Marie Nagy (DéFI) a consacré 3 640 euros à sa campagne, Bertin Mampaka (CDH) 6 121 euros, dont 2 090 imputés au parti. © Daina Le Lardic/isopix

L’après-communales à Bruxelles : c’est maintenant l’heure des comptes

Laurence Van Ruymbeke
Laurence Van Ruymbeke Journaliste au Vif

A Bruxelles-Ville, les principales listes électorales et leurs candidats n’ont pas dépassé le seuil des dépenses électorales autorisées. Certains se sont vidé les poches, d’autres ont été soutenus par le parti. Avec des fortunes diverses.

C’est un sésame. Grâce à sa convocation électorale, qu’il ne faut donc pas jeter, l’électeur peut découvrir, par exemple au greffe du tribunal de première instance de Bruxelles, l’ensemble des dépenses électorales engagées par chaque formation politique et chaque candidat, à l’occasion du scrutin communal du 14 octobre dernier.

Seuls les frais consentis à partir du 14 juillet 2018 sont pris en compte dans ce calcul, fondé sur la bonne foi du déclarant. Mais gare aux menteurs, ou aux distraits : Jacques Vandenhaute, alors bourgmestre MR de Woluwe-Saint-Pierre, fut déchu de ses fonctions en 2007, pour avoir dépensé plus que permis.

La loi fixe, en effet, un plafond de dépenses électorales autorisées pour les partis : 372 000 euros à Bruxelles et en Wallonie ou 75 000 euros si une structure ne présente pas plus de cinquante listes pour le scrutin. Un autre est imposé pour les listes, soit, à la Ville de Bruxelles, 92 506,86 euros. Enfin, un candidat ne peut dépenser, à titre personnel, plus de 5 201 euros, à Bruxelles-Ville toujours. Ces plafonds, cumulables, sont établis en fonction du nombre d’électeurs inscrits dans la commune concernée.

Selon les déclarations des listes de parti et de candidats pour Bruxelles-Ville que Le Vif/L’Express a consultées, tous les plafonds légaux ont été respectés. Seul Bertin Mampaka (CDH) a dépensé trop, précisément 6 121 euros selon la fiche déposée à son nom, mais ses frais ont été imputés à la liste CDH-Bruxelles à hauteur de 2 090 euros, ce qui permet au candidat de rester dans les clous.  » Il s’agit notamment de tracts réalisés à son initiative et reprenant d’autres candidats de la liste « , indique-t-on au CDH. Ce que confirme Bertin Mampaka.  » Je suis sans doute le seul honnête, glisse-t-il. Car il est impossible, par exemple, pour un échevin sortant de faire campagne sans dépasser le seuil de 5 200 euros. Un simple tract à distribuer dans les 85 000 boîtes de Bruxelles coûte plus de 2 000 euros.  »

Ecolo en tête

Côté listes, Ecolo-Bruxelles a dépensé le plus (67 023 euros) pour sa campagne. Mais les candidats n’ont pas sorti un sou de leur poche – à quelques exceptions près. Suit le MR, avec 64 147 euros, devant le PS (60 814 euros), le CDH (48 198 euros), DéFI (34 507 euros) et le PTB (16 302 euros). Outre les frais déclarés par les listes électorales, chaque candidat est en outre susceptible de financer sa propre campagne, sauf chez Ecolo et au PTB, qui ont renoncé aux campagnes individuelles. Ce sont, il est vrai, les structures qui exigent de leurs élus la rétrocession de salaire au parti la plus élevée.

Au CDH, la tête de liste Didier Wauters n’a pas dépensé plus de 2 863 euros pour sa campagne, dont 1 978 sur fonds propres, alors que Bianca Debaets, CD&V présente sur la même liste, affiche des frais totaux de 4 080 euros. Mais seuls 221 euros sont sortis de sa poche, le solde étant assuré par son parti. Hamza Fassi-Fihri, 3e sur la liste, dépasse, lui aussi, les quelque 4 000 euros de dépenses personnelles, dont 3 000 viennent de la liste. A la 6e place, Delphine Lemaître n’a, quant à elle, consenti que 132 euros de frais personnels.

Chez Ecolo, de rares candidats, six au total, ont, malgré la consigne, engagé des dépenses individuelles pour un total de quelque 1 554 euros, sans toujours avoir prévenu.  » Nous avions donné notre aval à certaines de ces dépenses, mais n’avons pas été prévenus pour d’autres « , reconnaît Benoit Hellings, tête de liste à Bruxelles-Ville.

Au MR, les candidats assument la plus grande partie de leurs frais de campagne. A Bruxelles-Ville, une convention d’engagement pour campagne de propagande commune a toutefois été signée entre tous les candidats, d’un montant total de 51 441 euros. Ce montant n’est pas imputé à parts égales sur les dépenses personnelles de ceux-ci : 500 euros sont imputés aux dépenses d’Alain Courtois, tête de liste, 10 pour David Weytsman (5e), mais 4 000 pour Sabah Bouhammout (44e).  » Les candidats qui figurent sur la liste mais ne souhaitent pas vraiment mener campagne peuvent ainsi transférer leur quota théorique de dépenses soit à leur liste, soit à un autre candidat, selon les conventions « , précise le MR David Clarinval, membre de la commission de contrôle des dépenses électorales à la Chambre.

A chaque parti sa stratégie

Ces conventions peuvent se multiplier, par exemple entre un nombre réduit de candidats. Dans la farde dévolue à David Weytsman, on en trouve douze différentes.  » Cette imputation ne se calcule pas selon des critères précis, détaille Ahmed Laaouej (PS), vice-président de la commission de contrôle des dépenses électorales. Elle dépend de la visibilité de chacun. Lorsqu’un candidat moins connu s’appuie, via un tract, sur la notoriété d’une personnalité plus connue, elle prend une plus grande part de l’imputation de la dépense à son compte.  » Et le parti peut décider de couvrir ces frais en fonction de sa stratégie propre.  » A Namur, illustre David Clarinval, le MR provincial a choisi de soutenir chaque candidat à hauteur de 500 euros et chaque tête de liste à hauteur de 1 000 euros.  »

Alain Courtois, donc, a dépensé 4 572 euros pour sa campagne, dont 500 couverts par cette convention commune, 3 072 par son patrimoine personnel et 1 000, par des dons. La loi interdit en effet les dons de personnes morales ou d’associations de fait, mais accepte ceux des particuliers, avec des plafonds de 2 000 euros par personne et par an et de 500 euros par candidat. Au-delà de 125 euros, le nom du donateur doit être communiqué à la commission de contrôle des dépenses électorales, mais l’électeur ne peut en prendre connaissance.

Au MR/Open VLD de Bruxelles-Ville, Els Ampe (2e) a sorti 4 955 euros de sa poche et Geoffroy Coomans (3e), 4 971 euros, dont 100 euros proviennent de dons. Pour eux, le parti n’est pas intervenu, selon les fiches consultées, alors qu’il l’a fait, à hauteur de 1 000 euros, pour Aline Godfrin (10e).

Au PS, le même système de convention pour campagne collective prévaut, mais on n’en trouve pas trace dans les fardes déposées au palais de justice. Philippe Close, qui a dépensé 3 248 euros, a pu s’appuyer sur des dons à hauteur de 3 000 euros. Le reste est issu de son patrimoine personnel. Faouzia Hariche (2e) a dépensé 5 099 euros, dont le PS a pris 3 000 euros en charge. L’intervention du parti est la même pour Mohamed Ouriaghli (3e), Karine Lalieux (4e) et Ahmed El Ktibi (5e). Elle diminue à partir du sixième candidat, qui ne reçoit plus que 200 euros. Mais Khalid Zian (9e), reçoit à nouveau 3 000 euros du PS. Les candidats les plus éloignés n’affichent aucune dépense personnelle, sauf le montant renseigné dans la convention du PS bruxellois, soit 653,87 euros.

Chez DéFI, la tête de liste Fabian Maingain a dépensé 1 043 euros, dont 130 provenant de dons et 148 euros du parti. Les autres candidats ont bénéficié financement d’une photo individuelle, à hauteur de 38,44 euros par personne. Marie Nagy, transfuge d’Ecolo, a consacré, elle, 3 460 euros à sa campagne. Une séance photo lui a également été offerte.

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