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Euthanasie: la clause de conscience est-elle légitime?

Le Vif

La clause de conscience que font valoir certaines institutions de santé pour ne pas appliquer la loi sur l’euthanasie fera l’objet d’un prochain « avis » du Comité consultatif de Bioéthique, dont « une partie tend à prouver » qu’il n’existe « pas de fondement juridique » permettant d’affirmer qu’elle serait « légitime », a indiqué mardi l’un de ses membres, reconnaissant cependant qu’il n’y avait d’unanimité à ce propos.

La loi sur l’euthanasie permet au médecin de faire valoir une clause de conscience mais de nombreux observateurs affirment que des « institutions » (hôpitaux, maisons de repos, etc.) ont pour politique de l’intégrer dans leurs relations de travail avec le corps médical. En 2003, un médecin a été licencié. Il avait pratiqué un acte d’euthanasie, alors que la philosophie de l’institution qui l’employait n’acceptait pas ces pratiques médicales pourtant légalisées.

Il a obtenu gain de cause devant une commission d’arbitrage mais en raison d’un vice de procédure dans son licenciement. L’affaire reste pendante

devant la justice. Certains demandent une protection accrue des médecins et une meilleure garantie des droits des patients.

Quatre des quinze propositions de loi actuellement débattues au Sénat en vue d’une extension de loi sur l’euthanasie visent notamment à préciser le cadre de la clause de conscience. Certains textes prévoient une obligation faite au médecin qui soulèverait une objection de conscience, d’informer son patient en vue de lui permettre de faire valoir ses droits, d’autres de le renvoyer vers un service social ad hoc, d’autres enfin d’obliger le médecin en question à envoyer son patient vers un confrère apte à rencontrer ses doléances.

Une série de juristes se sont exprimés mardi sur l’état de la situation devant les Commissions réunies des Affaires sociales et de la Justice du Sénat. Professeur à l’Université de Liège et membre de la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie,

Gilles Genicot a estimé qu’il n’existait pas de fondement juridique permettant de légitimer le fait que des « institutions » de soins aient recours à la clause de conscience, un point de vue, a-t-il assuré, que l’on retrouvera dans le prochain avis du Comité consultatif de bioéthique dont il fait partie.

Trois législations permettent une clause de conscience, l’interruption volontaire de grossesse, la procréation médicalement assistée et l’euthanasie, mais seule la deuxième prévoit explicitement la faculté pour une institution, en l’occurrence un centre de fécondation, d’orienter sa politique, a-t-il argué.

Chercheur postdoctorant à l’Université de Gand, Sylvie Tack s’est montrée plus nuancée, soulignant qu’on touchait à deux limites, celles du « droit du patient » et sa liberté de choix, et celles des « droits des collaborateurs » des institutions, dont les médecins, limités par les obligations liées au travail mais aussi, la loi anti-discirimination, la loyauté, le secret professionnel, etc. Elle a cependantégalement admis que la clause de conscience prévue par la loi sur l’euthanasie se limitait au « médecin » ou une autre « personne ». Reste à savoir s’il s’agit d’une personne physique. Il serait bon de préciser la loi, a-t-elle dit.

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