Carte blanche

Être wallonne ou germanophone : faut-il impérativement choisir ?

C’est avec beaucoup d’intérêt que j’ai suivi dimanche matin l’interview d’Olivier Paasch, le Ministre-Président de la Communauté germanophone, dans l’émission  » C’est pas tous les jours dimanche  » diffusée sur RTL-TVI. Il est en effet rare de voir un représentant de la communauté linguistique d’où je suis née, où j’ai grandi et je vis actuellement, s’exprimer en direct sur une grande chaine de télévision francophone.

Naturellement, la question de l’identité germanophone est abordée. C’est ainsi que le Ministre-Président dit qu’il ne se sent pas du tout wallon car la Communauté germanophone a une histoire propre, une langue propre et une identité propre. Je suis députée wallonne depuis presqu’un an, j’ai prêté serment en allemand et pourtant les déclarations du Ministre-Président me posent un véritable cas de conscience : est-ce qu’être députée wallonne tout en étant germanophone est incompatible ? Est-ce que je dois choisir entre les deux ?

Cette identité et cette histoire, je ne l’ignore pas puisque je l’ai vue se développer tout au long de ma vie. Lorsque j’ai été élue avec 4.674 voix de préférence pour mon premier mandat, j’ai du très vite faire un choix. C’est ainsi que j’ai refusé de trancher : je suis la députée de l’Arrondissement de Verviers. J’ai fait ma campagne en deux langues pour les 20 communes francophones et les 9 communes germanophones. Je suis membre de deux partis : le PFF et le MR. Je suis germanophone comme je suis wallonne et c’est un fait que j’assume pleinement.

De nombreuses personnalités politiques germanophones sont animées par un concept : l’autonomie. Leur but est de faire d’Ostbelgien la quatrième région de la Belgique. Je soutiens le fait que des compétences telles que le tourisme, l’emploi, les pouvoirs locaux ou le patrimoine, entre autres, soient exercées par la Communauté germanophone sur son territoire. Il y a, en effet, une meilleure subsidiarité et efficacité au niveau de l’exercice de ces compétences. L’histoire, l’identité et la connaissance du territoire par les germanophones montrent à raison que ces compétences doivent être exercées par les germanophones. Ce but d’efficacité, je le rejoins également dans la volonté d’Oliver Paasch d’obtenir les compétences provinciales comme il l’a pu annoncer hier à Christophe Deborsu.

En tant que germanophone, je trouve que nous sommes privilégiés et que nous devons avoir l’humilité d’admettre que nous sommes la minorité linguistique la plus protégée au monde. J’apprécie d’autant plus le fait que le Ministre-Président mesure à juste titre des limites de cette autonomie.

Pour un territoire de 854 km² où vivent 77.000 citoyens, nous ne pouvons pas tout faire à la place de la Région wallonne. Des matières comme l’économie, la mobilité, l’agriculture ou l’environnement, pour ne citer qu’elles, doivent toujours être exercées par la Région wallonne pour ces mêmes raisons. Ostbelgien n’est pas une île et s’isoler en devenant la quatrième région serait une erreur. Ce serait une charge financière que la Communauté germanophone ne serait pas prête à assumer tout seule. En laissant la Wallonie exercer ces compétences, nous aurions des économies d’échelles qui sont les bienvenues.

J’ai eu l’occasion de rencontrer des bourgmestres de communes germanophones qui ont des idéologies politiques aussi diverses que variées. Ils m’ont tous dit, sans exception, qu’il ne faut plus transférer de compétences de la Wallonie à la Communauté germanophone. Ces bourgmestrest ont peur pour les routes, leurs chemins de mobilité douce, leurs éoliennes, leurs forêts ou leurs finances.

Les germanophones se sont retrouvés belges au lendemain de la première guerre mondiale comme Malmedy et Waimes dont leurs habitants se sentent comme étant wallons. Leur adaptation en tant que belges ne fut pas évidente au premier abord mais aujourd’hui l’attachement des germanophones à notre pays est tel qu’ils sont appelés les derniers belges. Je reste convaincue que les identités wallonne et germanophone peuvent cohabiter ensemble. Germanophones et wallons se voient comme partenaires, comme étant complémentaires mais la fusion des deux formes reste pour moi possible et réalisable, peu importe le temps que cela prendra.

Carte blanche de la Députée Christine MAUEL

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