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Impuissance, solidarité et réchauffement climatique en « une » des quotidiens

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Les inondations inquiètent pour l’avenir avec la lente reconstruction et le danger climatique. Mais la communion des Wallons, et au-delà, donne confiance.

« L’impuissance. » C’est le même mot qu’ont choisiLe Soir et La Libre pour exprimer le désarroi ressenti face à la violence des inondations qui ont bousculé le pays.

Le Soir met l’accent sur la solidarité. « C’est dans cette émotion-là qu’est née ce qu’une crise peut nous révéler de plus beau: la solidarité… La solidarité entre voisins, entre jeunes et plus âgés, entre bénévoles et employés de services de secours, entre scouts détrempés et villageois compatissants…. C’est dans cette émotion collective que sont nées des vocations de héros du quotidien. De solidarité, il en est question aussi entre communes, entre provinces, entre Régions d’un pays tellement déchiré par les nombrilismes qu’on en vient à se frotter les yeux pour y croire. »

Il viendra un moment où on listera les fautes, souligne l’éditorialiste. Mais… « Et si, une fois n’est pas coutume, on évitait de tomber dans le piège facile de l’imputation sur autrui? Et si on convenait, dès aujourd’hui, à l’instar d’Aurore Degré, professeur à Gembloux Agro-Bio Tech, que toute cette histoire c’est d’abord… la faute de la pluie, tombée en telle quantité, que ‘quel que soit la gestion des sols, l’urbanisation, la perméabilisation, on a forcément des inondations et des débordements de rivière’. Et si on laissait climatologues, météorologues, politologues et autres hydrologues analyser l’affaire avec raison, sans passion, dans un cadre certainement multifactoriel? »

« Nous ne sommes pas prêts… »

« Si l’on se gardera d’établir des liens trop hâtifs entre les dérèglements du climat et les événements dramatiques que vit la Wallonie, mais aussi certaines parties de la Flandre et des pays voisins, force est de constater que nous ne sommes pas prêts à affronter des épisodes météorologiques aussi extrêmes, souligne pour sa part La Libre. Épisodes que les scientifiques nous prédisent plus fréquents et plus… extrêmes. »

Qui invite à tirer les leçons de cet épisode: « Les leçons devront – enfin ! – être réellement tirées et des changements structurels, fondamentaux, déplaisants parfois, mis en oeuvre sans faiblir. Nous ne sommes pas maîtres des forces de la nature. Nous ne pouvons qu’agir au mieux pour éviter de les déstabiliser davantage et essayer d’en prévenir les conséquences. Il ne s’agit pas de religion ou d’idéologie, mais de science. De regarder la réalité en face, pût-elle nous sembler improbable ou lointaine. Nous devons, c’est incontournable, changer nos modes de vie – l’occupation des sols en fait partie. »

« La violence météorologique nous rappelle qu’il nous faut réagir, souligne aussi L’Echo Que nos sociétés doivent s’adapter et se transformer pour contrer les effets du changement climatique. Le coût financier est élevé. Mais il est moindre que le coût de l’immobilisme. »

« Un sentiment de crainte »

« Le choc et la violence des intempéries nous ont plongés dans un état de sidération bien légitime. Mais quand le temps sera venu de reconstruire tout ce qui s’est effondré en quelques heures, il faudra se poser les bonnes questions, soulignent encore les journaux du groupe Sud Presse. Pour éviter que nos villes et nos villages ne s’écroulent à nouveau comme un château de cartes face à des inondations qui avaient des airs de tsunami… »

L’impuissance, encore, se retrouve dans les mots de L’Avenir. « Celle qui s’empare de vous lorsque vous voyez le cours d’eau se déchaîner, les eaux monter, franchir votre seuil, emporter ce que vous avez parfois mis une vie à accomplir. Le désemparement de ne pouvoir venir en aide à des milliers de personnes dans la détresse. L’angoisse dans l’attente de recueillir des nouvelles rassurantes de proches. »

Le quotidien régional ajoute: « Le moment n’est pas encore venu de tirer de grandes conclusions. Mais à côté de l’urgence à très court terme se manifeste aussi un sentiment de crainte pour un avenir un peu plus lointain. Il faut pouvoir entendre, aujourd’hui, des scientifiques tels que le climatologue Jean-Pascal van Ypersele marteler que le dérèglement climatique nous amènera de nouveaux extrêmes – canicules et intempéries – s’il n’est pas pris en compte à sa juste mesure. »

« Une chance pour fixer l’agenda »

En Flandre, la tonalité est globalement la même, à quelques nuances prêt. Het Laatste Nieuws souligne ainsi que l’activiste du climat suédoise Greta Thunberg a rapidement exploité les événéments dramatiques survenus en Belgique et en Allemagne pour dénoncer l’inaction face à l’enjeu climatique. Idem pour Groen à la Chambre. « Les catastrophes naturelles sont pour les verts ce que la terreur islamiste est pour le Vlaams Belang: une chance pour définir l’agenda », souligne l’éditorial du quotidien le plus lu au nord du pays.

« Nous ne pouvions pas dire que nous n’étions pas prévenu », souligne de son côté le Standaard en soulignant que le panel climatique des Nations unies prévient depuis de longues années que de tels événements extrêmes vont avoir lieu. Le quotidien insiste sur la nécessité de s’adapter à cette nouvelle donne, notamment sur le plan urbanistique. « Mais nous devons aussi nous en prendre aux causes fondamentales du réchauffement de la terre« , souligne-t-il.

De même, le Morgen souligne que la ministre flamande du Climat, Zuhal Demir (N-VA), n’a « pas encore tout compris » lorsqu’elle promet d’investir 50 millions d’euros pour protéger les zones les plus exposées. Le quotidien critique l’attitude de la ministre nationaliste qui ne prend pas suffisamment conscience des changements fondamentaux de politiques nécessaires, quand elle affirme ne pas vouloir donner l’impression aux gens « que le climat nous coûte davantage d’argent ».

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