© Belga

La Belgique francophone est malade de sa cacophonie, pas que du coronavirus (humeur)

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Les mesures disparates et le chaos des tests sont dingues alors que les contaminations explosent. Et le ministre-président wallon ne voit rien qui cloche…

La situation sanitaire en Belgique francophone est plus que préoccupante. Ensemble, Bruxelles et la Wallonie se trouvent désormais dans le peloton de tête des contaminations au niveau européen. Or, les mesures de restrictions prises par les autorités ressemblent à la maison Kafka: dispersées, peu compréhensibles, mal communiquées, non centralisées…

« Les bourgmestres sont excédés, lançait notamment cet après-midi la bourgmestre de Jurbise, Jacqueline Galant (MR), au parlement wallon. Il faut absolument une communication claire si on veut faire respecter les mesures. » Pour le moins… A cela, le ministre-président wallon Elio Di Rupo (PS) a répondu: « Il n’y a pas de cacophonie. On ne vit qu’à un seul endroit, dans une seule province et on applique les mesures de l’endroit où l’on vit. »

On croît rêver, on se pince, en réalité.

Car que constate-t-on alors que le virus galope à nouveau, et ceci n’est pas une liste exhaustive?

Les gouverneurs des provinces envisagent à la fin de la semaine passée d’instaurer un couvre-feu sur les provinces wallonnes, mais ils reportent la décision, faute de garanties juridiques quant à la proportionnalité de la mesure. Soit, mais l’information a fuité dans la presse, semant le trouble dans la population.

En début de semaine, deux provinces font cavalier seul et décrètent ledit couvre-feu, de 1h à 6h du matin. C’est le cas dans le Brabant wallon, on peut encore le comprendre vu les chiffres et la présence d’une ville universitaire, mais aussi dans la province du Luxembourg. Ils sont nombreux, évidemment, à se demander quelle vie nocturne dangereuse se joue -là-bas. Les trois autres provinces, dont celles de Liège ou du Hainaut, ne suivent pas le mouvement alors que les principales villes wallonnes se trouvent sur leur territoire.

Aujourd’hui, à l’issue d’une réunion dans le Hainaut, voici ce que bourgmestre Maxime Daye (Braine le Comte), par ailleurs président de l’Union des villes et communes de Wallonie, tweete: « Réunion avec le gouverneur, unanimité des bourgmestres du Hainaut pour attendre le comité de concertation de vendredi avant de (re)prendre des décisions à l’échelle locale. Les citoyens demandent de la clarté et le fédéral doit jouer ce rôle vu les chiffres. »

https://twitter.com/maximedaye/status/1316373153321488385Maxime DAYEhttps://twitter.com/maximedaye

L’affichage de ce contenu a été bloqué pour respecter vos choix en matière de cookies. Cliquez ici pour régler vos préférences en matière de cookies et afficher le contenu.
Vous pouvez modifier vos choix à tout moment en cliquant sur « Paramètres des cookies » en bas du site.

550rich3153600000Twitterhttps://twitter.com1.0

Tiens donc, mais il n’y a pourtant pas de cacophonie…

Ajoutons ceci: le fédéral avait annoncé lors du Conseil national de sécurité que le port du masque ne serait plus obligatoire en rue, mais il y a évidemment eu des mesures particulières dans les villes, et un reportage de la RTBF montre des policiers liégeois courant d’une personne à l’autre pour rappeler qu’il est bien obligatoire. Dans les rues de Louvain-La-Neuve, des étudiant expliquent en s’embrassant à tout-va, masques baissés, qu’il est difficile de garder les distances sociales en rentrant à la maison. Un drôle de sens des responsabilités, épingle la VRT, qui se demande pourquoi l’épidémie flambe davantage du côté francophone. Ah, et les étudiants le disaient ces derniers jours: des bars à Louvain-La-Neuve sont bondés avec des étudiants venus de Bruxelles, où les bars sont fermés.

Par ailleurs, cela tangue toujours entre cafés réprimés et restaurants autorisés, alors que d’autres pays (Pays-Bas, Espagne) s’en prennent aux deux. Il s’agit d’ailleurs pour les policiers de s’arracher les cheveux pour faire comprendre la distinction entre les cafés, les bars et les endroits où l’on peut « manger un petit bout » parce que tout cela n’est pas très clair.

Ce n’est pas tout: les longues files devant les centres de tests imposent à des potentiels cas de Covid de se présenter plusieurs fois ou de rebrousser chemin. Le chaos, là aussi: le personnel qui encadre est débordé et les retards s’accumulent, ce qui doit bien faire rire le virus.

N’en jetez plus? Les décisions concernant le sport amateur ne sont pas les mêmes entre la Wallonie et Bruxelles, et les fédérations elles-mêmes ne savent pas sur quel pied danser.

Les universités annoncent à tour de rôle qu’elles passent en code orange, les écoles flamandes restent en code jaune, mais les francophones ne seront fixées sur leur sort que suite à une réunion, jeudi.

Mais attendez, bonnes gens, il y a un Comité de concertation, vendredi, qui devrait remettre de l’ordre dans tout cela et présenter le fameux baromètre avec des… codes couleurs pour s’adapter aux situations.

On appelle cela le « confinement intelligent » et la philosophe globale est sans doute bonne pour éviter un confinement globalisé comme ce fut le cas en mars-avril. Les responsables économiques prient d’ailleurs pour qu’on l’évite, faute de quoi ce serait une catastrophe sans nom. Mais la cacophonie est invraisembable et il n’y a pas un endroit, un seul endroit, où l’on centraliserait toutes les mesures.

Il est vai que l’on ne vit « que dans un seul endroit », mais juste à preuve du contraire, les déplacements sont encore autorisés. Et après cela, prétendez encore qu’il ne faut pas simplifier notre architecture institutionnelle…

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire