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Georges-Louis Bouchez, le chevalier blanc contre les ténors PS et N-VA (analyse)

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Le président du MR lutte contre les moulins à vent de la politique belge. Le voilà à couteaux tirés avec Bart De Wever, après Elio Di Rupo. Il veut les battre sur leur propre terrain.

Le président du MR est le chevalier blanc de la politique belge. Il communique avec frénésie sur les réseaux sociaux, multipliée les idées à contre-courant, développe des stratégies et fait pour tout pour arriver au sommet. Mais il joue aussi à merveille le rôle de l’outsider qui s’en prend aux grands pour se faire une place dans la politique belge en utilisant leur stature. Au risque d’énerver son monde et de se retrouver dans l’opposition.

Le voilà cible du président de la N-VA, Bart De Wever, qui multiplie les attaques à son égard. Connaissant le jeune libéral, il risque d’y prendre goût.

Car telle est l’histoire de Georges-Louis Bouchez, 34 ans, amené à gérer des négociations politiques fédérales complexes alors qu’il est devenu président il y a moins d’un an, successeur improbable adoubé par Charles Michel et l’appareil du MR.

Le Montois s’est fait connaître en mordant autant qu’il le pouvait le seigneur de la cité, Elio Di Rupo, et le parti socialiste. Il en perdu un poste d’échevin, tant ses attaques incessantes indisposaient l’actuel ministre-président wallon. Il est pratiquement devenu persona non grata dans certains milieux, mais la stratégie était délibérée : ce faisant, il a profité de la notoriété de son rival pour se faire un nom. Et pour construire une alternative, baptisée « Mons en mieux », avec le CDH et des représentants de la société civile pour dépasser la logique de parti.

Il énervait? Ô combien. Il était critiqué? Oh que oui, notamment pour sa ligne idéologique étrange, passant d’un libéralisme débridé à l’allocation universelle. Mais son esprit d’initiative et son caractère hors-norme séduisaient, aussi. Charles Michel l’a adoubé, lui qui venait du cabinet de Didier Reynders, l’éternel rival. Georges-Louis Bouchez a su faire un étrange synthèse (jusque dans sa gestuelle) et il a vaincu Denis Ducarme pour rejoindre les grands, lui qui n’avait jamais occupé de fonction ministérielle et n’avait été que brièvement député.

Dans cette cour des grands, il rivalise forcément avec Paul Magnette – « Polo » pour les intimes. Le président du PS ne peut pas réussir là où il aurait échoué, notamment dans la formation d’un gouvernement fédéral, ou alors cela lui ferait trop mal. En toile de fond, il y a toujours cet éternel combat entre le MR et le PS pour la place de premier parti de Belgique francophone, cette lutte menée auparavant par Louis Michel, Didier Reynders ou Charles Michel. C’est la trame première de ce combat contre les grands, auxquels il va se heurter pour exister dans le nouveau monde où il a atterri.

Le chevalier blanc montois est toutefois parti à l’assaut d’une autre citadelle, celle de Bart De Wever et de la N-VA. A priori, pourtant, le MR est le seul parti francophone à la côtoyer, il a gouverné pendant quatre ans avec elle, même si cela s’est mal terminé sur le Pacte des migrations. La loyauté nationaliste n’est pas légendaire. Ila même imaginé monter une nouvelle coalition sans le PS, cette fois-ci, baptisée Arizona avec le soutien du CDH. Mais la question communautaire est revenue sur le tapis et Bart De Wever lui a soudain préféré Paul Magnette. Un parfait bilingue, cela joue peut-être, alors que le Montois ne l’est pas. Un homme soudain prêt à faire de concessions institutionnelles, alors que GLB, lui, ne jure que par la Belgique, le socio-économique et le lien indéfectible (jusqu »ici) avec l’Open VLD, parti frère flamand.

La rupture a été consommée cet été.

Si le président du MR poste un message en néerlandais pour appeler à former un gouvernement fédéral, cette semaine, ce n’est pas pour tendre la main aux nationalistes, mais pour les défier. L’homme ne doute de rien. Sans doute songe-t-il à s’en prendre à Bart pour grandir encore, élargir sa notoriété et son assise, tandis que le PS risque de s’abimer dans ses discussions avec la N-VA. Stratégiquement, la communication commune avec les écologistes de cette semaine fait partie de ces beaux coups dont il raffole. Quitte, là encore, à énerver les partenaires potentiels ou à se faire finalement éjecter. Le jeune trentenaire veut se faire respecter dans la cour des grands et prendre les ténors à leurs propres jeux.

Les battre sur leur propre terrain. L’histoire ne dit pas, encore, s’il réussira à le faire.

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