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Islamisme : Charles Michel muscle son discours

C’est en duo que Charles Michel, prétendant à la présidence du MR, et le député fédéral Denis Ducarme ont présenté leur discours sur l’islamisme et l’intégration en exclusivité pour le Vif/L’Express.

Retrouvez l’intégralité de cet entretien dans le Vif/L’Express de ce 21 janvier.

Le Vif/L’Express : Difficile de se prévaloir de grands succès en matière de lutte contre le radicalisme religieux. Même l’interdiction de la burqa n’a pas été votée au Sénat…

Charles Michel : Je suis fier d’appartenir à un parti qui a eu la force de clarifier ses positions sur le port ostentatoire de signe religieux ou de la burqa. Mais rien ne s’est concrétisé, faute de gouvernement. L’interculturalité doit se traduire dans des politiques concrètes. Dès lors qu’on est citoyen dans ce pays, nous avons des droits, des libertés, mais nous avons aussi des devoirs et des responsabilités. Dont celle de respecter les principes fondamentaux de notre démocratie.

Denis Ducarme : Lorsque j’ai commencé à travailler sur l’islamisme, en 2005, cela n’a pas toujours été simple au MR. Charles Michel m’a toujours soutenu. Avec lui, on peut être sûr que le texte interdisant la burqa se trouvera dans la liste des propositions de loi que le futur gouvernement relèvera de caducité pour qu’il puisse achever son parcours au Sénat.

Dans certaines administrations fédérales, des femmes portant un foulard islamique travaillent derrière un guichet, vu le flou législatif ambiant. Normal ?

C.M. : Dès lors qu’on incarne l’Etat, qu’on soit fonctionnaire ou parlementaire dans l’exercice de ses fonctions, le port ostentatoire de signe religieux pose problème.

Vous visez la députée bruxelloise Mahinur Ozdemir (CDH) ? Le groupe de travail MR présidé par Daniel Bacquelaine avait conclu que rien ne pouvait le lui interdire…

C.M. : Je vais plus loin que cela. Quand il est dans l’exercice de ses fonctions, le parlementaire est au service de l’intérêt général. Le Parlement représente la Nation et, par conséquent, de la même manière qu’un fonctionnaire représente un morceau de l’administration, a fortiori dans une enceinte parlementaire, il est nécessaire de ne pas exprimer ses particularismes religieux.

D.D. : Je viens de déposer une proposition de révision du règlement de la Chambre qui interdit aux élus le port ostensible de signes religieux durant les travaux parlementaires.

Faut-il faire appel à des pays tiers pour combattre le radicalisme, donc, admettre en quelque sorte leur ingérence ?

D.D. : En tout cas, il ne faut pas en revenir à l’islam des ambassades ! Qu’il y ait des liens, une réflexion, des collaborations avec les pays d’origine est une bonne chose. Ainsi, le Maroc forme des prédicatrices alors que l’Exécutif des musulmans de Belgique n’a pas cette ouverture à l’égard des femmes. Mais on doit surtout, plus qu’avant, travailler avec des musulmans comme Mohamed Sifaoui (NDLR : journaliste français d’origine algérienne) qui partagent le même socle de valeurs fondamentales et qui envisagent l’islam comme une religion et non, à l’instar des Frères musulmans, comme une politique. Quand j’entends M.Mahi (NDLR : Yacob Mahi, publiciste de la mouvance des Frères musulmans) nous parler de « citoyenneté musulmane », de « projet de société musulman », je m’inquiète.

En matière de représentation du culte musulman, faut-il accepter sa léthargie actuelle ou le remettre sur pied ?

C.M. : Aujourd’hui, la confusion entre les musulmans et les islamistes porte réellement préjudice à la cohésion sociale. Cela suscite de la méfiance, une forme de racisme et de rejet, dans certains cas, de façon scandaleuse. Le Parlement et le gouvernement doivent faire en sorte que l’Exécutif des musulmans de Belgique dispose de la confiance et de la légitimité nécessaire pour jouer un rôle dans le débat public, en respectant la séparation de l’Eglise et de l’Etat, cela va sans dire.

D.D. : Quand la vice-présidente de l’EMB prend officiellement position contre la loi votée par la Chambre sur la burqa, je dis qu’elle outrepasse son rôle. Il faut se rendre compte que les gens réagissent extrêmement négativement à ce genre de comportement. Ils comprennent que les Frères musulmans et les islamistes veulent imposer leurs règles et que la réponse des autorités est trop laxiste.

Après les naturalisations, c’est le regroupement familial qui fait débat à la Chambre. Les alliances de circonstances avec les partis flamands, et la NV-A en particulier, vont-elles se multiplier ?

C.M. : Il faut durcir les conditions du regroupement familial notamment à travers le critère du revenu. La NV-A est un parti que je conteste sur le plan de l’avenir du pays mais c’est un parti démocratique. Sur le plan socio-économique et pour certains problèmes de société (justice, sécurité, nationalité, immigration), on a des points de vue communs. Si une de nos propositions est soutenue par la NV-A, on ne va pas soudainement la retirer ! La différence est que la NV-A est un parti nationaliste qui prône le repli sur soi et que le MR est un mouvement humaniste qui se fonde sur le respect, convaincu que l’ancrage international est un élément-clé de notre succès. Deux tiers de notre PIB proviennent de nos exportations. Pour notre prospérité, nous avons besoin de cette ouverture sur le monde.

Entretien: Marie-Cécile Royen

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