© BELGA - MICHEL KRAKOWSKI

Kadhafi est un vieux client de la FN Herstal

La vidéo a été postée en février sur YouTube. Elle montre un attroupement de civils libyens, sans doute de Benghazi, brandissant une arme FN303, dite « à létalité réduite ».

Ce FN303 aurait été pris à un mercenaire enrôlé par le régime de Kadhafi. Deux mille armes de ce type, produites par la FN de Herstal, faisaient partie du lot d’armements pour lequel le gouvernement wallon a accordé, en juin 2009, des licences d’exportation vers la Libye (un contrat de 11,5 millions d’euros). Plutôt gênant. Ces armes anti-émeute, destinées en principe à un bataillon d’élite de l’armée libyenne, ont-elles servi à mâter des manifestations ? Luc Mampaey, chercheur au Groupe de recherche et d’information sur la paix et la sécurité (Grip), en est persuadé : « Il est en tout cas préoccupant de voir ces FN303 circuler parmi la population. La Belgique n’est, certes, pas le seul pays à avoir alimenté en armes le régime de Kadhafi. Mais nous n’avons cessé, avec les organisations de défense des droits de l’homme, de demander qu’on s’abstienne de livrer ce genre d’équipement à la Libye, où une répression implacable sévit de longue date contre les opposants. »

La volte-face, le 21 février, de Rudy Demotte, qui avait donné son feu vert à la vente controversée d’il y a deux ans, a fait sourire : le ministre-président de la Région wallonne a soudain constaté une « rupture unilatérale » par Tripoli du contrat passé en mai 2008 avec la FN et a réclamé un renforcement des règles européennes en matière d’exportation d’armes vers les pays réputés sensibles.

Kadhafi est un « vieux client » de la FN. Bien avant l’embargo des années 1992-1999 contre la Libye, le leader mondial de l’arme légère (1 300 travailleurs) fournissait discrètement au régime de grandes quantités de fusils d’assaut FAL, de pistolets GP, de mitrailleuses MAG… Des douilles marquées « FN 7,62 », le calibre des FAL, le produit phare de la FN pendant des décennies, ont d’ailleurs été retrouvées, fin février, sur les pistes de l’aéroport d’El Beïda, deuxième ville de la partie est du pays, où de sanglants combats se sont déroulés. « Depuis l’époque de Robert Urbain, ministre du Commerce extérieur, le PS et certains milieux syndicaux entretenaient de fructueuses relations avec le pouvoir libyen, perçu comme un rempart contre l’  »impérialisme » américain, explique un fonctionnaire wallon au fait des ventes d’armes. Vingt ans plus tard, il reste des traces de cette sensibilité pro-Kadhafi. Si Demotte et son administration étaient réticents à l’octroi des licences à la FN, ils n’ont pas eu le dernier mot. Le rapport de forces était trop favorable au clan  »liégeois » défendu par le ministre Marcourt. »

O.R.

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