Anna Torma, Abandonned. C de l'artiste et Galleria MLF Bruxelles © Anna Torma et Galleria MLF Bruxelles

L’oeuvre de la semaine : Raconte-moi mon jardin

Guy Gilsoul Journaliste

Imaginez une maison traditionnelle de bois peinte en blanc battue par les vents au milieu d’un vaste paysage canadien de terre et d’eau. A l’intérieur, Anna Torma, la soixantaine tranquille, assise, brode comme le faisait ses ancêtres hongrois.

Anna Torma a 36 ans quand elle rejoint l’Ontario, 50 quand elle s’installe à Baie Verte aux confins de la Nouvelle Ecosse avec son mari et ses deux enfants. Depuis, par son art, elle se raconte des histoires comme on le fait, parfois, pour soi-même et sans projet narratif. Cela vient et va et brasse souvenirs et faits du jour à la manière d’une longue et paisible conversation. Pour ce faire, elle Convoque l’art traditionnel de son pays d’origine, le folklore, l’environnement domestique et l’imaginaire comme lorsque, dans la ferme de son enfance, elle dialoguait avec sa poupée de chiffon.

Ainsi, elle assemble pas à pas pourrait-on dire, chaque signe, figuratif ou non, laissant entre eux, du blanc comme pour laisser le temps au temps. Il n’y a ici, aucune hiérarchie entre les signaux envoyés, aucun trajet métonymique. Comme dans l’écriture hiéroglyphique égyptienne, l’oeuvre peut se lire de gauche à droite ou le contraire, de haut en bas ou de bas en haut selon le bon vouloir de celui qui, avec l’auteur entrera en empathie.

Dans son atelier, l’artiste collationne des fragments de vieux rideaux, du linge de maison, des tissus traditionnels ou de vêtements de travail venus de son pays lointain. On trouverait aussi des dessins d’enfant, des motifs du Street Art et des objets trouvés pourvu qu’ils possèdent l’aura. Anna Torma, l’aiguille à la main, fixe alors sur le coton crème, ces indices iconograhiques, en invente d’autres, avec, à ses côtés, sa seconde palette, un bac rempli de bobines de fils de toutes les couleurs. Parfois, elle use du collage, parfois, elle dessine puis elle revient au textile, à la soie ou au chanvre brut, selon son intuition.

Gardienne spirituelle des souvenirs, elle les offre en partage avec la conviction qu’entre les hommes et les femmes, il y a mieux que les paroles pour véhiculer l’empathie. C’est la première fois qu’elle présente son travail dans une galerie européenne à l’occasion d’une exposition de groupe (Imaginated Realities) qui réunit trois autres artistes, Claire Milbrath, Tessa Perutz et Joana Vasconcelos qui, ici, conjuguent sur un mode intime, le concept de féminisme.

Galleria MLF, 13 rue Saint-Georges, 105 Bruxelles. Jusqu’au 20 juillet. Du mercredi au samedi de 10h à 18h. www.galleriamlf.com

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