignants. »

Nous avons désappris à être fiers de notre identité, fulmine De Wever. C’est vrai. La N-VA est si peu fière des valeurs européennes qu’elle est incapable de se battre pour faire enseigner ces valeurs dans les états membres. Est-ce, comme l’écrivait De Wever, « l’élite qui embrasse la non-identité », qui a rejeté ces valeurs dans le parlement européen ? Non, cette prétendue élite a voté pour un enseignement qui veut enseigner une meilleure compréhension de la citoyenneté européenne, l’histoire européenne et les valeurs européennes. C’est le parti de Bart De Wever qui embrasse la non-identité dans le parlement européen et ne se bat pas pour enseigner ce que nous représentons à nos jeunes.

« Éprouver du respect et exiger du respect pour les valeurs européennes n’est pas une expression de supériorité déplacée » déclare De Wever et je le cite avec grand plaisir. C’est quelque chose pour laquelle, nous devons nous battre activement en enseignant les valeurs européennes aux jeunes depuis leur plus jeune âge. La N-VA ne le souhaite pas et risque donc de vivre à genoux.

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