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La Belgique enregistre un nouveau record d’embouteillages

Le Vif

Le record d’embouteillages de l’année dernière a de nouveau été battu. Comment éviter que la Belgique ne soit tout à fait paralysée ? Enquête de nos confrères de Knack

L’humain est têtu et les usagers de la route belges ne sont pas une exception. Le week-end dernier, ils ont été des milliers à se rendre au Heysel à Bruxelles pour l’ouverture du 95e Salon de l’Auto. L’organisateur et la fédération professionnelle Febia étaient d’excellente d’humeur. Et pour cause, l’année dernière, la vente de nouvelles voitures a progressé de 10% par rapport à 2015, une hausse largement au-dessus de la moyenne européenne.

Peu de gens se sont attardés à un autre record enregistré l’année dernière : le vendredi 15 janvier 2016, suite aux chutes de neige, les embouteillages sur les autoroutes belges ont atteint pas moins de 582 kilomètres. Notamment à hauteur de la sortie 7a du ring de Bruxelles, où il y avait également de longues files pour la grand-messe annuelle de la reine Auto.

Pourtant, le 15 janvier 2016 n’était pas vraiment exceptionnel, relève le baromètre de files annuel de Touring Mobilis, consulté par Knack. Malgré l’hiver doux, l’année dernière, les embouteillages sur les autoroutes ont dépassé 15 fois les 350 kilomètres. Les embouteillages structurels – non causés par le mauvais temps ou les incidents – se sont également aggravés. L’année dernière, nous avons enregistré 1383 heures de 100 kilomètres d’embouteillages sur les routes belges, soit un petit 10% de plus que le record de 2015.

Le baromètre d’embouteillages confirme d’autres tendances. Les files s’élargissent, autant en temps qu’en espace. Au fond, le rapport corrobore ce que tous les usagers de la route ressentent. Les heures de pointe du matin et du soir se rapprochent, et les routes secondaires sont également saturées. Autrefois, l’E403 Bruges-Courtrai était une route déserte où l’on pouvait presque pique-niquer. Entre-temps, les embouteillages y sont quotidiens.

Nos confrères ont contacté plusieurs managers et dirigeants d’entreprises qui reconnaissent tous que les embouteillages dépassent les bornes. Et tous, ils adoptent une stratégie pour faire face au problème. Delhaize distribue des vélos à son personnel, et optimalise sa distribution grâce à des camions à double étage. Enersys, un producteur américain de batteries industrielles de réserve, déménage sa filiale BeLux dans le parc d’activités Malines-Sud. La sortie E19 du même nom est le lieu où pour beaucoup de collaborateurs, la misère commence. Aujourd’hui, les collaborateurs doivent régulièrement affronter une heure et demie d’embouteillages en accordéon entre Anvers et Evere.

Ninatrans dispose de 120 camions sur les routes belges. Dans ce cas, ils sont non seulement victimes, mais aussi coupables, diriez-vous. Le gérant Benny Smets, également président de la fédération professionnelle Febertra, n’a pas la même vision. « Tout le monde nous montre du doigt, alors que les camions ne représentent que 2% du parc automobile belge. Évidemment, la Belgique est un pays de transition. Si l’on additionne les camions étrangers, nous représentons 16% de la circulation routière. Ce n’est pas rien, mais il est clair que ce sont les voitures particulières qui sont vraiment problématiques. Je ne vois qu’une seule solution : une taxe kilométrique généralisée pour tous les usagers de la route. Plus de demi-mesures telles qu’une taxe kilométrique pour les camions que nous devons payer depuis le mois d’avril. Ils comptaient investir les recettes dans l’infrastructure, mais on ne voit guère de résultats. En réalité, c’est une taxe plate qui comporte beaucoup de tracasseries administratives, mais qui n’exerce pas d’impact sur la mobilité. »

Voies respiratoires

Le bourgmestre de Gand, Daniël Termont, a fait la meilleure sortie du débat sur la mobilité de ces derniers jours. « Les voies les plus importantes sont les voies respiratoires des Gantois », a-t-il déclaré lors d’une réception de Nouvel An sous le signe d’un plan de mobilité contesté qui bannit la voiture du centre-ville. Pour le professeur Dirk Lauwers, qui enseigne l’ingénierie de la circulation aux universités de Gand et Anvers, il est temps d’inverser la vapeur. « Commençons par cesser d’encourager fiscalement l’automobilité. 3 à 4 milliards de subsides indirects pour les voitures de société, c’est de la folie. Suivez l’exemple du Danemark où la possession d’une voiture est activement découragée par une taxe sur la plus-value de 80%. Les Danois ne croient pas au mythe que ce n’est pas la possession, mais l’utilisation de la voiture qui pose problème. « C’est absurde, celui qui possède une voiture, l’utilise ». Lauwers défend une taxe kilométrique généralisée et intelligente, avec des tarifs variables en fonction du lieu et du moment.

Cependant, il faut faire davantage pour éviter le scénario catastrophe d’une paralysie complète. Les transports publics doivent être beaucoup plus performants, et la politique d’aménagement du territoire doit être adaptée pour permettre une mobilité plus efficace. « C’est malheureusement l’inverse qui se produit », constate Lauwers. « Pour les nouvelles constructions, Anvers impose une norme de 1,2 place de parking par unité d’habitation. Ils attirent donc les voitures, et vont à l’encontre de toutes les tendances internationales. Paris mène une politique très dynamique pour réduire le nombre de voitures. Même chose à Amsterdam et Rotterdam, des villes comparables à Anvers. Je ne parlerai même pas d’Uplace, qui imposera 10 000 voitures supplémentaires à la Région bruxelloise le vendredi soir. Malheureusement, ce n’est pas un cas unique, même pour les investissements publics on ne tient pas compte de la mobilité. À Malines, on construit un nouvel hôpital régional, tout près du ring et loin du centre. Ce site doit remplacer trois hôpitaux existants, tous près des gares de Malines et de Duffel. Ce sera probablement dernier cri, mais sur le plan de la mobilité, c’est catastrophique. »

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